Le changement d’algorithme de Facebook frappe de manière disproportionnée les sites conservateurs

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Donner plus de place à la famille et aux amis, en écartant un tant soit peu les publications et les fils d’actualités… La bonne intention 2018 de Facebook, très médiatisée, en cache d’autres – moins bonnes. Et il fallait vite fait se pencher sur les conséquences concrètes de ce nouvel algorithme décidé et défini par l’entreprise aux 2,13 milliards d’utilisateurs actifs mensuels. Le Western Journal l’a fait, comme nous le rapporte Breitbart News. Et sa conclusion est intéressante : les médias conservateurs ont été affectés de manière disproportionnée, par rapport à la presse libérale progressive.
 
Bienvenue sur le nouveau terrain de jeu de l’influence médiatico-sociale.
 

Les conservateurs vaincus par le nouvel algorithme

 
Le Western Journal a tout simplement analysé le trafic réel vers les sites d’information à partir de Facebook – ce qui a un impact direct sur la consultation et donc les revenus de ces sites. Il a sélectionné cinquante médias, connus pour recevoir une quantité importante de trafic en ligne de Facebook, tels que le Washington Post, CNN ou Fox News, ainsi que de nouveaux médias comme Vox ou The Daily Caller – un éventail d’orientations politique diverses.
 
Il a ensuite comparé les flux entre le mois de janvier et le mois de février (Facebook a commencé à déployer son changement d’algorithme le 6 février). Le résultat est sans appel, les éditeurs conservateurs ont été négativement impactés : les 25 médias du côté libéral de l’échelle ont augmenté en moyenne de près de 2 % leur trafic, tandis que les 25 du côté conservateur ont enregistré en moyenne une baisse de près de 14 %.
 
Mieux, si l’on supprime les 15 médias qui totalisent le moins de trafic à partir de Facebook, la tendance est encore plus claire. Les 12 sites les plus libéraux ont en moyenne augmenté de 0,21 % – le nouvel algorithme n’a donc pas impacté leur trafic. Les 11 sites « centristes » ont vu une augmentation significative de 12,81 %. Et les 12 sites les plus conservateurs ont perdu en moyenne 27,06 % de leur trafic
 

Facebook, plate-forme neutre ? !

 
En creusant un peu plus, on s’aperçoit que parmi les libéraux, certains titres comme les très gauchistes Washington Post et Huffington Post ont bénéficié d’une croissance à deux chiffres, et que CNN a vu son trafic augmenter de 43,78 % ! Et si l’on retire FoxNews du groupe des conservateurs (le seul à avoir bénéficié d’une croissance significative), la baisse moyenne chez les media de droite atteint 32,4 %…
 
Sur la base de cette analyse, il est clair que les sites d’information libéraux sont plus souvent promus dans les fils de nouvelles des utilisateurs de Facebook que les sites conservateurs. L’impact est social mais aussi évidemment économique : certains vont devoir réduire leur rédaction, d’autres pourront fermer, ce qui à terme aura une influence certaine dans le domaine électoral, dominé par le la sacro-sainte information – ou désinformation…
 
Cela ne doit pas étonner. Campbell Brown, ancienne présentatrice de CNN, qui dirige maintenant l’équipe des partenariats de Facebook a récemment déclaré, dans une conférence sur la technologie et l’édition, que l‘entreprise avait mis l’accent sur quelque chose qu’elle n’avait jamais fait auparavant : « Avoir un point de vue et se pencher sur des nouvelles de qualité – et leur donner un coup de pouce ».
 
Neutralité ? Que nenni.
 

« Le réseau social est environ 200 fois plus précieux que le Times » (wired.com)

 
En introduisant un changement majeur dans son algorithme de flux de nouvelles, Facebook a peut-être privilégié les messages des amis, de la famille, des groupes… Mais il en a tiré à la fois un potentiel et un prétexte pour prendre la main sur la diffusion des media via son réseau – aujourd’hui essentiel pour leur succès, voire leur survie.
 
Même l’audience du président américain en a subi les conséquences. Selon les données de NewsWhip, société d’analyse des médias sociaux de premier plan, l’engagement sur les messages Facebook de Donald Trump a baissé d’environ 45 % avec le nouvel algorithme ! Bernie Sanders ne semble pas avoir subi de baisse comparable…
 
L’hygiénisme de l’information, c’est comme celui de la consommation : moins manger et mieux. Ce faisant, Facebook a changé son statut ou plutôt l’a épaissi : c’est aujourd’hui autant une plate-forme qu’un éditeur de média.
 

Facebook devait s’engager

 
Une initiative personnelle de Zuckerberg ? Il ne semble pas qu’il en soit le rigoureux promoteur originel. Depuis un certain temps, la pression s’accumulait sur la plate-forme, royaume de possibilités pour les informations de tout acabit – ou presque.
 
Elle a été accusée d’avoir aidé Trump à gagner l’élection en laissant se répandre la « propagande » russe. Il y a quatre jours encore, en marge d’une session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, un expert a dénoncé le rôle « déterminant » du réseau dans la montée de la violence contre les musulmans rohingya.
 
« Vous avez créé ces plates-formes et maintenant elles sont mal utilisées. C’est vous qui devez faire quelque chose … ou nous le ferons à votre place » avait lancé début décembre la sénatrice démocrate Dianne Feinstein.
 
La responsabilité dans ce monde post-moderne repose sur la soi-disant « neutralité » qui est en réalité un engagement de premier plan – et pas dans le bon sens.
 

Clémentine Jallais