Les vœux de François Hollande au monde éducatif, depuis la Sorbonne, étaient empreints d’une particulière gravité, Charlie oblige. Quinze jours après les attaques terroristes du 7 janvier, le président de la République a exposé un nouveau volet du plan de riposte « républicain ». C’était prévu mais cela tombe bien : « dès septembre 2015 », un « nouvel enseignement moral et civique » va permettre à l’école d’assurer le formatage des esprits afin de répandre et imposer la laïcité. Une laïcité de combat.
Une première remarque : depuis la création de l’école laïque et publique, l’objectif de supplanter la doctrine catholique, de marginaliser la foi et de l’écarter de la sphère publique a été affirmé, servi, rappelé. Il semblerait que cela ne fonctionne pas aussi bien qu’on aimerait le faire croire, puisque c’est toujours à recommencer avec de nouveaux plans de plus en plus complets et efficaces. Cela montre en tout cas que l’emprise de l’Education nationale sur les âmes, sur les intelligences, a vocation à s’accroître toujours. Les annonces de François Hollande ne sont à cet égard qu’une étape, facilitée par les événements et par la peur qu’ils peuvent susciter.
L’école au service des “valeurs républicaines”
Que doit transmettre l’école ? François Hollande le résume en deux mots : les « valeurs républicaines ». Quel est l’enjeu ? « Eviter que l’école soit attaquée insidieusement par celles et ceux qui veulent mettre en cause les principes fondamentaux de notre République. » Il n’est pas question de bien et de mal, de justice objective, de la vraie morale qui s’appuie sur la loi naturelle. Non : le nouvel enseignement civique et moral s’en prend à ce que les écoliers pensent et croient, pour leur inculquer des « valeurs » définies par la République dans le respect de la laïcité.
Au cœur du discours de François Hollande sur ce thème, il faut retenir cette phrase : « La laïcité, ce n’est pas l’oubli des croyances, ou je ne sais quel conflit avec les religions : la laïcité, c’est la liberté de conscience, mais c’est aussi des règles qui font que les religions n’ont pas leur place dans l’école, ce qui n’empêche pas qu’il y ait un enseignement laïc des religions. »
Décryptons. L’enseignement moral et civique s’arroge le droit de présenter les religions sous l’angle du « fait religieux », de les enseigner de manière laïque, donc en les relativisant, en les soumettant, en imposant l’idée qu’elles ne relèvent pas de la vérité mais de la subjectivité et qu’à se titre, leur place est dans la sphère privée. C’est ainsi que cela se fait déjà. Ce sera accentué. Car la religion – n’importe quelle religion – ne peut prétendre à l’universalité (à la catholicité, si vous préférez) qui appartient en propre aux « valeurs républicaines ».
L’enseignement civique et moral contre les religions
En ce sens le propos de François Hollande est fondamentalement incohérent, contradictoire : ce type de « civisme » laïque est forcément en « conflit avec les religions ». En répétant – mais c’est une idée bien partagée, depuis l’extrême gauche jusqu’au Front national – que « les religions n’ont pas leur place dans l’école », le président de la République signe son adhésion au faux dogme laïque – et plus précisément, maçonnique – qui impose le rejet de Dieu et refuse que foi et raison aillent de pair. Par le même mouvement, on écarte la possibilité d’une religion vraie, et la dénonciation d’une religion fausse, puisque la religion de la République passe au premier plan. Le plan Peillon, pourrait-on dire : ce qui se produit, c’est la mise en œuvre de ses principes et de ses mesures.
Bien sûr, tout cela est emballé sous des aspects « positifs » : les valeurs républicaines rappelées par François Hollande lors de ses vœux à l’école sont «le respect des droits et donc l’égale considération des personnes, la solidarité, l’entraide, le sens de l’intérêt général, la participation à la vie démocratique, la citoyenneté ». Qui oserait prôner l’inégale considération, l’égoïsme, la haine de l’autre ?
François Hollande fait la morale
Mais on sait ce que tout cela recouvre, et d’ailleurs Hollande le précise. Cet enseignement civique et moral qui englobera toutes les classes, de l’école élémentaire à la Terminale, et tous les types d’établissements, « intégrera toutes les problématiques » : « la lutte contre le racisme, contre l’antisémitisme, contre les préjugés, contre toutes les formes de discrimination, les notions de droit et de devoir, le principe de laïcité, qui doit être explicité, qui doit être développé, qui doit être montré. »
La lutte contre le racisme, les discriminations, les préjugés se traduit par la dictature du relativisme, l’interdiction de la préférence nationale et religieuse, l’obligation de « respecter » toutes les expressions de la sexualité, au détriment de toute expression de la morale qui ne soit pas celle de la République et de la pensée de progrès…
Aussi, dès la rentrée prochaine, la Charte de la laïcité affichée depuis 2013 dans les écoles par la volonté de Vincent Peillon devra être signée par les parents.
L’école enseigne ce qu’il faut croire
Prolongement naturel de l’enseignement civique et moral, l’éducation des élèves aux médias promis par François Hollande lors de ce même discours au monde éducatif vise à verrouiller le système. C’est école de la République qui leur enseignera à trier parmi les informations qu’ils reçoivent : François Hollande veillera « aussi à l’enseignement aux médias, à l’information, pour que chaque élève puisse comprendre ce qu’est une information et ce que n’est pas une information. Ce qu’est une rumeur, ce qui est un bruit, ce qui est parfois une malfaisance, et qui n’a rien à voir avec une information. De pouvoir décrypter ce qu’est une source d’information et, hélas, ce qui peut être une source d’inspiration pour certains. C’est de pouvoir faire la part des choses. Mais comment le savoir, si ce n’est par l’école ? Comment le comprendre, si ce n’est par les règles que l’école doit transmettre ? Et notamment, ce qu’est la vérité ? Car il y a une vérité : la vérité des faits, la vérité de la science, la vérité du droit ! »
Parenthèse. Il y a donc une vérité ? Le président Hollande aurait-il été touché par la grâce ? Eh bien, non. La vérité « des faits » et de la « science » est celle qui s’oppose à la vérité révélée, qui la contredit et la ridiculise. La « vérité du droit », aujourd’hui, ce n’est pas le juste, mais l’expression de la volonté de la majorité : ce droit positiviste qui n’admet pas de loi morale qui transcende à la loi civile.
L’enseignement civique et moral sans Dieu
Cette « vérité » du relativisme est sans aucun doute une religion à part entière que l’école de la République est chargée de transmettre.
Ecoutons encore François Hollande : « Lorsqu’il s’est passé les événements graves comme ceux que nous avons connus il y a toujours eu l’interrogation sur ce qui pouvait être autorisé, et ce qui ne devait pas l’être, ce qu’était la liberté, y compris d’impertinence, ou ce qui pouvait atteindre la République. Eh bien, ce sont ces distinctions-là qui sont indispensables à poser. » L’impertinence est permise contre tout ce qui « n’atteint pas la République ». Critiquer l’islam (nommons ce que le Président passe sous silence) atteint la République en contrevenant au devoir de non-discrimination. Critiquer, railler, blasphémer contre les symboles les plus sacrés du christianisme, qui fait corps pourtant avec la terre française, est admis, parce que la République s’est construite sur les fondations d’une révolution antichrétienne.
« Les familles devraient le faire, mais il y a des familles qui sont démunies. Il y en a d’autres qui ne savent plus, qui ne comprennent plus, et qui sont dépassées. Et donc, quand nous sommes dans ce moment-là, dans ce contexte-là, vers qui se tourner ? Vers l’école. » François Hollande ne saurait être plus limpide : l’école de la République a la préséance sur les parents et sur les familles, elle a le droit de s’y substituer pour imposer la laïcité dans les cœurs.