Une fois n’est pas coutume : un quotidien américain mainstream vient de lever le voile sur la « crise » qui affecte le principal pourvoyeur d’avortements aux Etats-Unis, Planned Parenthood, donnant la parole à des patientes qui se plaignent d’avortements ratés, de dispositifs intra-utérins contraceptifs mal implantés et autres mésaventures liées notamment à la formation insuffisante du personnel. L’argent manque, aussi : de nombreuses cliniques du Planning familial américain sont au bord de la faillite. Le New York Times y conscacre un long reportage dans son numéro du 15 février dernier.
L’article s’ouvre sur le récit d’une femme qui a voulu avorter à huit semaines alors qu’elle était en train de quitter son petit ami. Plusieurs semaines après l’intervention dans une clinique à Albany, New York, elle souffrait encore de crampes et de saignements : malgré les assurances du personnel que tout c’était bien passé (traduisez : le bébé était bien mort et avait été évacué), la femme a découvert lors d’une consultation hospitalière qu’elle était toujours enceinte. Elle a accouché trois mois après l’avortement mais hélas, l’enfant est mort rapidement après sa naissance.
Le New York Times, pro-IVG, dénonce la fédération Planned Parenthood
Le New York Times – qui n’a absolument rien de pro-vie – voit dans ce cas le symptôme désolant du manque de moyens de nombreuses cliniques du Planned Parenthood, présentées comme les centres de santé de dernier recours pour les plus pauvres : « Certaines cliniques manquent tellement de liquidités que les soins en ont souffert. Beaucoup fonctionnent avec des équipements vieillissants et un personnel mal formé, car le taux de rotation a augmenté en raison des salaires très bas. Le nombre de patients est passé de 5 millions dans les années 1990 à 2,1 millions aujourd’hui, pour 900 cliniques. »
Paradoxe : après le renversement en juin 2022 de l’arrêt Roe v. Wade qui avait fait du recours à l’avortement un droit fédéral, Planned Parenthood a connu un boom de ses collectes de fonds : pas moins de 498 millions de dollars cette année-là. « Mais peu de ces fonds sont reversés aux filiales des Etats pour fournir des soins de santé dans les cliniques. Au lieu de cela, en vertu des statuts nationaux, la majorité de l’argent est dépensée dans la lutte juridique et politique pour maintenir le droit à l’avortement », écrit la journaliste du New York Times, Katie Benner. L’essentiel des ressources des cliniques vient des fonds fédéraux via Medicaid, et plusieurs Etats pro-vie – le Texas, l’Arkansas, le Missouri – en ont interdit la réception, tandis que l’administration Trump pourrait interdire le versement de fonds fédéraux destinés au planning familial aux établissements qui procurent des avortements, soit une perte prévisible de 60 millions de dollars pour Planned Parenthood.
Mais tout ne date pas de là. En 2022, un praticien du Nebraska ne s’est pas rendu compte qu’une femme était enceinte de quatre mois lorsqu’il a inséré un stérilet. Plusieurs heures plus tard, la patiente a été transportée d’urgence aux urgences et a accouché d’un fœtus mort-né.
Avortements et stérilisations ratés
Une autre jeune femme qui s’était fait poser un stérilet dans une clinique de l’Arizona a souffert de douleurs aiguës et d’hémorragies pendant des mois… mais ses appels répétés à la clinique étaient systématiquement renvoyés sur un répondeur. Un médecin consulté par la suite a confirmé que Planned Parenthood avait bâclé l’intervention. La clinique de son côté a continué de réclamer le paiement du solde de la somme due par la patiente pour l’intervention.
Plus récemment, dans la filiale des Etats du centre-nord, qui supervise cette clinique du Nebraska, un service de soins infirmiers en sous-effectif n’a pas saisi les résultats des tests de dépistage des infections sexuellement transmissibles dans les dossiers, et les patientes ont cru à tort que leurs résultats étaient négatifs car elles n’en avaient pas eu de nouvelles.
A Omaha, l’année dernière, les eaux usées d’une toilette bouchée ont suinté dans la salle de réveil de l’avortement pendant deux jours, selon des entretiens avec des membres du personnel et des photographies et des SMS partagés avec le Times. Les employés ont glissé des protections de table d’examen sous la porte des toilettes pour colmater la fuite. Les patientes ont vomi à cause de la puanteur.
Plus généralement, de nombreuses cliniques manquent de médicaments tels des analgésiques en vente libre ou de solutions salines pour piqûres intraveineuses ; des employés chargés de faire des prises de sang se plaignent de n’avoir pas reçu de formation à cette fin.
Planned Parenthood se cache derrière sa « mission »
Le New York Times signale que « les dirigeants de Planned Parenthood ont refusé de discuter des plaintes individuelles des patients, invoquant des préoccupations en matière de confidentialité et des poursuites en cours » – et les patientes ont peur de parler : « Planned Parenthood exige régulièrement que les patients qui reçoivent des indemnités signent des accords de non-divulgation. » L’enquête du journal n’a pu se faire que grâce aux anciens employés, licenciés ou qui ont démissionné.
Aujourd’hui, les fonds de la fédération qui compte 49 filiales dans les Etats sont en baisse, notamment dans des Etats où l’opposition à l’avortement va croissant. Des cliniques ferment, d’autres mettent en place des restrictions : « L’année dernière, Planned Parenthood of Greater New York, l’un des rares endroits où l’avortement est encore légal jusqu’à 24 semaines, a déclaré qu’un déficit budgétaire l’obligerait à restreindre les services d’avortement tardifs, mettant ainsi en œuvre une interdiction de l’avortement à 20 semaines. Elle a fermé quatre cliniques », écrit Katie Benner.
Sans surprise, la structure fédérale de Planned Parenthood minimise les problèmes et les critiques : « “Il y a toujours des anecdotes que l’on peut obtenir de la part de membres du personnel mécontents, un stérilet mal posé”, a déclaré Joe Solmonese, président du Planned Parenthood Action Fund, la branche de défense politique qui a dépensé 40 millions de dollars pour faire élire des candidats pro-droit à l’avortement l’année dernière », note l’article. L’idée ? Il n’y a pas plus de ratages dans les cliniques du Planning qu’ailleurs. Les ex-employés répliquent en évoquant les « longues attentes », la pléthore de « personnel insuffisamment formé », la pression pour augmenter le nombre de patientes vues pour faire augmenter les revenus, avec des temps de consultation réduits à moins de 10 minutes.
Le New York Times évoque des IVG sur des fillettes violées
On apprend aussi au cours de l’article que des anciens employés « racontent avoir vu des filles de 12 et 13 ans se faire avorter, parfois parce qu’un membre de leur famille les avait mises enceintes. » Des crimes dont les responsables ne seront jamais poursuivis, grâce notamment au Planning…
Aujourd’hui Planned Parenthood se tourne de plus en plus vers de riches donateurs – telle MacKenzie Scott, la « philanthrope » milliardaire, qui a fait don de 275 millions de dollars à répartir entre le bureau national de Planned Parenthood et ses 21 filiales. On se souvient aussi des accusations lancées par David Daleiden contre la fédération au sujet de la « récolte » d’organes et de tissus sur des fœtus avortés en vue de leur revente… Le journaliste a obtenu il y a quelques semaines de ne se voir infliger aucune sanction en acceptant de ne pas contester une accusation de délit à la suite de ses enregistrements clandestins au sujet de ce trafic.
Des millions de dollars pour que des enfants à naître soient éliminés plus proprement et pour stériliser plus efficacement les femmes… Mais même cela ne suffit pas : quand on fait le travail du diable, il n’y a pas de raison pour que cela se passe « bien ».