
Le NGF, c’est le futur avion de combat européen (new generation fighter), et l’homme qui évoque son prix faramineux Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation, qui est maître de sa conception et sa construction. Trappier, qui était entendu le 9 avril par l’Assemblée nationale, n’a pas caché son peu d’enthousiasme et d’optimisme. C’est qu’il est très complexe. Cet avion devra opérer dans un « nuage de combat » avec notamment des drones. Or c’est Airbus qui a la maîtrise d’œuvre des drônes, tandis que Dassault a celle du NGF, tout en ayant pour sous-traitants pour celui-ci Airbus Espagne et Airbus Allemagne. Et la machine est en train de gripper. Le projet a été découpé en tranches. Après avoir cherché, pendant longtemps, un accord sur le partage des tâches et la propriété intellectuelle, ce projet est à la phase 1B, celle-ci devant ouvrir la voie à un démonstrateur devant être développé durant la phase 2. Celle-ci doit encore faire l’objet de discussions entre les trois pays concernés. Trappier n’y croit qu’à moitié : « J’espère qu’on arrivera à un accord pour passer à la phase suivante. (…) Mais je ne suis pas sûr que ce soit un modèle d’efficacité. (…) Je suis pour que le système de combat aérien soit piloté par un maître d’œuvre global, qui le penserait autour d’un avion (…) plutôt que l’on fasse ce découpage permanent. Le problème est aux interfaces. La gestion des interfaces, si vous n’avez pas un leader au-dessus, ça ne marche pas. » Autre aspect : le NGF doit être en mesure de mener des missions liées à la dissuasion nucléaire. Pour cela, il doit être « Itar Free », c’est-à-dire qu’il ne doit pas être assujetti à la réglementation américaine sur les ventes d’armes internationales. « Dans le SCAF, si j’ai bien compris ce que les pouvoirs publics me demandent, c’est de garder la capacité de développer un avion pour la dissuasion nucléaire française. En ce sens, l’avion doit être capable de mener ses missions sans aucune contrainte d’un pays étranger, quel qu’il soit. Donc, j’ai ça en tête. Si jamais ceci n’était pas possible, je le dirais, je l’écrirais, et donc, normalement, le programme s’arrêtera » : le PDG de Dassault a répété à plusieurs reprises que c’était à l’Etat de trancher les questions politiques que posent l’armement. Et notamment la question centrale : qui décide de son emploi, y a-t-il une défense indépendante, qui suppose évidemment un armement indépendant.
« Je sais que beaucoup de pays, en Europe comme en dehors d’Europe, sont très à l’affût de savoir si on va garder nos compétences de manière autonome, voire indépendante », a-t-il noté. Au moment où l’on parle de Défense européenne intégrée, voilà une remarque intéressante.