DRAME Le beau monde
Cinéma ♥♥

le beau monde
 
Le beau monde propose un objet cinématographique rare, un film français à prétention sociale qui ne tienne pas de l’indigeste brûlot gauchiste, mais intéresse véritablement. Il s’attache à décrire le destin d’Alice, vivant en une HLM d’une ville normande avec sa mère et son beau-père. Elle réussit à pénétrer, à la manière de la jeune fille homonyme du conte de Lewis Carroll, en des milieux très différents, beaucoup plus aisés financièrement, symbolisés par un château. Elle sera donc aidée dans l’acquisition du minimum de codes sociaux, qui lui permettront de rédiger ses lettres de candidature pour des écoles d’Art, véritable épreuve pour les jeunes, même de bonne volonté, sortant de la déséducation nationale. Ana Girardot réussit à incarner avec conviction et justesse cette étudiante déterminée, qui veut faire de la broderie son métier, et tient à acquérir une véritable culture générale, artistique, littéraire en particulier. Les personnages secondaires réussissent à former des environnements cohérents. Celui de l’école d’arts appliqués intéresse véritablement, avec son enseignement à la fois basé sur le meilleur, nos traditions nationales, et le pire, les extravagances de l’anti-art contemporain.
Mais Alice est prise aussi d’une vive passion pour le fils de la châtelaine, un fat à prétentions artistiques, photographe. C’est une occasion de déplorer au passage les mœurs actuelles, le concubinage massif de jeunes qui ne pensent pas à mal en forniquant ; tout cela gagnerait à être filmé avec davantage de pudeur. En outre la romance n’est peut-être pas exempte d’arrière-pensées gauchisantes, mais après tout des gens riches peuvent être odieux, et des pauvres touchants. Ce qui émeut plus que l’amour asymétrique d’une jeune femme pour un égocentrique insupportable et prétentieux, c’est la détermination d’Alice, qui réussit ses études, pénètre dans sa spécialité artistique et dans le monde du travail. En travaillant, on peut espérer s’en sortir. Voilà un bon message, qui sort du misérabilisme convenu, que propose Le beau monde.
 
Hector Jovien