Les voitures électriques à la remorque de l’écologie : une catastrophe économique ?

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On nous avait annoncé une révolution : ce n’est pas vraiment ce qui semble se profiler. Même si Tesla vient de vendre, en France, sa 100.000ème voiture, les grands constructeurs investissent laborieusement et peinent à convaincre leur public, que le thermique rassure encore davantage. Les écueils sont pluriels, les contraintes pas toujours suffisamment annoncées, et les surprises de taille. Forcer la réalité sous couvert d’idéologie ne donne généralement rien de bon. Quand on pense à l’imposition du tout électrique pour les ventes de voitures à l’horizon 2035, on se prend à se pincer le bras. Le « zéro émission nette » est vraiment une obsession aveuglante.

 

Une catastrophe commerciale, économique et sociale en devenir ?

Comme le titrait un article du Telegraph, la révolution de la voiture électrique piétine. Et les grands constructeurs automobiles mondiaux pataugent dans cette course à laquelle ils ne voulaient pas vraiment participer. Mais les politiciens en avaient décidé autrement et ont eu vite fait de les faire céder, menaces à la clé : le moteur à combustion devait progressivement disparaître, à eux de s’aligner, au mépris de toutes les conséquences.

Ils ont dépensé des sommes astronomiques pour faire passer à l’électrique le maximum de modèles, des voitures de ville aux berlines familiales, en passant par les SUV. Et en laissant de côté leurs références gagnantes. Même Ferrari a adopté le mouvement : la firme de Maranello a annoncé pour 2025 l’arrivée d’une voiture de sport zéro émission. Le problème majeur ? L’absence de ronron du moteur thermique… si l’on en croit un récent brevet déposé, Ferrari à l’intention d’intégrer à ses véhicules de quoi reproduire les sons du moteur – chacun ses tracas.

Mais l’ennui majeur vient du public : la demande faiblit gravement. Et il est affolant de voir, comme le notait le journaliste du Telegraph, « une industrie entière non seulement forcée d’abandonner un produit que la grande majorité des gens veulent et utilisent encore, mais aussi intimidée jusqu’à avoir canalisé toutes ses ressources pour fabriquer à un niveau colossal des produits pour lesquels il n’y a tout simplement pas de marché – du moins pas dans le délai horriblement court qui est imposé aux constructeurs automobiles ».

 

Un auto-sabotage industriel, « une forte réticence des clients »

Volkswagen est tellement préoccupé par la baisse des ventes qu’il a pris la décision extraordinaire d’arrêter la production de véhicules électriques dans l’une de ses plus grandes usines. Les chaînes de montage de modèles électriques seront interrompues pendant six semaines à l’usine d’Emden, dans le nord-ouest de l’Allemagne, et 300 de ses 1.500 employés seront licenciés, les ventes étant inférieures de 30 % aux prévisions.

Cela signifie que la production du nouveau modèle électrique VW ID.7, qui devait commencer en juillet, sera repoussée à la fin de l’année. Le SUV électrique ID.4 et la prochaine berline électrique ID.7 seront également retardés. « Nous rencontrons une forte réticence des clients dans le secteur des véhicules électriques », a déclaré le directeur de l’usine. Ce genre de phrase prononcée par, juste, le plus grand constructeur de la planète, est à prendre en considération. Volkswagen qui, pourtant, a annoncé son intention d’investir 120 milliards d’euros au cours des cinq prochaines années dans « l’électrification et la numérisation ».

Alors, il est aisé d’imaginer les difficultés pour les générations naissantes de constructeurs : la start-up prometteuse des camions électriques propulsée en son temps par Donald Trump, Lordstown Motors, a annoncé, mardi, qu’elle préparait sa liquidation.

Quant au soutien de l’emploi, c’est plutôt le désert de Nubie. Le passage à l’électrique a donné lieu, chez Ford, à des milliers de pertes d’emplois en Europe. En novembre 2022, le PDG, Jim Farley, avait estimé que les voitures électriques requéraient, de fait, 40 % de main-d’œuvre en moins (c’était la première fois qu’un constructeur quantifiait la simplification de fabrication du tout électrique).

 

De légers doutes sur les qualités environnementales des voitures électriques

A côté de cet état de fait, les voitures électriques affichent un nombre de problèmes croissant qui remettent en question leur rapport avec l’idéologie qui a présidé à leur naissance : l’écologie. Nombre d’entre elles, en particulier, selon la plateforme d’enchères Copart, partent à la casse après que leurs batteries ont subi des dommages mineurs – simplement causés, parfois, par le fait de monter un trottoir. Or les batteries sont la partie la plus chère d’une voiture électrique, représentant environ 50 % de sa valeur, et il n’y a « que quelques techniciens qualifiés au Royaume-Uni capables de retirer une batterie, et encore moins qui sont capables de la réparer », a déclaré le responsable de l’ingénierie chez l’assureur automobile LV.

Une source de haut niveau dans le secteur de l’assurance disait que les constructeurs automobiles ne partageaient pas les données de diagnostic parce qu’ils se méfiaient des réparations bâclées par des tiers. En conséquence, les compagnies d’assurance hésitent à tenter des réparations et à assumer la responsabilité en cas de problème.

Et puis, « avec la fluctuation des prix, il y a des véhicules où une batterie de remplacement est supérieure au prix de détail recommandé du véhicule » disait le responsable de l’ingénierie chez Thatcham Research… Les problèmes de chaîne d’approvisionnement avec les composants et les pièces signifient également qu’en cas de panne, les conducteurs pourraient être obligés d’attendre jusqu’à un avant d’obtenir un véhicule de remplacement. La solution la plus rentable pour les assureurs est donc de mettre toute la voiture à la casse !

 

Ecologie : le recyclage des batteries ? « Il n’y a pas de stratégie »

Commencent à se poser les questions sur l’impact environnemental… D’autant plus que les usines de récupération n’ont « aucun moyen de se débarrasser » des batteries endommagées, rajoutait Chris Payne. La plus grande usine européenne de traitement et de recyclage des batteries de voitures électriques a des capacités pour l’instant assez limitées. Selon une récente étude, à la fin de la décennie, ce seront pourtant 100 millions de véhicules à batterie (hybrides rechargeables, hybrides et électriques) qui devront être traitées par la filière de recyclage. Un enjeu majeur, qui n’attire pas encore vraiment les investissements. Et pour cause : c’est encore moins cher, pour le moment, d’extraire les matériaux nécessaires (archi polluants).

Et puis l’Etat se saigne, lui aussi pour faire passer l’idéologie à la réalité, amener ses citoyens à adopter le geste dit écolo : la transition vers la voiture électrique lui coûte de plus en plus cher. En France, Bercy baissera-t-il les bonus qui s’additionnent incroyablement à chaque achat d’un véhicule non thermique ? Si entre 2013 et 2020, le bonus lié à l’achat ne représentait « que » 1,7 milliard d’argent public, cette somme risque mécaniquement de grimper, doublée par le manque à gagner induit par l’absence de taxe sur le carburant, la fameuse TICPE qui s’ajoute à la TVA. Une étude a même évalué la perte à venir : elle représenterait, d’ici 2030, entre 8 et 17 milliards d’euros. Sans parler du transfert de technologie vers la Chine.

Affaire à suivre.

 

Clémentine Jallais