La rencontre entre le Premier ministre grec Alexis Tsipras et le président russe Vladimir Poutine a lieu ce mercredi, et suscite des commentaires enthousiastes dans les médias russes. Le site rt.com annonce que la Grèce pourrait demander l’aide de la Russie alors qu’elle se trouve dans l’incapacité de payer ses dettes. A un jour d’une échéance où elle doit rembourser 463 millions d’euros au FMI, la rencontre ressemble en effet à une réunion de proscrits : d’une part la Russie, en butte aux sanctions prononcées par l’Union européenne à la suite de l’affaire ukrainienne, de l’autre la Grèce de Syriza qui essaie de se soustraire à la mainmise de cette même Union européenne.
De la fourniture directe de liquidités pour honorer sa dette à des remises « confraternelles » sur le gaz fourni par le géant russe Gazprom, plusieurs scénarios sont envisagés par le site d’information russe qui verrait bien les deux partenaires discuter des manières de contourner les sanctions européennes.
La Grèce de Syriza dans la sphère d’influence de la Russie
C’est le ministre des finances russe, Anton Siluanov, qui a le premier soulevé l’idée de voir la Russie assister financièrement la Grèce, peu de jours après la victoire de Tsipras aux élections grecques en janvier. Pour ce qui est des remises sur la fourniture de gaz, elles sont évoquées par le journal Kommersant qui cite une source gouvernementale russe.
Même si le ministre grec des finances, Yanis Varoufakis, déclarait en février que Syriza ne demanderait jamais d’aide financière à la Russie, la situation de la Grèce pourrait l’y contraindre.
De son côté, la Russie de Poutine, en proie aux difficultés liées à la chute du pétrole et menacée d’une contraction de son économie – entre 3 et 4 % en 2015, selon les projections – espère quand même une amélioration de sa situation et possède d’importantes réserves monétaires : 356 milliards en avril, note rt.com. Et elle continue d’assister et de prêter de l’argent à ses anciens satellites soviétiques.
Grèce : aide de Poutine à Tsipras ?
Quel intérêt pour elle d’aider – directement ou indirectement – la Grèce qui a emprunté 240 milliards à l’UE et qui n’a pas affiché de croissance depuis six ans ? Il ne peut être que politique, dans le contexte de la construction du nouveau pipeline Turkish Stream qui remplace le projet européen, et il peut aussi passer par la levée partielle des contre-sanctions économiques russes à l’égard de l’Union européennes, qui ont lourdement frappé la Grèce, à commencer par l’interdiction des importations alimentaires. 40 % des exportations grecques vers la Russie étaient de cette nature. Pour cela, il faudrait que la Grèce quitte l’Union européenne… Ce qui la ferait tomber aussitôt dans la sphère d’influence russe.
Mais elle peut aussi, à l’intérieur de l’UE, opposer son veto aux sanctions contre la Russie. Un scénario qui lui permettrait de continuer d’emprunter à l’Union européenne, ce que la Grèce souhaite faire s’il faut en croire Varoufakis.
Quoi qu’il en soit, la Russie ne rechigne pas à négocier avec la Grèce tombée aux mains d’un mouvement d’extrême gauche, Syriza – pas plus que l’Union européenne, d’ailleurs.
Anne Dolhein