Après la tempête est un drame nippon contemporain, une forme de chronique de famille et, hélas, de famille éclatée. Tout en s’inscrivant dans un cadre japonais très particulier, il évoque un problème sociétal général dans les sociétés dites modernes : les divorces, avec remariages, et la fondation de « familles » dites recomposées, et ce du vivant du premier conjoint. Il en résulte des situations pénibles, particulièrement pour les enfants, et fausses. Et ceci est toujours vrai, c’est un des grands intérêts d’Après la tempête, même dans le cas d’un mari et père plutôt mauvais sujet, qu’une sagesse humaine universelle pourrait a priori facilement condamner. Ecrivain peu persévérant, espoir littéraire qui n’a jamais concrétisé ses vastes ambitions balzaciennes, vicieux, joueur compulsif qui perd des sommes importantes, il y a en effet de quoi voir en lui un mauvais mari et père. Il vit en espionnant les gens, comme détective privé.
Après la tempête, un bon film, qui émeut souvent
Pourtant, il n’est pas foncièrement mauvais et se rend compte, après le divorce, qu’il aime sa femme et son fils. Or, son épouse divorcée ne veut absolument plus de lui et envisage donc de se remarier avec un travailleur sérieux, cadre dans une entreprise immobilière. Elle consent tout juste à ce qu’il voit une fois par mois son fils, tout en menaçant de lui ôter ce rendez-vous régulier – et rare -, en invoquant les arriérés considérables de pensions alimentaires. En effet, le joueur compulsif dépense systématiquement toute somme d’argent qui passe entre ses mains. Autre intérêt du film, ce vice est bien décrit. Il a pourtant des rentrées d’argent sinon considérables, du moins à peu près régulières, en faisant racheter par les espionnés de son travail de détective privé, souvent des conjoints volages ou des lycéens trop absentéistes, les photographies compromettantes des commanditaires. Ces scènes permettent aussi d’insuffler un peu d’humour dans un sujet peu joyeux.
Après la tempête se concentre sur un épisode particulier d’un drame que le spectateur devine s’étaler sur des années : l’arrivée d’une tempête tropicale sur la grande île méridionale de Kyushu. La grand-mère paternelle de l’enfant commun s’en est servie comme d’une ruse, prétextant la difficulté évidente de circulation afin de retenir les parents divorcés sous son toit, espérant quelque impossible réconciliation. Est exposée à cette occasion une différence de mentalité de générations : elle avait supportée toute sa vie un mari très comparable, pour le pire, à son fils. L’ex-belle-fille s’y refuse. L’individualisme l’a emporté sur l’esprit de sacrifice et de famille dans les jeunes générations. Il est permis de le regretter, au Japon comme ailleurs.
Après la tempête est un bon film, qui n’ennuie jamais et émeut souvent.
Hector JOVIEN