Coincé sous le feu non plus des projecteurs, mais des critiques venues de toutes parts, Facebook fait grise mine et n’en finit plus de s’excuser depuis la fin de la semaine dernière et l’éclatement, via The Guardian, du scandale Cambridge Analytica. Si un certain nombre de ses utilisateurs se fichent pas mal du soutien éventuel (?) que l’histoire a apporté à la campagne de Donald Trump, beaucoup commencent à réfléchir plus sérieusement aux potentialités indiscrètes de leur réseau social préféré… qui pompe toujours leurs données personnelles, au bénéfice des annonceurs et d’autres.
A chaque partage, chaque « like », chaque mise en relation, chaque quizz, vous payez un prix bien souvent ignoré.
Cambridge Analytica : le « data-séisme »
Effet boule de neige, les scandales se suivent, on parle même de « data-séisme »… Poursuites judiciaires devant les tribunaux de Californie, questionnements au Congrès américain, montée au créneau de parlementaires, accusations de la NASA à propos de la présidentielle au Kenya… on peut aller très loin, comme ça.
Depuis l’éclatement du scandale Cambridge Analytica vendredi dernier, le hashtag #deletefacebook fait fureur. Le cours de l’action Facebook a perdu plus de 10 %. Et d’aucuns se demandent si Mark Zuckerberg ne doit pas lâcher les commandes de sa chère plate-forme…
Sortant enfin d’un silence confus, le fondateur du réseau social s’est laissé interviewer mercredi soir sur CNN : « Ce fut un abus de confiance majeur, et je suis vraiment désolé que cela soit arrivé ». Il a rappelé la chronologie des faits, redisant que les collectes de données en question s’étaient déroulées en 2013, c’est-à-dire à l’époque où les applications pouvaient encore accéder non seulement aux informations personnelles de leurs utilisateurs, mais aussi à celles de leurs amis (avec seulement 270 000 téléchargements, l’application a pu ainsi collecter des éléments sur quelque 50 millions d’individus…)
Facebook et Zuckerberg dans la tempête
Mais si une affaire semblable n’est, de fait, plus possible depuis l’abrogation de cette fonctionnalité en 2015, le public s’inquiète néanmoins à la fois sur les données pré-existantes à cette année, qui peuvent très bien se balader on ne sait où, et sur les données d’aujourd’hui qu’on craint être menacées par une autre faille du système Facebook…(mais n’est-ce pas Facebook qui est une faille à lui tout seul ?!)
C’est pourquoi Zuckerberg a annoncé une série de mesures, parmi lesquelles l’examen de l’ensemble des applications susceptibles d’avoir pu accéder à de nombreuses données avant 2015, le blocage des accès aux données pour les applications non utilisées depuis plus de trois mois, ou encore l’insertion en tête du fil d’actualité d’un outil qui montrera les applications utilisées, accompagné d’options pour révoquer les autorisations d’accès aux données.
Il s’est même dit ouvert à une éventuelle « régulation » par un tiers, c’est dire le niveau de la sonnerie d’alarme.
Peur sur les données personnelles
Parce qu’il va falloir les rassurer, les utilisateurs. Il y a comme qui dirait une gêne. Combien de mes actions sur Facebook ont une conséquence ? Combien d’entre elles servent à quelque chose ?!
L’application et le site web du réseau utilisent une multitude de points de données pour obtenir des informations sur ses utilisateurs. Bien que ces données ne soient jamais vendues, elles peuvent être façonnées, comparées et utilisées pour créer une image des utilisateurs beaucoup plus détaillée que ce à quoi ils pourraient s’attendre.
Et point besoin d’enregistrement des conversations, cette récolte est d’elle-même si révélatrice, si efficace qu’il n’est point besoin d’écouter quoi que ce soit…
Ne vous inquiétez pas, vos data sont entre de bonnes mains
Votre localisation tout d’abord. Non seulement Facebook demande l’accès au signal GPS de votre smartphone, mais il utilise également les connexions Wi-Fi, les informations que vous avez saisies sur votre ville et votre adresse, et votre adresse IP pour déterminer votre position. Ainsi les annonceurs peuvent cibler des annonces sur des personnes résidant dans un lieu particulier, les touristes de passage… Si vous activez cette option, vos amis peuvent même voir où vous êtes.
Vos « like ». Tout ce que vous aimez ou suivez est compilé, d’une photo de famille au dernier film de Star Wars. Facebook peut ainsi déterminer vos intérêts et même vos préférences religieuses et politiques…
Vos relations. Si vous avez partagé le carnet d’adresses de votre téléphone avec Facebook, il recueille les noms, les numéros de téléphone, les surnoms, les photos de contact et plus encore… quant à vos réseaux amicaux, c’est du tout cuit.
Votre historique de navigation sur le web. Des milliers de sites web ont des boutons « I like » ; même si vous n’interagissez pas avec le bouton ils envoient des données à Facebook comme quoi vous les avez visités.
Les applications que vous installez et auxquelles vous connectez en cliquant sur le bien pratique « se connecter avec Facebook »… trop pénible sinon.
Enfin les données externes : Facebook achète des informations auprès de sociétés de données telles que les agences de notation de crédit ou Dunnhumby, la filiale « big data » de Tesco, pour compléter l’image de vos centres d’intérêts ou de vos besoins.
Tout ça direction les annonceurs ! En bref, si vous demeurez dans l’ombre, échappez-vous immédiatement – votre vie d’avant, en revanche, restera enregistrée…