Les Russes ont décidé de ne pas attendre le réchauffement climatique pour inaugurer la route arctique entre la Chine et le Royaume-Uni au profit des conteneurs chinois. Le premier d’entre eux à avoir réussi son passage vers l’Europe par la Route maritime du Nord (Northern Sea Route ou NSR) a vu son périple facilité par des brise-glaces nucléaires russes qui créent des canaux à travers la glace, permettant de diviser par deux le temps du voyage entre l’Orient et l’Europe du Nord.

C’est l’opérateur russe Rosatom qui a annoncé la nouvelle, rendue possible par sa flotte de huit brise-glaces atomiques, dont quatre de dernière génération. Cela fait plusieurs années que la Russie développe le corridor de transport de la NSR entre l’Europe et l’Asie-Pacifique avec l’objectif d’en faire une route commerciale majeure, permettant d’éviter le passage des canaux de Suez ou de Panama.

Des brise-glaces russes ouvrent la route arctique à la Chine

Le voyage aura duré seulement 20 jours entre le port chinois de Ningbo et le port britannique de Felixstowe. Le cargo, qui affiche un port en lourd total de près de 25.000 tonnes, fera ensuite escale à Rotterdam et à Hambourg avant d’achever son voyage à Saint-Pétersbourg. Le même trajet par le canal de Suez prend environ 40 jours. Passer par le Cap d’Espérance le porte à une cinquantaine de jours.

Le développement de la Route maritime du Nord a été défini comme une priorité nationale stratégique par Vladimir Poutine. En 2024, les transports commerciaux marchands y ont atteint 37,9 millions de tonnes métriques, selon le ministère russe du Développement de l’Extrême-Orient et de l’Arctique. Moscou espère faire passer ce volume annuel à 200 millions de tonnes d’ici à 2030 – qu’il gèle ou qu’il fasse chaud – ce qui passera notamment par la modernisation des ports nordiques et l’expansion de sa flotte arctique.

La Chine profitera à fond de la route arctique

Tout cela n’est pas forcément une bonne nouvelle pour l’Europe, qui se verra de plus en plus facilement envahie par des produits chinois avec l’aide de la Russie. Rosatom a annoncé la nouvelle en disant que le développement de cette nouvelle route devait contribuer de façon significative à la croissance du commerce global ­– dont la Chine, faudrait-il ajouter, est largement bénéficiaire : en 2024, le déficit commercial de l’UE avec la Chine atteignait 305,8 milliards d’euros…

Quoi qu’il en soit, la date fatidique où, selon des experts du climat, la glace maritime arctique devait avoir entièrement fondu en été, est largement dépassée. Ils nous annonçaient cela pour 2016. Dans les faits, près de dix ans plus tard, il n’en est rien. En 2016, il y avait d’ailleurs davantage de glace dans l’océan Arctique qu’en 2012.

Anne Dolhein