Comme l’on pouvait s’y attendre, on assiste, depuis des mois, depuis des semaines, à un face à face d’idées sur la question du Brexit, chacun ayant à cœur – ou à intérêts – d’exposer pourquoi l’autre camp a tort. Mais depuis quelques jours, alors que l’échéance se fait proche, c’est à une véritable bataille que les deux partis se livrent, à grand renfort d’arguments qui souvent n’en sont pas et de menaces destinées manifestement à effrayer l’électeur britannique qui se risquerait dans la mauvaise voie : celle d’en face.
Oh ! certes, il y aurait une certaine naïveté à croire, comme certains veulent le prétendre, qu’il y aurait d’une part une mauvaise solution, de l’autre une bonne. Si la construction européenne fait actuellement la preuve des catastrophes qu’elle engendre ici et là, le Brexit, s’il l’emportait, ne se ferait pas sans difficultés, ni complications. Mais elles seraient assurément moindres que celles qui vont se développant, pour le Royaume-Uni au sein de l’Union européenne, et que le coup porté au « moral » de Bruxelles.
Bataille d’idées sur le referendum britannique
Cela explique sans doute le matraquage auquel nous assistons actuellement. Dernières en date des menaces proférées à l’encontre des partisans du Brexit, celle lancée par le ministre allemand des Finances qui a déclaré vendredi que, en cas de Brexit, le Royaume-Uni ne pourrait plus bénéficier des avantages du marché unique européen. Car, a déclaré Wolfgang Schäuble, « dedans, c’est dedans, dehors, c’est dehors ».
On ne sait à quoi tend exactement la déclaration faite par le ministre au magazine Der Spiegel, car les relations qui suivraient un Brexit seraient à réinventer, et non à asséner totalitairement, en un point de vue idéologue qui serait aussi néfaste pour l’Union européenne, puisqu’il reviendrait d’autre part à se priver de liens avec Londres, et peut-être surtout avec la City.
L’angoisse du Brexit
Mais on voit bien où veut en venir Wolfgang Schäuble avec sa remarque de pion de cour d’école. Comme tous les européistes forcenés, il craint que le Royaume-Uni puisse faire école. Car, une fois encore, c’est d’abord la question « morale » qui perturbe les sectateurs de Bruxelles – et cela même si la question d’un retrait d’un Etat-membre de l’Union est prévue par les traités. Dans leur esprit, ce n’était que le moyen de calmer certains esprits échauffés, pas une réalité…
Interrogé sur l’effet domino, le ministre répond effectivement : « On ne peut pas l’exclure. (…) Comment réagiraient par exemple les Pays-Bas, qui sont traditionnellement très liés au Royaume-Uni ? »
Il étend d’ailleurs son mode de pression sur l’ensemble des autres pays en les avertissant que, si le scénario d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne se concrétisait, alors celle-ci ne pourrait pas répondre en proposant simplement davantage d’intégration pour les pays membres restants.
En clair, le grain de sable aurait tendance à bloquer toute la machine, et c’est bien cela qui inquiète d’abord un théoricien comme Wolfgang Schäuble, même s’il veut s’affirmer certain que l’Europe fonctionnera si nécessaire sans le Royaume-Uni.
On peut lire toute la presse européenne, se pencher sur toutes les déclarations politiques sur le sujet, toutes reflètent le même réflexe irrationnel, voire schizophrénique : affirmer d’une part les dangers certains qui toucheraient le Royaume-Uni et les contrecoups possibles qui atteindraient l’Union européenne ; et d’autre part le fait que celle-ci pourrait continuer quasiment comme si de rien n’était. Et certains vont même jusqu’à trouver des avantages à cette situation.
L’inquiétude de l’effet domino
La raison de ces réactions parfois contradictoires est simple : en réalité, ils ne savent pas comment cela pourrait réellement se passer, et tentent, s’ils ne peuvent l’empêcher, de prévoir tous les scénarios possibles.
A cela s’ajoute le fait que l’opinion publique européenne se manifestant de plus en plus comme europhobe, ils se sentent obligés de ménager, si l’on peut dire, la chèvre et le chou, de peur de provoquer, par leurs déclarations à la limite du sectarisme, des réactions plus violente encore : un « Franxit », par exemple.