Canada : en maison de retraite, l’euthanasie est la première chose dont on vous parle

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Double peine. Une Canadienne raconte comment son père, rentré la veille dans une maison de retraite, s’est vu proposer d’emblée une Aide Médicale à Mourir (AMM), autrement dit une euthanasie. Une autre patiente qui allait subir une opération pour son cancer se voit proposer la même chose, dans le couloir, juste avant de monter sur la table…

Ces mésaventures risquent bientôt d’être celles de toutes les personnes en état de faiblesse médicale et également sociale. Car les lois sont tellement permissives au Canada que la suggestion est devenue systématique. L’euthanasie est en train d’y devenir une véritable alternative, une « solution finale » dont s’accommode fort bien un système de santé défaillant où il est plus rapide d’obtenir un rendez-vous pour une AMM qu’une consultation en soins palliatifs. Même parmi les médecins complaisants, certains commencent à dire que l’AMM risque de nuire à l’aide sociale et au soutien moral. Et si c’était le but ? L’ombre s’assombrit sur le caractère sacré de la vie.

 

La maison de retraite : passage court vers la mort

C’est une récente publication de l’archidiocèse de Regina, au Canada, qui rapporte l’histoire de Linda Maddaford, qui est aussi responsable de la Ligue locale des femmes catholiques. Peu de temps après le décès de sa mère, elle fait emménager son père dans un centre de soins pour personnes âgées. Le lendemain de son arrivée, un courriel les invite « à venir assister à une présentation dans la salle à manger » de l’AMM, sans faire aucunement le tri entre les familles qui pourraient (malheureusement) manifester un intérêt et celles qui n’y voient qu’une tragédie faisant horreur à leur opinion ou à leur foi : tous étaient conviés, comme si cette proposition devait être entendue de tous.

The Telegraph rapportait aussi, il y a quelques jours, le cas de cette Canadienne qui s’est vue proposer l’euthanasie par des médecins alors qu’elle s’apprêtait à entrer dans la salle d’opération pour subir une mastectomie (en vue de soigner son cancer). La jeune grand-mère de 51 ans, frigorifiée dans sa blouse chirurgicale, dans un moment de vulnérabilité bien connu de certains d’entre nous, s’entend poser la question : « Connaissez-vous l’aide médicale à mourir ? »

On la lui proposera à nouveau avant de subir sa deuxième mastectomie, neuf mois plus tard et enfin une troisième fois alors qu’elle récupère dans la salle de réveil après cette intervention… « Je me sentais comme un problème dont il fallait se débarrasser plutôt que comme une patiente ayant besoin d’un traitement. »

 

Un Canada eugéniste

Scandaleux ? Mais qui pourrait s’offusquer, à présent, dans ce Canada qui prête le flanc à une révision absolue de la valeur de la vie et du sens de la mort. Autrefois, c’était sur les tableaux d’art que l’on campait la grande Faucheuse… Aujourd’hui, elle est bien vivante, parfois même charmante, mais son message est encore plus noir, car elle vous offre de porter vous-même sa faux, en vous assurant que vous en sortirez plus digne et plus généreux, vous soulageant vous-même et votre famille.

C’est donc en toute logique que cette proposition mortelle est faite à n’importe quelle personne se trouvant en état de dépendance, que celui-ci soit arrivé de manière brusque ou progressive. C’est l’évolution logique et progressive de l’euthanasie qui n’est qu’un eugénisme caché. Et le Canada est l’exemple-type de cette évolution qui est malheureusement l’horizon promis à tous les pays occidentaux qui cèdent au lobby de la culture de mort.

L’euthanasie y a été légalisée en 2016 pour les personnes en phase terminale, avant d’être élargie en 2021 pour permettre aux personnes atteintes de maladies seulement incurables, y compris le handicap seul, de trouver un moyen de mourir (il suffit que la demande écrite soit approuvée par deux médecins ou infirmières praticiennes indépendants) : c’est ce qu’on a appelé la voie 2 de la loi canadienne sur l’AMM. Et, depuis, le gouvernement et les lobbies ne cessent d’ouvrir de nouvelles brèches.

Rappelons qu’en février, la fronde organisée de nombreux groupes pro-vie et médicaux a retardé l’extension de l’euthanasie aux personnes souffrant de maladie mentale jusqu’en 2027. Mais les mots du ministre de la Santé ont été éloquents : « Le système n’est pas prêt à l’heure actuelle, il faut plus de temps. » Reculer pour mieux sauter. Au Québec, où le taux de suicide assisté est le plus élevé au monde (7,3 % de tous les décès), des plans visant à introduire des demandes anticipées de suicide assisté vont être proposés à partir du 30 octobre.

 

Chaque année, les chiffres de l’euthanasie augmentent

Comme le notait LifeSiteNews, près de 60.000 Canadiens ont déjà été tués depuis 2016 par injection létale dans le cadre de l’AMM dont 16.000 pour la seule année 2023 ; c’est devenu la sixième cause de mortalité du pays. Et il est à craindre que ces chiffres ne soient encore plus élevés en raison de la manipulation des statistiques officielles.

Chaque année est marquée par une croissance constante, qui varie entre 17 et 31 %. Et la part de ceux qui obtiennent une AMM de voie 2, c’est-à-dire en raison de maladies seulement chroniques, augmente peu à peu.

Ce qui n’est pas sans engendrer une certaine confusion parmi le personnel de santé. Même des médecins qui se sont pas fondamentalement opposés à l’AMM finissent par en revenir, comme le Dr. Sonu Gaind qui dirigeait pourtant le comité de l’AMM dans un hôpital de Toronto : « En fin de compte, nous donnons la mort à des personnes qui ne sont pas en train de mourir », a-t-il déclaré, nous dit The Guardian.

Pour lui, « cette volonté de fournir des morts faciles, de “guérir” la souffrance en mettant fin à la vie » a découragé les investissements indispensables dans le système de santé en difficulté et a remodelé la façon dont la société envisage le soulagement de la souffrance. Nous dirions même plus : l’euthanasie ainsi poussée permet de ne pas réaliser ces « investissements » et modèle surtout, sciemment, la perception de la mort devenue disparition-soulagement, dans le matérialisme le plus athée.

 

Une confusion de plus en plus grande parmi les médecins

Et, bien entendu, ce sont les plus vulnérables qui trinquent, et Pauline Mille l’a déjà évoqué. Certaines données non officielles commencent à sortir sur les demandes d’AMM des personnes qui ne sont pas sur le point de mourir : elles proviennent tout particulièrement des régions les plus pauvres et les plus défavorisées. C’est le constat des échanges entre médecins et infirmières canadiens sur certains forums privés, comme l’indique un article éclairant de The Associated Press paru le 16 octobre : « Le discours sur les patients pauvres, handicapés ou solitaires montre un processus difficile où les professionnels de la santé testent les limites des conditions qui justifient l’euthanasie. »

L’article donne des exemples : « Un sans-abri refusant des soins de longue durée, une femme souffrant d’obésité sévère, un travailleur blessé recevant une aide gouvernementale maigre et de nouvelles veuves en deuil… » La logique du système veut que les personnes marginalisées seront peu à peu les plus touchées, parce qu’incapables de se défendre.

Dans un sondage qui a été réalisé auprès de 13.102 Canadiens sur le point de subir une AMM, plus d’un tiers des répondants ont déclaré que leur décision était en partie motivée par le sentiment d’être un fardeau pour leur famille, leurs amis ou leurs soignants. Mais comment s’étonner de ce qu’ils le croient, à force de l’avoir entendu… Cette négation de la vie, cet écrasement de l’Espérance est véritablement diabolique et cela fonctionne de mieux en mieux car les personnes sont plus en plus seules et de moins en moins croyantes.

« L’AMM au Canada est-elle un modèle ou un avertissement ? », se demandait The Times ce 16 octobre, à l’heure où le suicide assisté arrive devant le Parlement britannique… Un avertissement – et un lourd.

 

Clémentine Jallais