Canada : la finalité économique de l’aide à mourir en question

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Les morts ne coûtent rien. Alors que se profile la légalisation de « l’aide à mourir » en France, les chiffres qui viennent du Canada où « l’aide médicale à mourir » (MMA, ou MAiD en anglais) a été introduite en 2016 montre à quelle point cette solution – finale – est économique. Rêvée même, lorsque les populations sont vieillissantes et que la proportion des actifs diminue par rapport au retraités à la santé forcément déclinante : non seulement il faut financer leurs pensions mais encore supporter le coût des soins souvent de plus en plus onéreux en fin de vie. La tarification de l’euthanasie est une vraie leçon de choses.

C’est en Colombie-Britannique que le ministère de la Santé a consenti à répondre à certaines questions du média catholique local, The B.C. Catholic, comme le prévoit la loi sur l’accès à l’information, le Freedom of Information Act. Interrogé sur le coût de l’euthanasie et sur les économies que celle-ci représente pour le système de santé de la province, le ministère n’a pour l’heure donné qu’une réponse partielle.

Les médecins de British Columbia reçoivent 283,85 dollars canadiens exactement par euthanasie, cette modique somme couvrant à la fois « la préparation de l’événement » et la « procédure » elle-même. Soit un peu plus de 190 euros.

 

Aide à mourir : la solution finale est aussi économique

La somme est ventilée parmi six actes, qui vont de l’évaluation et de la prescription de l’euthanasie (43,24 dollars) à la récupération et au retour du « médicament » utilisé. Ils ont de ces pudeurs… Il s’agit, naturellement, du poison mortel légalement administré.

Le journal souligne que le ministère n’a pas voulu révéler le coût annuel de MAiD ; en particulier, on ne saura quel est le coût annuel au niveau de la province du poison euthanasique, l’injection de 10 ml de bromure de rocuronium notamment, utilisé pour faire mourir le patient de suffocation et qui est remboursé à 100 %.

Le ministère n’a pas davantage donné de précision sur les économies réalisées par le système de santé qui n’a pas à supporter les frais de l’équivalent canadien de l’EHPAD et des thérapies diverses qu’auraient entraînés une vie plus longue. Cette question est posée sans succès par The B.C. Catholic depuis décembre 2022.

Devant ce mutisme, le journal a déposé le 9 mars dernier une demande formelle au titre du Freedom of Infomation Act, en requérant la communication de toutes les analyses financières réalisées par le gouvernement provincial avant la légalisation de 2016, et aussi celle qui ont précédé l’extension de la loi en 2020, date à laquelle l’accès à l’euthanasie a été autorisé pour des personnes dont la mort n’est pas imminente. Le journal a également requis la communication de toutes autres analyses relatives à la mise en œuvre de l’euthanasie depuis 2016.

 

Le Canada ne cesse d’élargir l’accès à l’aide à mourir

Pour Alex Schadenberg (Euthanasia Prevention Coalition), il ne faut pas s’attendre à ce qu’il y ait au Canada des personnes assez « grossières » pour affirmer qu’elles soutiennent l’euthanasie légale parce que celle-ci permet d’épargner des frais liés à la vieillesse ou à la maladie. « Mais cette réalité existe en même temps : elle permet d’économiser beaucoup d’argent, et beaucoup de gens savent que l’euthanasie représente des économies. Le simple fait qu’ils refusent de le dire ne signifie pas que cela n’est pas vrai », a-t-il rappelé.

Tous ne se sont pas tus. Au niveau fédéral, le Bureau du directeur parlementaire du budget annonçait dans un rapport rendu public en octobre 2020 que selon ses estimations, la mise en œuvre de MAiD permettrait d’économiser 86,9 millions de dollars canadiens (près de 60 millions d’euros) au niveau national en 2021, soit 109,2 millions de réduction de coûts bruts, moins 22,3 millions de frais d’administration. L’organisme s’était vu contraint de révéler le rapport à la suite d’une demande d’information déposée par un sénateur.

Ces chiffres ont-ils été confirmés par la suite ? On sait seulement qu’il y a finalement eu 10.064 « assistances à mourir » au Canada en 2021 (un chiffre en hausse de plus de 30 % en 2022, avec 13.241 euthanasies, dont 2,515 en Colombie Britannique). Ces statistiques sont en hausse constante et importante.

 

L’aide à mourir provoque « l’anxiété » des soignants au Canada

The B.C. Catholic avait déjà déposé une autre demande d’information formelle au sujet de l’euthanasie en 2020, après avoir reçu des témoignages de patients qui se plaignaient d’être « harcelés » en vue d’accepter une assistance médicale à mourir. L’Autorité sanitaire de Fraser – l’une des cinq que compte la province – avait été contrainte de communiquer des centaines de pages de documents, dont la plupart n’avaient pas été rendus publics, montrant que l’aide à mourir est censé être un processus dirigé par le patient, que les médecins de haut grade se sont opposés à sa mise en œuvre dans les services de soins palliatifs et que l’introduction de MAiD a suscité une anxiété morale très répandue au sein du personnel. Cette souffrance du personnel n’avait fait l’objet d’aucune publicité et aucun document n’atteste de mesures prises à cet égard.

L’encouragement à choisir l’euthanasie, lui, s’est installé dans le paysage, comme le rapportait récemment Clémentine Jallais.

Que les soignants rechignent à donner la mort est une bonne nouvelle : il y a un reste de conscience droite. Que les autorités passent cela sous silence montre à quel point l’idéologie de la mort, et sans doute aussi les considérations budgétaires, sont puissantes.

 

Jeanne Smits