Istanbul : le pouvoir contre les manifestants

Istanbul : le pouvoir contre les manifestants
 
La police turque est intervenue vendredi à Istanbul pour disperser, au moyen de canons à eau et de gaz lacrymogène, un millier de manifestants qui souhaitaient célébrer le 1er Mai sur l’emblématique place Taksim, décrétée zone interdite par le gouvernement islamo-conservateur. Le pouvoir turc considère que toute manifestation syndicale n’est pas appropriée pour célébrer le 1er Mai.
 
Jets de pierres et de bouteilles, feux d’artifices, les manifestants ont répondu avec violence au procédé de la police stambouliote, qui a arrêté un nombre important de ces fauteurs de troubles (au moins 203 personnes avaient été arrêtées à la fin de l’après-midi), après avoir méthodiquement fermé tous les accès à la place Taksim.
 

A Istanbul, la répression contre les manifestants

 
Depuis les événements de juin 2013, le président Recep Tayyip Erdogan interdit systématiquement les rassemblements de masse sur Taksim. « J’estime que cette insistance sur Taksim est une erreur et cache un objectif », a-t-il déclaré cette année.
 
« La place Taksim est la place du 1er mai ! », « Coude à coude contre le fascisme ! », « Erdogan, voleur, assassin ! » Tels sont les slogans par lesquels les manifestants ont répondu au propos présidentiel, justifiant sans doute la réaction policière.
 
Evoquant l’histoire du 1er Mai, Umar Karatepe, un dirigeant de la Confédération des syndicats des travailleurs révolutionnaires (Disk), affirme : « En 1977, il y a eu un massacre. Nous souhaitons tout simplement être là-bas pour marquer cette date, on ne peut pas accepter de la fêter autrement. Le président de la République, (…) cet homme qui s’arroge tous les droits, ne peut pas nous dire où nous devons fêter le 1er Mai, c’est inacceptable ! »
 

Le pouvoir veut ignorer problèmes et difficultés

 
Il y a sans doute une autre explication, plus prosaïque, à cette interdiction lancée par le pouvoir. Ainsi que l’explique Mahmut Tanal, élu de l’opposition : « Les gens veulent exprimer leurs problèmes, mais le gouvernement ne veut pas entendre ces problèmes avant les élections. »
 
De fait, le pouvoir a marqué sa volonté de ne voir fleurir aucune protestation en cette journée. La veille, le premier ministre Ahmet Davutoglu avait ainsi dénoncé ceux qui veulent plonger la Turquie dans le chaos, avec d’autant plus d’assurance que, quelques semaines plus tôt, le Parlement turc avait voté une loi de sécurité intérieure renforçant les pouvoirs de la police contre les manifestants. Une manière de boucler la boucle…
 

François le Luc