On dira ce qu’on voudra, mais le job de président n’est pas une partie de plaisir : les quinquennats de Macron rappellent un jeu vidéo du début des années 2000, Crash Bandicoot, dont le héros devait en permanence éviter toutes sortes de catastrophes, crocs, pals, marteaux, etc., gilets jaunes, réformes des retraites, Ukraine, Gaza, à tout moment il risque sa vie sans avoir droit à l’erreur, alors il cherche une plate-forme pour souffler dans la douceur du consensus. Pour cela, il vient de mettre les pieds dans le plat de l’évidence en disant ce que tout le monde pense de l’écriture inclusive, que c’est une dangereuse sottise. Il ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin : sur le genre aussi, l’immigration ou le climat, il existe des évidences bonnes à dire qui lui vaudraient l’approbation reconnaissante des Français.
Macron professeur de grammaire et d’évidence
Inaugurant la Cité internationale de la langue française dans le château tout récemment restauré de Villers-Cotterêts, où François Ier publia son ordonnance faisant du français la langue administrative du pays en remplacement du latin, Emmanuel Macron a rappelé quelques évidences à propos du français. Ayant célébré « les fondements, les socles de sa grammaire, la force de sa syntaxe », il a ajouté : « Dans cette langue, le masculin fait le neutre. On n’a pas besoin d’y ajouter des points au milieu des mots, ou des tirets ou des choses pour la rendre lisible. » Ce n’est pas très bien dit mais c’est clair, et cela fait hurler la gauche, alors que le Sénat vient de voter une proposition de loi visant à « protéger la langue française des dérives de l’écriture dite inclusive » et à interdire celle-ci
L’écriture inclusive rejetée par le peuple français
Cette proposition s’appliquerait « dans tous les cas où le législateur (et éventuellement le pouvoir réglementaire) exige un document en français », comme les modes d’emploi, les contrats de travail, les règlements intérieurs d’entrepris et les actes juridiques, qui seraient considérés comme irrecevables ou nuls. Mais il n’est rien moins que sûr que l’Assemblée reprenne le texte, car l’extrême gauche, les idéologues socialistes et les écologistes y pèsent lourd, tous dressés contre les « réactionnaires », refusant de « figer la langue française » et avançant à marche forcée sur le « chemin de l’égalité femmes-hommes ». A la sénatrice Pascale Gruny qui constate : « L’écriture inclusive affaiblit la langue française en la rendant illisible, imprononçable et impossible à enseigner », Jean-Luc Mélenchon a répondu que la langue « appartient à ceux qui la parlent » ! C’est exact, et il semble bien qu’il ait marqué contre son camp, car le Français moyen, et l’immigré moyen, ne pensent ni n’écrivent en écriture inclusive, produit des crânes d’œuf de l’arc-en-ciel. Comme vous et moi, ils regrettent que des élites intellectuelles politisées prétendent forcer l’usage populaire.
La réalité : une mine de consensus pour Emmanuel Macron
C’est de cette réalité linguistique, sociologique et politique qu’Emmanuel Macron s’est emparé pour renvoyer à leurs dangereuses rêveries les promoteurs de l’écriture inclusive : il est sûr ainsi du soutien d’une grand majorité, ce qui lui retape un peu la cerise, aujourd’hui où tout est si « controversé » et si « clivant ». Alors, s’il souhaite d’autres objets de consensus facile pour remonter dans les sondages, on peut lui souffler quelques thèmes pour ses prochains discours. Il y a trop d’immigrés inassimilables en France. Expulsons les islamistes radicalisés avant qu’ils ne tuent. Il faut rétablir l’ordre et la sécurité à l’école primaire, l’autorité des maîtres, y apprendre à lire, écrire et compter. Il n’y a que deux sexes, déterminés par la biologie, l’homme et la femme : il faut virer la révolution de genre de l’école, des médias, de la publicité. Le climat a toujours varié : organisons un vrai débat scientifique avec de vrais scientifiques pour voir quelles sont aujourd’hui les causes, l’ampleur et les conséquences de ses variations, avant de lancer des politiques aussi inefficaces et coûteuses que totalitaires. Ces quelques idées devraient suffire pour les six prochains mois, et assurer 80 % de oui à Emmanuel Macron pour son prochain plébiscite.