The Swamp : la mini-série publiée sur Facebook qui révèle aux Américains le vrai fonctionnement du Congrès – sa corruption via les lobbies

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Quatre millions de personnes ont déjà regardé les trois premiers épisodes de cette série documentaire publiée sur Facebook depuis le 4 avril, intitulée « The Swamp » (« le Marais ») – l’intérêt du peuple américain est palpable. Le Congrès est l’outil du gouvernement du pays, il en façonne les lois, il en dirige le destin politique. Malheureusement, comme nous l’apprennent les six représentants républicains interviewés dans ces mini épisodes de dix minutes, le système est truqué, soumis à la corruption et à l’argent des lobbies. « Le processus législatif est une farce malhonnête » écrit The Federalist.
 
Du complotisme ? Ce sont de réels et précieux témoignages que nous livre le jeune cinéaste Matt Whitworth. Les risques encourus par ces représentants ne sont d’ailleurs pas moindres – même des membres du Freedom Caucus (groupe parlementaire de sensibilité ultra-conservatrice) leur ont dit qu’ils étaient « fous » de faire ça…
 

« The Swamp » nous fait pénétrer dans les arcanes du pouvoir

 
« Tout activiste politique local sait que quelque chose ne va pas à Washington D.C. Peu importe combien nous travaillons dur pour envoyer de bons représentants au Congrès, la majorité d’entre eux se transforment dès leur arrivée, oubliant leur discours de campagne et s’inscrivant dans l’establishment politique. Les rares qui conservent leurs principes semblent souvent marginalisés et inefficaces » lit-on dans The Federalist.
 
Les six représentants interviewés, Dave Brat et Tom Garrett de Virginie, Ken Buck du Colorado, Rod Blum de l’Iowa, Thomas Massie du Kentucky et Ted Yoho de Floride sont tous républicains et presque tous des membres du Freedom Caucus.
 
Whitworth a également essayé de recruter des Démocrates, mais aucun n’était prêt à prendre le risque. Quand on expose l’État profond et ses agents… il y a beaucoup moins de candidats sur la gauche !…
 

« Nous voulons vraiment montrer aux gens ce qui se passe dans les coulisses du Congrès » Matt Whitworth

 
Première information capitale sur la structure du pouvoir : bien qu’il y ait 435 membres du Congrès, la plupart des décisions sont prises par une poignée de personnes, tout en haut, qui contrôle l’ensemble du système. Et pas question de stigmatiser l’un ou l’autre parti : la trahison est très bien répartie. Pour ce qui est du mépris de la Constitution et de la faillite du pays, dit TheNewAmerican, on s’entend des deux côtés de l’allée…
 
Dans l’épisode 2, les membres du Congrès donnent un exemple : en mars, quand un certain nombre de Républicains conservateurs ont voté contre le projet de loi omnibus sur les dépenses, les Démocrates ont changé juste assez de leurs votes « contre » habituels pour s’assurer que le projet passe… Ken Buck parle d’« un accord secret » entre Républicains et Démocrates pour un contrôle quasi systématique de toute dissidence.
 
Buck explique aussi que c’est le règne de la non-information : « Sur un certain nombre de dépenses, j’ai lu des dispositions [dans les médias] qui affectent mon district avant même que j’entende quoi que ce soit des dirigeants républicains (…) J’oserais dire que 95 % des membres ici ne savent pas ce qu’il y a dans un projet de loi sur les dépenses avant d’être censés voter ! » Et les règles qui sont censées présider au processus législatif sont gentiment écartées quand le besoin s’en fait sentir : pour l’omnibus, la règle exigeant 72 heures pour que les membres lisent réellement les lois qu’ils vont imposer à la nation n’a pas été respectée.
 

Si vous voulez vraiment jouer… vous payez et pour cela vous devez vous vendre aux lobbies

 
Pire encore, dans l’épisode 3, Thomas Massie explique que les membres peuvent jouer un rôle plus actif dans l’établissement du programme du Congrès, mais à condition de payer. Si un Républicain du Congrès veut siéger à un comité, il doit lever une certaine somme d’argent pour le Comité républicain national du Congrès… idem pour le clan démocrate. Et elle change en fonction des affectations des comités qui sont classés par ordre d’intérêt et de prestige, A, B ou C, et tarifés en conséquence… (« Anciens Combattants », c’est un comité C !) Massie parle d’un million de dollars (non payés) rien que pour lui, depuis ses débuts au Congrès…
 
Vous êtes, ce faisant, livrés pieds et poings liés aux lobbies, car eux seuls ont les fonds nécessaires pour payer ces sommes souvent à six ou sept chiffres ! « La structure d’incitation est mise en place pour vous vendre aux lobbyistes, car ils sont les seuls à avoir l’argent dont vous avez besoin, à savoir les fonds de campagne, pour acheter votre commission, explique Massie qui parle tout bonnement de « prostitution ».
 
Et si vous refusez tout ce système ? « Il y a une série de punitions, dit Ken Buck. Ils feront de leur mieux pour vous isoler et s’assurer qu’ils vous dégagent. » Même les membres du personnel sont là pour « éclairer » les jeunes arrivés…
 

Corruption : « Je ne connais pas une seule personne qui est arrivée ici sans lever d’argent »

 
Devant un tel déballage, nul doute qu’il y aura des répercussions. Pour Thomas Massie, elles sont venues sous la forme de deux journalistes qui voulaient le mettre en difficultés sur les histoires de collectes de fonds pour pouvoir le traiter dans les médias d’« hypocrite » et désamorcer la bombe des lobbies – ils étaient évidemment envoyés.
 
Pourtant, le vrai problème, pour lui, ce ne sont même pas les lobbies : ce sont les partis qui leur ont volontairement – et scandaleusement – donné la place qu’ils occupent, dans une république devenue « bananière ». Finalement, comme l’écrit TheNewAmerican, c’est « l’aspect le plus effrayant de la profondeur et de l’ampleur de la tromperie et de la corruption dans les plus hautes fonctions du pouvoir législatif » – « et une voie empruntée par tous les tyrans à travers tous les âges de l’histoire des hommes »…
 
On attend avec impatience les prochains épisodes de « The Swamp » qui devrait se poursuivre cet été.
 
Clémentine Jallais