La décision est tombée hier, 8 juin : les parents du petit Charlie Gard ont perdu leur appel devant la Cour suprême britannique. Ses parents, Chris Gard et Connie Yates, qui souhaitaient emmener aux Etats-Unis leur fils de 10 mois, atteint d’une maladie rare, se sont vus opposer le refus des médecins et des juges. Et leur décision est formelle : l’enfant doit être débranché, ici, à Londres.
Une histoire qui montre, une fois de plus, le pouvoir outrancier que peut s’octroyer la gent médical, aidée des juges, pour décider ce qui est bon pour les uns et mauvais pour les autres : qui doit vivre et qui doit mourir. Et sans égards aux droits parentaux.
Atteint d’une maladie génétique rare
Charlie Gard est né le 4 août dernier, un beau bébé sans dommage apparent. Huit semaines plus tard, ses parents le ramènent à l’hôpital, car il maigrit et dépérit. Ils découvrent qu’il est atteint d’une maladie mitochondriale, une encéphalopathie, qui entraîne une faiblesse musculaire progressive et des lésions cérébrales : depuis, sous respiration artificielle, il ne peut ni voir, ni entendre, ni bouger, ni avaler et il est impossible de savoir s’il ressent de la douleur.
Un cas extrême qui fait chercher l’impossible aux parents. Sans autre possibilité de traitement au Royaume-Uni, Chris Gard et Connie Yates remuent ciel et terre jusqu’à découvrir un spécialiste aux Etats-Unis qui accepte de le prendre en charge afin de tenter en ultime recours une nouvelle thérapie appelée nucléoside.
La dernière chance pour lui – et pour eux. Que la Cour suprême vient de rejeter en confirmant les jugements précédents d’avril et de mai : elle interdit la sortie du territoire et demande l’arrêt du respirateur artificiel de l’enfant.
Charlie Gard doit être débranché pour « mourir dans la dignité »
Les juges ont donc statué en faveur de l’hôpital « Great Ormond Street » à Londres, (où Charlie est maintenu en vie) qui avait demandé l’arrêt des soins. La Cour suprême, dirigée par Lady Hale, le vice-président de la Cour suprême et la plus haute juge de l’histoire juridique britannique, a jugé que Charlie Gard devait être « autorisé à mourir dans la dignité ».
Juges et médecins n’ont eu qu’un seul mot à la bouche, « l’intérêt de l’enfant », en particulier la directrice de l’équipe juridique du « Great Ormond Street ». Ce qui est fort justifié en soi, mais ne semble pas prévaloir en l’occurrence, le dernier recours envisagé par les parents étant balayé d’un revers de main plutôt leste…
Les médecins ont jugé le déplacement et la perspective de ce traitement trop « expérimental », « inutiles ». Même l’avocat chargé par le tuteur chargé de représenter indépendamment les intérêts de Charlie, a déclaré qu’un voyage aux États-Unis n’était pas dans son intérêt…
Les droits des parents bafoués
C’est ce contre quoi on peut se révolter, à juste titre. Avant toute réflexion sur le bien-fondé d’un arrêt de la machine, de la poursuite du traitement ou autre.
Les parents « n’acceptent pas que la thérapie nucléosidique sera futile » assène l’avocate adverse. Mais qu’en sait-elle ? Même si les chances de le sauver sont infimes, c’est dans le droit le plus élémentaire d’un parent que de pouvoir en faire la démarche ! Dans l’intérêt évident d’un enfant d’être sauvé…
D’autant que pour ce faire, ils ne demandaient même pas l’argent du contribuable : une campagne de dons pour aider Charlie à traverser l’Atlantique leur a fait récolter quelque 1,3 million de livres en quelques mois…
C’est donc une volonté formelle de garder le pouvoir et le contrôle de la décision, en dépit des droits parentaux. Une toute-puissance médicale appuyée sur le pouvoir des juges s’octroie de décider ce qui, pour elle, est dans l’intérêt de l’enfant : la mort en l’occurrence, malgré ce petit espoir de vie.
Encore un peu plus de quatre jours
Avant la décision, Richard Gordon QC, qui dirige l’équipe juridique du couple, avait déclaré : « Charlie est privé de sa liberté à l’hôpital Great Ormond Street ».
Ses parents aussi, qui devraient être libres de prendre des décisions concernant le traitement de leur enfant, à moins que le traitement proposé ne présente un risque de préjudice important – ce qui n’est pas le cas.
Il n’est même pas encore question, là, d’acharnement thérapeutique. Ces parents ont fait le choix de garder « toutes les options ouvertes » et de tenter, avec leurs propres moyens, une dernière tentative de soins qui n’a pas encore été testée. En leur interdisant ce voyage et en ordonnant l’arrêt des soins, les instances médicales et judiciaires semblent aller au-delà de l’exercice légitime de leurs fonctions.
A l’instant, la Cour européenne des Droits de l’Homme saisie depuis hier par les parents de Charlie font savoir que les médecins doivent garder l’enfant en vie jusqu’à mardi 13 juin minuit, pour examen approfondi de l’affaire. Qui est donc à suivre.