Anne Genetet, ministre de l’Education nationale du gouvernement Barnier, vient de confirmer le plan « choc des savoirs » de son prédécesseur Gabriel Attal, mais en adaptant « la vitesse » de sa mise en application. Un petit ralentissement qui ne changera – sauf miracle – rien du tout. « L’acte II » de cette énième réforme d’une école qui peine tant à transmettre (d’ailleurs c’est « mal » de transmettre, enseigne-t-on lors des formations d’enseignants, il s’agit de rendre les enfants acteurs de leurs apprentissages) n’est qu’un ajustement où l’on retardera quelque peu le passage obligatoire du brevet des collèges pour entrer au lycée ; il y aura une épreuve de mathématiques en 1e en vue du bac 2027 ; et des groupes de « besoins », mais à la voilure réduite, au collège, pour les mathématiques et le français. Rien qui puisse changer les réalités de « l’école des illusionnistes », pour reprendre le titre du livre éponyme d’Elisabeth Nuyts.
Illusionnistes, nos ministres successifs de l’Education nationale ; travail d’illusionnistes, les programmes, les promesses, les résultats des examens, les « compétences » de nombreux jeunes qui sortent de 15 ans d’école sans savoir lire en comprenant ce qu’ils lisent et dont les lacunes abyssales justifient que l’on prétende avec une régularité de métronome « refonder l’école ». Ou mettre en place, comme Attal et Genetet, un « choc des savoirs ». Cette école des illusionnistes, a montré Mme Nuyts dans son ouvrage, crée aussi l’illusion de la réussite et de l’efficacité, trop souvent démentie dans l’enseignement supérieur où les jeunes « universitaires » révèlent leurs manques en culture générale, orthographe, grammaire et autres connaissances indispensables aux études poussées.
Le choc des savoirs de Genetet : une illusion
L’illusion consiste précisément à tout maintenir en l’état, à refuser de voir que la pédagogie des savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter) est défectueuse à la racine dans de nombreuses écoles où des instituteurs appliquent – sans mauvaise foi, assurément – des méthodes destructrices, et ce dans les classes de maternelle devenues obligatoires comme au primaire. Réparer les dégâts ne suffit pas : au pays des programmes obligatoires, des manuels « labellisés » (mesure entérinée par Anne Genetet) et des méthodes d’apprentissages dictés par eux, les remèdes proposés ne changeront rien au fond.
Les syndicats enseignants, très majoritairement à gauche, se plaignent d’ores et déjà de cette nouvelle réforme et demandent, comme d’habitude, plus de moyens et plus de recrutements.
En attendant, les enfants qui apprennent à lire dans les écoles primaires au moyen de méthodes dites naturelles, semi-globales, ou « syllabiques » mais non alphabétiques, et que l’on incite à lire silencieusement et rapidement dès les débuts de l’apprentissage, qui subissent de semblables déformations dans l’enseignement de l’écriture, de la grammaire, et de l’arithmétique hors-sol, continuent d’être abîmés. Dyslexiques, dyscalculiques et autres « dys » n’étant que la pointe de l’iceberg : trop d’enfants apparemment sans problèmes ont des difficultés de mémoire, de concentration et de compréhension, ayant subi des méthodes qui ne favorisent pas la lecture consciente.
C’est l’école des illusionnistes qu’il faut enterrer !
Peut-on réparer les dégâts ? Certainement pas en créant des « groupes de niveau » ou de « besoins » comme le dit Mme Genetet pendant une heure par semaine en 6e et 5e où l’on continue d’appliquer les méthodes qui tuent. Mais cela est possible, Elisabeth Nuyts l’a montré, en reprenant les enseignements fondamentaux avec des pédagogies éprouvées.
Ce n’est pas pour rien que les écoles hors contrat, où l’on s’affranchit des pédagogies destructrices, rencontrent un succès croissant, sans oublier le travail des enseignants courageux des écoles privées ou publiques qui osent encore offrir une véritable formation à leurs élèves ; ceux-ci ont alors la chance de ne pas venir grossir les rangs de ceux qui arrivent au baccalauréat sans savoir vraiment lire…
Aucun ministre de l’Education de ces dernières décennies n’a jamais voulu attaquer le fléau à la racine (hormis, peut-être, Gilles de Robien dont la réforme fut phagocytée par les idéologues de l’Education nationale). C’est le ministère de l’Education qu’il faudrait considérer comme un « groupe de besoin » : besoin d’être démantelé, comme veut le faire Donald Trump en mettant fin au pouvoir idéologique de l’éducation étatisée aux USA ?