Certaines dispositions du TTIP déjà imposées en Europe, l’Action 21 de l’ONU dans les dernières négociations

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Avant même sa ratification, les autorités de plusieurs pays qui participent aux négociations sur le traité transatlantique (TTIP) font déjà secrètement respecter certaines dispositions de cet accord, au profit de plusieurs multinationales puissantes. C’est ce qu’ont révélé plusieurs articles dans la presse européenne ces dernières semaines. Dans le même temps, on a appris que « l’Action 21 » de l’ONU sur le « développement durable » a fait son entrée dans la dernière version du TTIP. 
 
Le 17 octobre dernier, The Guardian écrivait : « Les négociateurs de l’Union européenne reprendront leurs pourparlers commerciaux controversés avec les Etats-Unis lundi, alors que selon certaines informations des multinationales ont brûlé les étapes en important sur les marchés européens des marchandises qui sont actuellement interdites, parmi lesquelles des végétaux génétiquement modifiés et du bœuf chimiquement lavé. »
 

L’Union européenne capitule devant la pression américaine et met en œuvre certaines dispositions du TTIP

 
Des groupes hostiles à la signature de l’accord soulignaient de leur côté que la presse américaine publie des articles affirmant que l’Union européenne a déjà capitulé devant l’immense pression américaine en autorisant l’importation de produits interdits avant toute signature de l’accord.
 
Le lendemain, le blog Common Dreams constatait lui aussi que certaines normes du TTIP font l’objet d’une mise en œuvre accélérée malgré l’absence d’accord : « Les autorités américaines ont utilisé avec succès la perspective du TTIP pour contraindre l’Union européenne à abandonner l’interdiction de 31 pesticides dangereux, dont certains ingrédients peuvent causer des cancers ou l’infertilité. Même chose pour les régulations interdisant le traitement de la viande de bœuf à l’acide lactique. Ce traitement a été interdit en Europe de crainte qu’il ne serve à masquer des pratiques peu hygiéniques. L’interdiction a été levée par des députés de la commission de l’Environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen, après que la Commmission de Bruxelles a publiquement annoncé craindre que les négociations du TTIP ne soient menacées par cette interdiction. »

 

Le TTIP au service de l’intégration totale imposée à l’UE et aux Etats-Unis

 
Le vote du TTIP avait été repoussé en raison d’une opposition populaire massive et inattendue : beaucoup se sont rendus compte que la souveraineté des pays européens, mais aussi celle des Etats-Unis sont en jeu. En effet, le TTIP propose une intégration « profonde et complète » entre les Etats-Unis et les 28 Etats membres de l’Union européenne.
 
Le lobby Transatlantic Policy Network rassemble des responsables politiques de l’UE et des Etats-Unis, mais aussi des représentants des grosses multinationales (wikipedia en langue allemande en donne une liste relevée sur des stands organisés par le TPN) que le site officiel évoque sans nommer. Il œuvre depuis plusieurs dizaines d’années à cette « intégration ». En 2008, il publiait un rapport on ne peut plus clair : « Le processus de création d’un Marché transatlantique constituera une étape intégrale dans l’évolution vers un éventuel Accord de partenariat transatlantique qui embrasse la totalité économique, politique et stratégique de la relation UE-Etats-Unis. »
 
Etant donné la menée parallèle de négociations tout à fait semblables en vue d’un Traité transpacifique entre les Etats-Unis et les nations orientales, il faut ajouter qu’il s’agit d’une étape vers une intégration encore plus large.
 

L’Action 21 de l’ONU sur le « développement durable » dans les dernières négociations du TTIP ?

 
Celle-ci ne recule d’ailleurs pas devant les contradictions. Le même TTIP qui impose l’abandon des normes de sécurité et de protection de l’environnement cherche à imposer les normes écologiques de l’« Agenda 21 » de l’ONU, la fameuse Action 21 qui est censée assurer le « développement durable ».
 
Le 23 octobre dernier, la onzième phase de discussions du Traité transatlantique avait lieu à Miami, et l’Union européenne semble avoir sous la pression des Etats-Unis renoncé à renforcer sa politique de protection de l’environnement, contrairement à ce qu’elle avait promis en janvier dernier. Un texte confidentiel que s’est procuré The Guardian évoque des mesures en matière de « développement durable » des plus floues et non contraignantes.
 
Ce texte figure dans le chapitre « développement durable » du TTIP. A cet égard le recul de l’Union européenne sur des normes sous la pression des Etats-Unis et de certaines multinationales, alors que ses propres normes de protection environnementale sont bien plus contraignantes que celles des Etats-Unis, serait une manière de reculer pour mieux sauter. C’est une manière de dire que le TTIP a des compétences dans le domaine écologique et doit servir à terme à la mise en œuvre de l’Action 21 dont l’objet est précisément le « développement durable ». Jugé à cette aune, le TTIP ne serait plus seulement une menace pour la souveraineté des nations : il serait également un cheval de Troie de l’ONU.
 
Car « tout est lié », n’est-ce pas ?
 

Béatrice Romée