Géo-ingénierie : à la Maison Blanche, on étudie comment bloquer le rayonnement solaire face au changement climatique

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La division des sciences de l’Office of Science and Technology Policy de la Maison Blanche (OSTP) a repris du service depuis l’arrivée de Biden. Et ses derniers conseils au président valent qu’on s’y arrête : il s’agit d’un point sur des méthodes pourtant controversées d’intervention d’urgence sur le climat, qu’on regroupe sous la dénomination de « Solar Radiation Modification » (SRM), « modification du rayonnement solaire ». La seule existence d’une telle enquête sur la géo-ingénierie solaire pose question : alors même que le texte dresse les lacunes critiques considérables des connaissances d’une telle prospective, il semble le présenter comme une étape potentielle de la lutte contre le « changement climatique », si les politiques existantes, comme le « Zéro émission nette » ne fonctionnent pas – et elles ne fonctionneront pas.

 

Une solution radicale avec des lacunes considérables

Le rapport de 44 pages, rendu public vendredi 30 juin par la Maison Blanche, est futuriste. Publié à la fois par l’OSTP et la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), il suggère donc le « possible déploiement » de techniques de géo-ingénierie solaire pour atténuer les effets du changement climatique. L’utilisation de techniques SRM qui bloqueraient ou filtreraient la lumière du soleil est explorée en tant que « complément potentiel à d’autres outils disponibles ».

Quelles sont ces techniques ? L’objectif est d’augmenter la part du rayonnement solaire renvoyée vers l’espace pour refroidir à court terme (une petite décennie) la Terre. Les méthodes proposées sont « l’amélioration de l’albédo de surface, l’éclaircissement des nuages marins (MCB), l’injection d’aérosols stratosphériques soufrés (SAI) et des méthodes spatiales ». L’amincissement des cirrus (CCT), qui vise à diminuer la capacité de ceux-ci à piéger le rayonnement infrarouge terrestre, pourrait également être utilisé.

Le rapport de la Maison Blanche compare les SAI à des éruptions volcaniques « qui sont connues pour refroidir la Terre ». Le document décrit l’éruption du mont Tambora en 1815 qui « a refroidi la Terre de 0,7 °C et a conduit à une “année sans été” (1816), a modifié les régimes de précipitations, perturbé les moussons et provoqué des inondations engendrant de mauvaises récoltes, la famine, et l’apparition de maladies ». Ça donne envie !

 

Une perturbation écologique de premier ordre contre le changement climatique

La « modification du rayonnement solaire » ou SRM n’agit donc pas sur les causes du prétendu changement climatique. Il ressemble davantage à un jeu d’apprenti sorcier, tentant d’influer sur le cours des événements sans conscience aucune de ce qui pourrait en résulter : nous sommes dans la manipulation artificielle, sur un domaine, le système climatique terrestre, dont nous sommes loin de maîtriser tous les paramètres. Le rapport est très clair : les conséquences du « déploiement de la SRM impliqueraient inévitablement ses propres risques, dont la quasi-totalité est mal comprise et dont certains sont inconnus ».

La procédure peut déclencher des changements dans les températures stratosphériques, une élévation du niveau de la mer, une acidification des océans et une modification des régimes de précipitations. Elle peut également affecter la végétation terrestre, la biodiversité, les écosystèmes, la production agricole et les récifs coralliens. Sans compter les risques pour la santé avec l’exposition aux particules, les perturbations sociales et économiques globales, voire les inégalités régionales, les impacts se trouvant différents d’un point à l’autre du globe…

D’autre part, il n’aurait aucune incidence sur le réchauffement des températures océaniques « principalement dû à l’augmentation des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère » ou la perte de glace terrestre (comme l’enseigne la religion du climat).

 

Une science fondée sur la peur pour une gouvernance mondiale de la stratosphère ?

Devant tant d’incertitudes alarmantes, le jeu semble fort peu attractif ! Et d’ailleurs, la Maison Blanche a bien reconnu que « ce rapport ne signifie aucun changement de politique ou d’activité de la part de l’administration Biden-Harris… Il n’y a aucun plan en cours pour établir un programme de recherche complet axé sur la modification du rayonnement solaire ».

Cependant, ils semblent déjà prêts à ce pari, à comparer les risques présumés de ne pas lutter contre le changement climatique et ceux d’utiliser la géo-ingénierie pour refroidir la terre, même si « des lacunes et des incertitudes substantielles existent ». Autrement dit, ils accepteraient de s’appuyer sur un fait non scientifiquement avéré, à savoir le « changement climatique », pour encourir un chaos imprévisible… C’est dire le message de peur, toujours le même, qu’ils entendent imposer.

Un autre message, important, est celui du GIEC. Tous ses rapports de la dernière décennie ont noté les inquiétudes essentielles que pouvait soulever la SRM. Mais le plus grand risque, selon lui, est qu’elle ne soit pas envisagée au niveau mondial : si on touche au rayonnement solaire, il est impératif que soit établie une politique mondiale. Et c’est aussi ce qu’a recommandé un rapport récent du Programme des Nations Unies pour l’Environnement : la mise en place d’une gouvernance mondiale en préalable à toute expérimentation en extérieur. La bonne aubaine.

 

Davos, Gates et Soros pour le blocage du rayonnement solaire

Quant aux chercheurs, aux scientifiques, les avis sont plus que partagés et la tentation idéologique bien présente.

En janvier 2022, un collectif avait publié une lettre ouverte aux gouvernements et aux Nations unies, appelant à un accord international sur le non-recours à la « géo-ingénierie solaire », cet « ensemble de technologies risquées et mal comprises qui cherchent à gérer intentionnellement la lumière solaire entrante à l’échelle planétaire ». Il réclamait l’absence de financement public et de soutien de la part d’institutions internationales.

Mais en février 2023, c’est un autre collectif qui publiait, à l’initiative de chercheurs de l’université de Washington, une lettre ouverte appelant au contraire à soutenir une recherche « responsable » pour évaluer « objectivement » le potentiel de la SRM. Selon eux, l’éventuel déploiement doit être précédé (encore !) par la mise en place d’un cadre international pour l’évaluation globale et locale des risques, et pour la prise de décision – envisagée d’ici à une ou deux décennies.

Deux noms devraient retenir l’attention dans ce débat : George Soros et Bill Gates. Tous deux sont partisans de la SRM.

Le premier a défendu, le 16 février 2023, à l’occasion de la Conférence de Munich sur la sécurité, une proposition d’injection de gouttelettes d’eau de mer dans l’atmosphère par une flotte de 500 navires pour créer des nuages artificiels salés et ainsi ralentir le réchauffement de l’Arctique. Le second a soutenu de son argent une expérience de l’Université de Harvarden. Et n’oublions pas le très mondialiste Forum de Davos qui a également promu cette idée de bloquer la lumière du soleil pour lutter contre le « réchauffement climatique ».

On le comprend : ce sera à force de présenter l’inéluctabilité du réchauffement climatique et l’insuccès (forcément !) des tentatives pour y remédier que ce genre de folie pourrait être permise. C’est ce que suggéraient les chercheurs James Dyke, Robert Watson et Wolgang Knorr sur le site The Conversation : « A mesure que le mirage de chaque solution technique magique disparaît, une autre alternative tout aussi inapplicable apparaît pour prendre sa place. La prochaine est déjà à l’horizon – et elle est encore plus effroyable. Une fois que nous aurons pris acte de ce que le “net zéro” n’arrivera pas à temps ou même pas du tout, la géo-ingénierie […] sera probablement invoquée comme la solution pour limiter la hausse des températures. »

Bienvenue chez les fous.

 

Clémentine Jallais