Le réensauvagement des tourbières au Royaume-Uni pourrait entraîner des incendies incontrôlables

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Les plans de réensauvagement portés par le Parti travailliste au Royaume-Uni n’enchantent pas tout le monde : ils risqueraient même de provoquer une recrudescence des incendies de forêt à travers le pays. Le gouvernement propose d’interdire le brûlage hivernal, une technique traditionnelle de gestion des hautes terres qui réduit la quantité de combustible susceptible de provoquer des incendies, dans plus de la moitié des tourbières d’Angleterre.

Cela répond à la mode du « rewilding », ce réensauvagement que veulent imposer des personnes aussi riches que puissantes pour la « restauration » très étendue de zones naturelles sans intervention humaine et « autorégulée » : sans agriculture, donc, dans une démarche environnementaliste radicale. C’est la décroissance à l’extrême (et sans garantie d’enrichissement de la nature, comme le reconnaissent même certains écolos…).

 

Le réensauvagement par l’interdiction des brûlages hivernaux

Le gouvernement propose ainsi d’interdire le brûlage hivernal en vue de les « réhumidifier » et de promouvoir la biodiversité. Tout part de l’idée des écologistes de préserver ces lieux qui absorbent naturellement de grandes quantités de carbone.

Mais tant les propriétaires fonciers que les gardes-chasse affirment que, loin de protéger l’environnement, les restrictions en matière de brûlage exposeront les landes et les bruyères britanniques à des incendies « trop importants pour être combattus ». Les brûlages hivernaux créent en effet des pares-feux dans les zones montagneuses en formant des bandes où le feuillage est moins inflammable, limitant ainsi la vitesse de propagation des feux de forêt.

Des restrictions de brûlage hivernal ont déjà été mises en place en 2021 dans les zones de « tourbe profonde » de plus de 40 cm, soit une zone de 220.000 hectares. Le ministère de l’Environnement du gouvernement travailliste envisage d’étendre les restrictions aux zones où la tourbe n’a que 30 cm d’épaisseur, soit 368.000 hectares supplémentaires. L’humidité ainsi préservée servirait en elle-même de frein aux incendies, selon le gouvernement.

 

Les tourbières du Royaume-Uni contre les droits des habitants

Faux, rétorquent les garde-chasse (qui ont l’avantage de connaître le terrain) : les modifications rendraient ces zones plus « vulnérables ». Pour Richard Bailey, garde-chasse et coordinateur du Peak District Moorland Group, ces projets risquaient de transformer les zones de montagne en une « immense poudrière », ainsi qu’il l’a déclaré au Telegraph.

Même son de cloche, mais encore plus percutant, chez Andrew Gilruth, directeur général de la Moorland Association. Il dénonce : « C’est la pire année que nous ayons jamais connue en matière d’incendies de forêt. La Grande-Bretagne brûle à cause de la religion du rewilding. Il est évident pour tout le monde, sauf pour Natural England, qu’avec le changement climatique qui assèche la végétation, augmenter cette charge combustible par le réensauvagement est une idée vraiment stupide. Cela provoque des incendies plus importants et plus intenses, qui peuvent se propager à une vitesse effrayante. »

Il parle carrément d’« immense baril de poudre », de « bombe prête à exploser ». Pour lui, « les brûlages dirigés n’empêcheront pas les incendies, mais ils réduisent la durée des flammes et permettent de contenir plus rapidement les feux », souligne-t-il. L’exemple de l’Australie il y a cinq ans va dans son sens…

 

Les incendies plus dangereux sans l’intervention humaine

Pourquoi ne pas débroussailler, dira-t-on. Réponse de John Clarke, de l’Association nationale des gardes-chasse : « De nombreuses zones des terres hautes sont inaccessibles aux tracteurs et autres véhicules, ce qui rend la coupe ou le fauchage de la végétation pratiquement impossible, et le brûlage contrôlé est la seule option. »

Adrian Blackmore, directeur de la chasse à la Countryside Alliance, a quant à lui qualifié d’« ahurissants » les projets visant à restreindre les brûlages, qui éliminent la couche supérieure de bruyère sans endommager les racines ou la tourbe en dessous. « Ils font preuve d’un manque de compréhension ou de connaissances ahurissant », a-t-il déclaré. « Les brûlages réduisent la charge combustible, favorisent la croissance de jeunes pousses dont se nourrissent les oiseaux et encouragent la croissance de la mousse de sphaigne, qui est la mousse qui forme la tourbe. Donc, si vous n’enlevez pas la canopée, vous ne pouvez pas favoriser la mousse de sphaigne, car elle ne poussera pas en dessous. Or, la mousse de sphaigne est essentielle, car elle rend les landes plus humides. »

A ce jour, les zones où le brûlage hivernal a été interdit ont connu nombre d’incendies, dont les plus étendus jamais enregistrés en Ecosse qui ont ravagé cet été les Cairngorms. Les gardes-chasse écossais ont depuis lors averti qu’ils ne participeraient plus à l’extinction des incendies de landes si des restrictions sur le brûlage de la tourbe étaient introduites.

Après tout, ils risquent leurs vies…

 

Anne Dolhein