La Chine vend déjà pour plus de 50 millions de dollars de nourriture halal aux musulmans d’Asie et du Proche-Orient, mais elle cherche à obtenir davantage de contrats d’exportation sur ce marché juteux. Ce n’est certes pas par conviction : le dirigeant de la plus importante société de vente d’aliments et de boissons halal, Deng Zhijun, affirmait lors d’une récente interview que « les musulmans ne fument certainement pas et ils ne boivent pas d’alcool »… mais il était incapable de se rappeler de quel type de viande ils s’abstiennent.
Si nombre de musulmans de Chine font l’objet de persécutions de la part du pouvoir communiste, l’islam est tout de même perçu comme une source potentielle de revenus. Selon la chambre de commerce et d’industrie de Dubaï, le volume mondial du halal, traduit en dollars, devrait passer de 1.100 milliards en 2013 à 1.600 milliards en 2018.
Le marché du halal : bientôt 1.600 milliards de dollars par an
Deng, et d’autres chefs d’entreprise entendent s’appuyer sur l’initiative de Xi Jinping qui veut promouvoir les échanges avec les pays du sud-est asiatique et du Proche-Orient (« One Belt, One Road » ou « une ceinture, une route »), où la demande de halal est évidemment très forte.
En attendant, la Chine risque d’avoir du mal à convaincre dans la mesure où la conformité des les aliments exportés avec les exigences du halal est remis en question, notamment par Miriam Abdul Latif, professeur des sciences alimentaires et expert du halal à l’université Sabah en Malaisie : elle cite l’exemple de « documents ou de certificats halal falsifiés ». La Chine devrait selon elle accepter le contrôle d’organismes de certification officiels mandatés par les pays musulmans.
Le problème est celui de l’athéisme officiel de la Chine, car comment justifier la mise en place de lois ou de réglementations pour conformer des produits aux exigences islamiques sans contredire le principe de laïcité ? Pour Xi Wuyi, expert en marxisme à l’Académie chinoise des sciences sociales, de telles mesures pourraient « menacer la stratégie de sécurité nationale de la Chine », rien moins.
La Chine veut exporter du halal vers le Proche-Orient
Il faut dire qu’en Chine, les musulmans s’opposent volontiers au pouvoir à propos de ces questions : l’an dernier, c’est par centaines qu’ils descendirent dans la rue dans la province de Shaanxi pour protester contre la vente d’alcool dans des restaurants halal. Dans celle du Qinghai, une foule islamique détruisit une boulangerie après qu’on eut trouvé des saucisses de porc et du jambon dans ses camionnettes de livraison.
Quoi qu’il en soit, cette affaire montre que la Chine, avec près d’un milliard et demi d’habitants, n’arrive pas seulement à nourrir sa propre population, mais à exporter à grande échelle sa production agricole.