“Euthanasie involontaire” : des médecins belges tuent leurs patients sans qu’ils l’aient explicitement demandé

“Euthanasie involontaire” : des médecins belges tuent leurs patients sans qu’ils l’aient explicitement demandé
 
Aux termes d’une étude réalisée par un universitaire britannique, le Pr Raphael Cohen-Almagor, professeur de politique et d’études internationales de l’université de Hull au Royaume-Uni, à peu près autant de personnes meurent du fait d’un acte délibéré de la part de leur médecin sans l’avoir explicitement demandé – par « euthanasie involontaire » – qu’à leur propre demande, par l’euthanasie légale. Il a comparé les chiffres depuis 1996 et constaté qu’un nombre important de patients belges sont tués chaque année par administration de médicaments ayant pour finalité la survenue plus rapide du décès, même si la proportion de ces morts a décru.
 
En 1998, la proportion de décès résultant d’une « euthanasie involontaire » (une vraie euthanasie non demandée par le patient) était de 3,2 % du total, contre 1,7 % en 2013. Entre-temps, l’euthanasie a été légalisée et sa fréquence et son champ d’application ne cessent de progresser. En 2002 en Flandres, juste avant la légalisation de l’euthanasie, plus de 5 % des morts étaient, aux dires des médecins, consécutives à l’administration de substances hâtant la mort sans que les patients aient seulement été interrogés sur leur volonté.
 

L’euthanasie involontaire n’a pas baissé avec la légalisation de l’euthanasie : la volonté du patient est un leurre

 
Au fil des ans, et sans doute à la faveur des avancées de l’euthanasie légale, il semblerait donc que la volonté des patients soit mieux respectée (sans que cela ne justifie, cela va de soi, le geste euthanasique qui n’est pas plus moral parce que le patient le réclame).
 
Mais le rapport du Pr Raphael Cohen-Almagor souligne que cette baisse apparente du nombre d’euthanasies involontaires, qui demeure important en outre alors même que l’euthanasie est légale, s’explique peut-être par des causes elles-mêmes inquiétantes. La première, c’est le recours sans doute fréquent à la « sédation palliative » : dans ce cadre, les substance administrées ne sont pas létales mais lorsqu’elle va de pair avec l’arrêt de la nourriture et de l’hydratation, elle peut avoir pour effet de provoquer la mort et dans ce cadre, aucun consentement ni encore moins demande du patient n’est requis. Le rapport observe aussi que « les médecins peuvent ne pas toujours être bien au fait de la nomenclature de toutes les pratiques médicales en fin de vie ».
 
Autrement dit, le rapport suggère qu’ils posent des actes qui ont pour objectif d’abréger la vie – des actes qui tuent, pour parler plus clairement – sans se rendre compte qu’ils pratiquent des formes d’euthanasie. Il est vrai que la définition de l’euthanasie est de plus en plus compliquée par les pratiques de zone grise qui permettent d’abréger des souffrances sans avouer que ces pratiques sont bien souvent des euthanasies déguisées.
 

Les médecins belges tuent les vieux, les comateux, les déments sans qu’ils l’aient explicitement demandé

 
En Belgique, ce sont surtout les personnes âgées de 80 ans et plus qui sont concernées aujourd’hui par ces « euthanasies involontaires » (52 % des cas), et plus des deux tiers ont une maladie autre que le cancer. Dans 77,9 % des cas le geste n’a même pas été évoqué avec le patient et dans 70,1 % des cas c’est parce que le patient était dans le coma, ou – de plus en plus fréquemment – dément (22,1 % des cas en 2007).
 
L’euthanasie allait enfin permettre le véritable respect de l’autonomie du patient et assurer qu’il n’y ait plus de mise à mort contre son gré, disaient au début des années 2000 les partisans de l’euthanasie qui ont obtenu sa légalisation en Belgique au début de ce drôle de siècle.
 
Mais en fait c’est le respect de la vie du patient qui s’étiole, et il paraît de plus en plus normal d’abréger sa vie, avec ou sans son consentement. Comme le dit le rapport, le fait de « mettre fin à la vie des patients sans qu’ils le demandent se produit plus souvent en Belgique que dans tous les autres pays qui tiennent les comptes de ces pratiques, y compris les Pays-Bas. Cohen-Almagor juge cela « inquiétant ».
 
En même temps que l’administration délibérée de médicaments pour raccourcir la vie continue d’exister en Belgique, les recommandations de la Société belge de réanimation ont été modifiées en 2014 pour placer la charge de la responsabilité des décisions de « fin de vie » sur les seules épaules du médecin, observe encore le rapport, sur un ton critique. Le réanimateur est censé rechercher un « consensus » en s’adressant aux proches de son patient, mais c’est lui qui prend la décision définitive avec le concours de son équipe qui doit déterminer que le patient n’a aucune perspective de rétablissement « significatif » ou « utile ». Sans que l’on sache précisément ce que cela… signifie, sinon une prise en compte de la notion des soins « futiles » qui ne seraient pas dus.
 
Le rapport observe enfin que l’acceptation de principe de l’euthanasie parmi les soignants belges est passée de 78 % en 2002 à « plus de 90 % en 2009 » : « La pression sociale et celle des pairs rend difficile à ceux qui sont opposés à l’euthanasie d’exprimer leur position au sein de la culture libérale qui s’est développée. » C’est l’un des nombreux dégâts collatéraux de la légalité de l’euthanasie, accompagnée d’une implacable pression médiatique.
 

Anne Dolhein