La crise financière mondiale a fait dévisser la croissance mondiale, mais la reprise ne suffira pas à faire renouer les pays développés avec une progression de leur PIB comparable à ce qu’elle a pu être avant 2008. En cause : la « capacité productive », qui ralentit, annonce le Fonds monétaire international dans un rapport paru aujourd’hui. Les pays développés font face à des « limitations de vitesse » qui freinent la croissance de production potentielle et parmi les facteurs responsables le FMI désigne en premier lieu le vieillissement démographique.
Si les mesures pour favoriser l’innovation et l’investissement productif peuvent jouer pour remonter ces limitations de vitesse – qui permettent d’indiquer à quelle vitesse une économie peut accroître sa production de biens et de services sans que l’inflation monte, explique le FMI – elles se heurtent à ce problème majeur de la dénatalité. La démographie défavorable a eu pour effet, pendant les années de crise, à ralentir la croissance de la main-d’œuvre. Dans les pays émergents, le ralentissement de l’économie a plutôt été lié à une croissance moins rapide de la productivité.
La reprise ne sera pas rapide, le vieillissement démographique pèse sur le marché du travail
« Il n’est de richesse que d’hommes », disait jadis Jean Bodin. Son aphorisme reste vrai – dans les pays développés, la croissance potentielle de l’emploi a été divisée par plus de 2 en une dizaine d’années, à un rythme tel que la reprise des investissements et la croissance du capital productif ne pourront compenser ses effets. Le rythme de croissance de croisière, qui tournait autour des 2,5 % dans ces pays avant la crise, ne devrait plus atteinte ces valeurs ; il se situe actuellement aux alentours de 1,3 %.
Le chômage dans de nombreux pays développés n’est-il pas le signe qu’un gros réservoir d’emplois reste inutilisé ? C’est sans doute vrai, mais comme l’explique par ailleurs Harry Dent, économiste américain, le vieillissement démographique ne règle pas le problème du chômage en libérant des emplois : les personnes âgées consomment moins et différemment, et cela laisse de nombreux secteurs – éducation, bâtiment… – en stagnation ou en régression.
FMI : les pays développés et les pays émergents concernés par une croissance lente
Il est intéressant de noter que les pays émergents ont eux aussi leurs problèmes de vieillissement démographique : à force d’être poussés à contrôler leurs populations – notamment par les organisations internationales et supranationales dont le FMI fait partie – ils sont également confrontés à moyen terme à voir leur croissance freinée.
Comme le note le FMI : « Le niveau de vie pourrait s’améliorer plus lentement à l’avenir. De surcroît, il sera plus difficile de préserver la viabilité des finances publiques car l’assiette fiscale s’élargira plus lentement. » En clair : il deviendra de plus en plus difficile de rembourser la dette colossale affichée par de nombreux pays. La stagnation est là et par le fait, une nouvelle récession menace.
Les économies qui sont déjà enfoncées dans les problèmes liés au vieillissement démographique sont en premier lieu celles de l’Allemagne et du Japon qui verront leur force de travail baisser de 0,2 % par an dès 2020, puis de la Corée du Sud, qui les suit de près, et du géant chinois qui paiera au prix fort sa politique tyrannique de l’enfant unique.
Que faire ? Pour le FMI, tout n’est pas perdu. Il faut promouvoir l’innovation et l’investissement dans le capital productif, mais aussi « contrer les effets défavorables du vieillissement ». Sur ce dernier chapitre, rien de bien nouveau : le FMI prône les « solutions » qu’on nous vante depuis des années, notamment dans les pays développés qui connaissent la diminution la plus rapide de sa force de travail.
Le FMI ne veut pas combattre le vieillissement démographique, seulement atténuer ses effets
Que croyez-vous : que le FMI recommande de promouvoir la natalité et de soutenir les familles pour prendre ce problème sociétal grave à bras-le-corps ? Pas du tout !
Voici ce qu’il préconise : « Il est nécessaire de promouvoir la participation au marché du travail, surtout chez les femmes dans certains pays et les travailleurs plus âgés dans d’autres – pour certains pays, cela inclurait d’adopter des politiques fiscales et de dépenses mieux conçues », comme le dit le communiqué de presse du département des études du FMI.
Il faut que les femmes soient au travail, qu’elles abandonnent leur foyer si celui-ci a la chance de bénéficier de leur présence à plein temps, qu’il soit encore plus difficile d’élever une famille nombreuse !
C’est le type même de la solution à court terme, borgne et imprudente, qui ne fait qu’aggraver les choses pour l’avenir. Le FMI reste fidèle aux principes qui ont créé le marasme actuel…
Anne Dolhein