Le Petit Prince est un film français, visible par toute la famille, ce qui constitue un prodige, ou du moins une grande rareté, de nos jours. Cette œuvre d’animation entend rendre un vibrant hommage au long poème en prose éponyme d’Antoine de Saint-Exupéry. Le Petit Prince original est au cœur du récit ; les scénaristes ont inventé une forme d’introduction, doublée surtout d’une suite au conte original et qui restent dans son esprit. La langue demeure pour l’essentiel belle, conforme à l’original, à la seule exception d’un malheureux et horrible « je me casse » au lieu de « je m’éclipse », qui aurait été ô combien plus pertinent au milieu des étoiles et des petites planètes.
 

"Le Petit Prince", fidèle à l’esprit d’Antoine de Saint-Exupéry

 
Le film alterne en permanence entre une réalité grise, celle d’une petite fille condamnée par une mère autoritaire à un strict programme d’étude durant tout l’été, et le monde baroque du très vieux voisin aviateur, qui lui fait découvrir l’univers onirique du Petit Prince. La fusion des deux dimensions est particulièrement séduisante. Il y a là beaucoup de thèmes, dont l’amitié (pourquoi pas intergénérationnelle ?) et le rappel de la nécessité de l’expression fréquente de l’amour dans la famille, qui commence par la présence. Le spectateur peut être ému par la tristesse de l’héroïne qui, depuis le divorce de ses parents, ne voit plus du tout son père et trop peu sa mère, au bureau du matin jusqu’à tard le soir. Ce réalisme est particulièrement attristant, car l’on n’est pas là dans le conte pur avec un malheur d’exception. La disparition de la famille traditionnelle ne rend décidément pas les gens heureux. Le film s’adresse avant tout aux enfants. Il s’avère seulement, malgré toutes ses qualités, un peu long pour le jeune public. Mais il saura plaire aussi aux adultes sensibles à l’œuvre originale, qui en retrouveront l’esprit.
 

Hector Jovien