Zofija Kaczan, cette Polonaise centenaire qui a pardonné à son meurtrier sur son lit de mort

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Ses amis et le prêtre qui l’ont accompagnée pendant ses derniers instants en attestent : Zofija Kaczan, frappée à mort dans une rue cossue de Derby par un voyou barbare qui en voulait à son sac à main, a prié sur son lit de mort pour le salut de l’âme de son meurtrier. Histoire émouvante que celle de cette vieille dame centenaire qui a été agressée alors qu’elle se rendait, le matin du 28 mai – comme elle le faisait tous les jours – à l’église polonaise de Saint-Maximilien-Kolbe de Derby, ville d’Angleterre moins tranquille qu’il n’y paraît. Zofija Kaczan a pardonné. Elle qui avait déjà tant souffert au cours de sa longue vie est restée jusqu’au bout fidèle à sa foi. Son histoire a bouleversé les médias britanniques : cette façon de rendre le bien pour le mal est toujours capable de toucher les âmes.
 
Pour les proches de Zofija, 100 ans, cet ultime acte de charité lui était tout simplement naturel. L’énergie qu’elle a trouvée alors qu’elle agonisait au Royal Derby Hospital pour prier pour l’homme qui l’avait mortellement frappée en lui brisant le cou, était à l’évidence le fruit d’une profonde capacité à accepter la vie que Dieu donne, et le mal qu’Il permet pour un plus grand bien.
 

Zofija Kaczan, agressée le 28 mai, est morte en ayant pardonné à son meurtrier

 
Née en Pologne, Zofija Kaczan a d’abord connu l’occupation nazie qui a vu son jeune frère exécuté par les Allemands dans la rue, alors qu’il n’avait pas encore 13 ans. Elle-même arrêtée, elle fut envoyée dans un camp de travail obligatoire en Pologne, logeant dans des baraquements dans un camp de concentration – il s’agirait de Dachau. Après la guerre – la Pologne était désormais sous le joug communiste – elle d’enfuyait avec son fiancé Mikolaj vers l’Angleterre, où elle devait passer le reste de sa vie sans jamais revoir ses parents. Accueillis dans un camp de réfugiés à West-on-Trent en 1948, le couple s’est marié en 1953 mais n’a jamais eu d’enfant.
 
Il y a dix ans, Zofija perdait son mari qui avait travaillé toute sa vie chez Rolls Royce et dont elle avait toujours été « inséparable ». Une voisine, amie proche, allait la voir tous les jours depuis son veuvage, l’aidant dans la vie quotidienne : Angelika Cybulska, qui est restée auprès de Zofija à l’hôpital jusqu’à son dernier souffle, raconte que la défunte avait été profondément traumatisée par la guerre et en parlait rarement. A 100 ans – anniversaire fêté en grande pompe à la paroisse au début du mois de mai – Zofija était en bonne santé et avait de nombreux projets, notamment celui de partir en vacances avec Angelika et sa famille sur la côte anglaise.
 

Profondément catholique, la centenaire polonaise a prié pour le salut de l’âme de son agresseur sur son lit de mort

 
Elle rendait toujours service à sa voisine Stacia Fitzimmons, 55 ans, employée des hôpitaux, faisant ses courses à la pharmacie pendant que celle-ci préparait les repas et lavait le linge de la vieille dame : « Elle était comme une mère pour moi », témoigne l’Anglaise qui bavardait avec sa voisine tous les jours que Dieu fait.
 
C’est cette femme « remarquable » de l’avis de ceux qui la connaissent qui a été victime d’une agression particulièrement lâche, au cours de laquelle elle a été frappée par derrière et laissée à terre, le cou brisé, le visage ensanglanté par un criminel de 39 ans qui a semble-t-il trouvé un millier de livres dans son pauvre sac en cuir d’imitation : Mme Kaczan n’aimait pas laisser son argent à la maison… L’homme, d’abord interpellé à propos du vol, et remis en liberté, a été arrêté et inculpé d’assassinat jeudi.
 
Les amis de Sofija avouent avoir du mal à suivre son exemple en priant pour l’assassin. Anna Krepa, 83 ans, a tempêté au contraire contre les « peines trop douces en Angleterre – c’est pour cela que des gens commettent autant de crimes ». Et d’ajouter : « Cela me brise le cœur. Si cet homme a commis un meurtre, il devrait être pendu. »
 
Mais en réalité il n’y a pas de contradiction entre l’exigence chrétienne du pardon individuel et celle d’une peine prononcée par la justice au nom du bien commun et de la juste rétribution des crimes à mesure de leur gravité. Ce sont deux ordres différents, cohérents avec une même charité.
 

Jeanne Smits