Notre confrère The Conversation se targue de conjuguer « l’expertise universitaire » à « l’exigence journalistique » : c’est donc avec attention que nous avons lu son papier au titre prometteur « Surmortalité due au COVID-19 : de très forts contrastes régionaux en Europe ». Il rappelle la perte d’espérance de vie mondiale entre 2019 et 2021, s’étend longuement sur le travail fourni par la rédaction et sa méthode, conclut que l’Europe de l’est a été particulièrement touchée, et fournit surtout deux cartes, l’une de 2020, l’autre de 2021, mesurant région par région la perte (ou le gain) d’espérance de vie durant ce laps de temps, dans chacune des 560 régions étudiées, le tout exprimé par des couleurs : du grenat foncé (perte d’espérance de vie de plus de deux ans et demi), au pêche très clair (six mois ou moins) et au bleu (gain d’espérance de vie). Un fait saute aux yeux : le bleu est assez présent en 2020 sur la côte atlantique française et en 2021 sur la côte nord de l’Espagne, où le vent de mer est bon et où l’on peut s’échapper aux miasmes du confinement. Et il est très présent en Suède, où il n’y a pas eu de confinement. Or, assez bizarrement, le mot Suède n’est écrit qu’une fois dans ce long papier, pour signaler que, dans l’est du pays, en 2020, il y a eu des pertes « impressionnantes ». Et il est vrai d’ailleurs, que, dans deux sous-régions, il y a une perte d’espérance de vie d’un an. Mais c’est limité et d’ailleurs compensé en 2021 par des gains plus importants. Pour un esprit non prévenu, le commentaire de The Conversation, en opposition radicale avec les données de la carte, est dû à l’esprit de système : il faut masquer à tout prix que la politique de non-confinement de la Suède, incontestablement judicieuse sur le plan économique et sociale, a eu également un effet bénéfique sur la santé publique. Et il faut aussi détourner le lecteur d’une mauvaise pensée : à l’inverse, la politique de confinement, catastrophe socio-économique, fut aussi un désastre médical. On ne critique pas plus le dogme du covid que celui du réchauffement du climat par l’homme. Même quand on publie les cartes qui le démystifient. Ou peut-être précisément pour pouvoir les publier.