Cela faisait 15 ans qu’un patient – dont l’identité n’a pas été révélée – était dans un état d’« éveil non répondant » à la suite d’un accident de voiture. Ce qu’on appelle habituellement l’état végétatif – l’état d’une personne dont on estime qu’elle n’a aucune conscience de son entourage ni d’elle-même – a pu être levé grâce à un traitement innovant mis en place par l’Institut des sciences cognitives Marc-Jeannerod du CNRS de l’université de Lyon avec les hospices civils de Lyon. Il a pu en un mois recouvrer un état de conscience minimale grâce à la stimulation électrique répétée du nerf vagal au moyen d’un implant thoracique.
 
Son état était à l’origine plus mauvais que celui de Vincent Lambert, qui se trouve, lui, en état de conscience minimale. Ce qui est censé justifier la mise à mort de l’un est salué comme un progrès remarquable chez l’autre…
 

Un jeune homme en état végétatif persistant récupère une conscience minimale au bout de 15 ans

 
L’expérience, qui a fait l’objet d’une publication dans une revue scientifique, Current Biology, permet au moins de contrer l’affirmation habituelle selon laquelle un état végétatif persistant au-delà de 12 mois serait irréversible.
 
Au cours du mois de traitement décrit par l’article, le jeune homme a commencé à répondre de mieux en mieux à des ordres simples et à faire preuve d’une « meilleure présence au monde », comme l’a souligné la responsable de cette recherche, Angela Sirigu. Le patient est parvenu à suivre un objet des yeux, à tourner la tête lorsqu’on le lui demandait, et il semble même avoir répondu à une « menace » lorsqu’un chercheur s’est subitement approché de lui – en ouvrant largement les yeux. L’examen de son activité cérébrale confirme une progression dans les domaines du mouvement, de la sensation et de la conscience, en même temps que la connectivité fonctionnelle et l’activité métabolique des régions corticales et sub-corticales ont été augmentées.
 

Un nouveau traitement neurologique par stimulation du nerf vagal se révèle efficace

 
Chose intéressante, les chercheurs ont tenu compte des appréciations de la mère du patient constatant que le jeune homme avait gagné en capacité d’éveil lorsque son thérapeute lui lisait un livre.
 
Le parallèle avec l’affaire Vincent Lambert est saisissant : les appréciations de la mère de ce dernier quant à ses réactions à son environnement sont systématiquement balayées. Et bien qu’il ne soit pas en état végétatif, aucune thérapie ne lui est administrée pour améliorer son état ni même pour lui assurer le confort dont il pourrait jouir en son état actuel.
 
Si le monde médical reste prudent face à ce qu’avance l’équipe de Lyon, la réussite de cette expérience est un défi pour que de nouvelles tentatives soient pratiquées sur d’autres patients dans un état semblable.
 
Pour l’intérêt de la science, cela se fera peut-être, voire sans doute. Mais la tendance lourde dans le domaine médical consiste à pointer l’absence de qualité de vie, ou la très mauvaise qualité de vie les personnes en état de conscience minimale. C’est tout l’enjeu de l’affaire Vincent Lambert, précisément, où l’on cherche à faire reconnaître qu’il vaut mieux être privé de nourriture et d’hydratation jusqu’à ce que mort s’ensuive que de se trouver dans cet état-là.
 

Jeanne Smits