Le système éducatif de la Chine travaille au renforcement de l’identité masculine

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Un enseignant de sixième année dans une école primaire à Fuzhou, en Chine.

 
Les responsables du système éducatif chinois s’inquiètent de plus en plus du peu de représentants masculins dans les rangs des professeurs, ce qui a contribué à l’émergence d’une génération de garçons « timides, égocentriques et efféminés ». C’est la raison pour laquelle ils ont décidé de mener une campagne de recrutement agressive en direction des professeurs hommes afin de renforcer la répartition traditionnelle des rôles et des valeurs entre les sexes, alors que les médias chinois se font écho d’un besoin urgent de venir à la rescousse de l’identité masculine. Cette prise de position reflète également un sentiment d’inquiétude généralisé quant aux petits garçons chinois dont les résultats scolaires sont inférieurs à ceux des jeunes filles. Le référent homme dans le système éducatif est vu comme un espoir pour les parents qui s’inquiètent de l’avenir de leur progéniture mâle dans une conjoncture incertaine. Pour ces derniers, les professeurs masculins donnent des leçons d’affirmation de soi, de courage et de sacrifice.
 

L’identité masculine à l’honneur en Chine

 
Un peu partout en Chine, des initiatives visant à affirmer la masculinité des jeunes garçons voient le jour. A Zhengzhou, les écoles font signer une promesse aux garçons afin qu’ils se comportent « comme de vrais hommes ». A Shanghai, les directeurs d’établissement expérimentent des classes non mixtes avec arts martiaux, réparation informatique et cours de physique au programme. A Hangzhou, les éducateurs ont créé un camp, le « West Point Boys ». Son mot d’ordre ? « Nous révélons l’homme qui sommeille en chaque garçon. » Pour Lin Wei, jeune professeur de 27 ans en classe de 6e, « les hommes ont des devoirs spéciaux » : « Ils doivent être courageux, protéger les femmes et assumer leur responsabilité en cas de méfaits. »
 
La Chine compte quelque 15 millions de professeurs pour 270 millions d’enfants inscrits à l’école, depuis la maternelle jusqu’à la fin du secondaire. Le déséquilibre de la représentation des professeurs hommes-femmes est particulièrement marqué en Chine – encore plus qu’ailleurs dans le monde – avec 4 postes sur 5 occupés par des femmes, selon une étude de l’Université normale de Pékin parue en 2012. C’est ainsi que les responsables du système éducatif chinois des régions du Fujian, du Guangxi et du Jiangsu ont récemment mis en place des incitations financières pour attirer des professeurs hommes, au motif qu’ils insufflent un style d’enseignement plus tonique qui plaît aux jeunes garçons. Comme partout ailleurs dans le monde, les salaires modestes des professeurs n’attirent pas les hommes vers ce type de carrière. En 2013, le salaire annuel moyen d’un professeur du secteur public chinois avoisinait les 17.000 dollars, selon les chiffres du gouvernement.
 

Le système éducatif chinois vise le renforcement du caractère de garçons

 
Sur le million de professeurs de maternelle, 6 %, soit 60.000, sont des hommes. Le système éducatif chinois met en place des cursus gratuits pour les hommes se destinant au professorat. Ainsi, l’Université normale de Fujian a-t-elle accueilli sa première classe de formation entièrement masculine. Malgré leur volonté de devenir professeurs, certains font part de leur inquiétude quant à leur perception dans les écoles ou bien du désarroi de leur entourage lorsqu’ils annoncent leur choix de carrière, certains étant traités d’efféminés, voire d’homosexuels. Ils doivent par ailleurs faire face au mécontentement des jeunes étudiantes qui se demandent pourquoi elles ne pourraient pas bénéficier des mêmes avantages en termes de gratuité de formation pour des filières traditionnellement suivies par les jeunes hommes. Elles mettent également en avant l’importance d’une approche plus féminine dans les « petites classes ».
 
S’il est incertain que les enfants obtiennent de meilleurs résultats en ayant un professeur correspondant à leur sexe, l’expérience de la non-mixité a néanmoins des effets positifs chez les petits garçons chinois qui s’expriment plus volontiers en classe. En rappelant les efforts physiques des hommes qui ont construit la Grande Muraille ou l’héroïsme des soldats de la montagne Langya face aux Japonais, Lin Wei veut former de futurs hommes courageux et tout à la fois respectueux des femmes.
 
Reste que cela se fait de manière centralisée, comme tout projet communiste, et donc de manière idéologique. L’expérience occidentale montre que le besoin d’éducation différenciée est surtout important à l’âge du collège.
 

Nicklas Pélès de Saint Phalle