Remaniement ministériel : un gouvernement élargi pour 2017

Remaniement gouvernement élargi 2017
La presse s’interroge sur la stratégie politique de François Hollande après la formation de son nouveau gouvernement.

 
Ultime étape dans la dernière année du quinquennat – et la dernière ligne droite vers 2017 –, François Hollande vient de procéder au remaniement ministériel attendu du gouvernement Valls, élargi sur sa base politique. Un élargissement qui est bien plus une visée de rassemblement électoral – au lendemain surtout de l’annonce de Jean-Luc Mélenchon – qu’un renforcement de compétences. En clair, c’est un remaniement beaucoup plus Hollande que Valls – quoiqu’ils en disent et en diront…
 
Une équipe désormais de trente-huit membres – dix-huit ministres et vingt secrétaires d’Etat. Les ministères de l’Economie, des Finances, de la Défense et de l’Intérieur ne changent pas de gestionnaire, signe d’un souci de stabilité a expliqué François Hollande aux Français.
 

Remaniement ministériel : stabilité et supercherie

 
La stabilité, à l’heure où un nombre grandissant de Français, justement, se plaint de la politique menée, n’est pas nécessairement un atout. Mais à quatorze mois pratiquement de l’élection présidentielle il est vrai qu’il est difficile de changer tout l’équipage… « C’est un gouvernement qui doit agir, réformer, avancer », a déclaré le président de la République, justifiant, par la même logique de refus du « temps perdu », le retour de Jean-Marc Ayrault : « Il a été premier ministre et il sera un bon ministre des Affaires étrangères, il connaît les dossiers. »
 
Les media s’en donnent à cœur joie d’analyser un remaniement en se penchant sur de nouveaux arrivants sortis de nulle part, et qui doivent à la volonté de François Hollande d’afficher un mouvement d’obtenir le seul maroquin qu’ils décrocheront sans doute jamais. Et pour quelques mois seulement. Il y a fort à parier qu’on leur reproche ensuite d’avoir participer à la dernière tambouille de l’actuel président. Autant profiter donc du train qui passe pour le prendre en marche…
 

Un gouvernement élargi pour 2017

 
En réalité, le train est plus figé que jamais. La preuve en est donnée par le choix de ne pas toucher aux postes stratégiques, ou d’y recaser des vieux de la vieille. Et lorsque le président prétend ainsi ne pas perdre de temps, il donne la certitude – et peut-être même le mot d’ordre… – aux nouveaux arrivants qu’il est inutile de trop s’agiter : il n’est plus temps pour une nouvelle politique. Ils sont là simplement pour donner le change. Avis aux écologistes… D’ailleurs, la COP21 a déjà tout réglé selon les directives les plus écologiques qui soient, et tant pis si ça ne convient pas à tout le monde.
 
En tête de liste donc, Jean-Marc Ayrault, qui succède à François Fabius. Tant pis pour Ségolène, et… pour Manuel Valls qui avait eu, avec l’ancien premier ministre, quelques motifs sérieux de désaccords. Aujourd’hui, bien sûr, les rôles sont inversés, ce qui n’est pas forcément motif de raccord.
 
Ayrault est d’ailleurs, dans cette affaire, le symbole de l’immobilisme – qu’il y a deux ans ou presque François Hollande avait bien cru nécessaire, sans résultats d’ailleurs, de secouer. Sauf sur un point : Manuel Valls.
 
Car le remaniement est aussi pour Hollande une opération anti-Valls. Hollande ne peut que reprocher à son actuel premier ministre son côté querelleur – plus que batailleur – auquel il attribue en définitive son manque d’aura. S’il est certain que Valls rajoute à ce problème, c’est proprement vouloir fermer les yeux que de s’imaginer pour François Hollande que tout irait mieux sans cela…
 
Quoi qu’il en soit, Valls est le bouc émissaire de l’opération remaniement – et peut-être est-ce en espérant se dédouaner ainsi que Hollande l’a maintenu à son poste. En tout cas, il brise sa ligne. Par le retour d’Ayrault. Mais aussi par celui des écologistes que Valls avait fait fuir. Sans parler du départ de Fleur Pellerin – que le président remplace par une de ses créatures – qui isole davantage le premier ministre.
 

La fourberie de François Hollande

 
Après tout cela, il est difficile de croire – euphémisme – François Hollande lorsqu’il se défend de tout calcul. L’opération remaniement est d’autant plus calculée qu’elle est pour le chef de l’Etat une espèce de primaire avant la lettre.
 
Un exemple : les Ecologistes. En les faisant revenir au gouvernement, François Hollande brise non seulement la ligne Valls, mais il divise les Verts.
 
En faisant d’Emmanuelle Cosse un ministre, il réalise même un morceau d’anthologie. D’abord, parce qu’il l’oblige à ravaler les insultes et autres noms d’oiseaux dont elle l’a abreuvé ces dernières années (voyez les réseaux sociaux qui s’en donnent à cœur joie), et à renier sa ligne sur le refus d’appartenir au gouvernement ; ensuite, parce que, sur ce point, il fait entrer également le frère ennemi Jean-Vincent Placé (et d’ailleurs aussi Barbara Pompili) ; et enfin, parce que mise immédiatement à l’écart des instances de son parti (pour trahison) Emmanuelle Cosse divise un peu plus le mouvement écologiste.
 
A propos de Jean-Vincent Placé, lui confier la réforme de l’Etat à un an de l’élection présidentielle tient évidemment du gag – qui confirme une fois encore que tout n’est qu’enfumage, et que François Hollande conduit la dernière partie en solo.
 
On ne parle guère du renforcement des Radicaux au gouvernement dans tout cela. Mais cette arrivée se résume en deux mots : ouverture (toujours) et récompense pour la fidélité.
 

Les socialistes déconfits

 
Les socialistes, de moins en moins en phase avec le président, font grise mine. « Si ça, c’est l’équipe de campagne pour 2017, alors on peut dire “Bonjour Alain Juppé”, sans attendre. Ce sont des nobodies », lance un parlementaire PS.
 
Il n’y a pas jusqu’à l’Egalité réelle, un secrétariat d’Etat confié au député réunionnais Ericka Bareigts, qui intrigue tout un chacun.
 
C’est néanmoins l’objet d’une réflexion intéressante, car cela prouve que François Hollande rabaisse la devise inscrite sur le fronton de nos monuments publics au niveau d’une gigantesque et sinistre blague…
 

François le Luc