La militante écologiste Laura Morosini vient de publier une tribune dans Reporterre, site qui prône ouvertement la décroissance, intitulée « Catholiques, nous sommes pour une conversion écologique radicale ». Directrice Europe du Mouvement Laudato Si’, organisatrice des Assises chrétiennes de l’écologie, auteur de S’engager pour le climat, secrétaire générale du label « Eglise verte », Fondatrice de Chrétiens unis pour la Terre, c’est une très ancienne activiste de l’écologisme, elle fut porte-parole des « Amis de la Terre-France » dès 2002 et coordinatrice du Plan climat de Paris : multi-casquettes, elle pratique le travail d’influence en réseau infatigablement, intervenant par exemple aux journées d’été d’EELV en 2020 ou donnant des conférences dans des paroisses, à Saint Eustache par exemple. Promue par des publications telles que La Croix et La Vie, c’est l’une des figures féminines du progressisme attachées à donner à l’Eglise qui est en France un visage résolument arc-en-ciel, sur les pas du pape François.
Les catholiques et les nouveaux péchés de l’écologisme
Selon La Vie, « A la tête des Chrétiens unis pour la Terre, elle prêche la conversion de nos styles de vie dans l’Eglise et dans le monde ». Elle partage « son expérience dans l’accompagnement des collectivités, petites ou grandes, qui souhaitent s’orienter vers une conversion écologique ». Selon elle, « Le label Eglise Verte a pour objectif d’aider les paroisses à vivre plus en harmonie avec la création, d’écouter le message de Laudato si’ et de mobiliser l’ensemble de la communauté paroissiale sur l’enjeu de la conversion écologique ». Elle prône l’écologie intégrale : « C’est à cette conversion totale qu’appelait le pape François dans l’encyclique Laudato Si’. Par cette lettre aux fidèles, le successeur de Pierre invitait à une lecture radicale de l’Evangile pour faire converger les combats écologique et spirituel. » Et cela implique logiquement un nouveau catéchisme : « Quand, par notre action, on supprime les conditions de vie d’autres personnes ou de beaucoup d’être vivants, ça a quelque chose de l’ordre d’un péché grave. C’est une chose sur laquelle on peut changer, l’atteinte à la Création est une atteinte à l’humanité. » Bénir un couple homosexuel est bien, rouler au diesel est un péché grave.
François pontife de l’écologisme radical
Sa tribune dans Reporterre est intéressante à plus d’un titre. Elle y affirme sa préoccupation majeure, la politique. Et désigne l’ennemi, ou plutôt les ennemis : il faut « s’inquiéter légitimement qu’une partie des personnes qui se disent catholiques opte pour des partis xénophobes et climato-immobiles, voire climatosceptiques ». En clair : si vous ne croyez pas aux bienfaits de l’invasion et au réchauffement du climat par l’homme, vous n’êtes pas vraiment catholique. Elle enchaîne sur le cœur de la pensée du Souverain Pontife : « En 2015, le pape François publiait un ouvrage fondamental, le premier consacré uniquement à l’écologie au sein de l’Eglise catholique : Laudato si’. Il appelle à une conversion écologique radicale dans un “appel urgent” à prendre “soin de notre maison commune”, faisant un lien fondamental entre la question écologique et la question sociale (“Il n’y pas plusieurs crises, mais une seule crise” car “tout est lié”) et en s’adressant à “toutes les personnes de bonne volonté”, donc pas seulement à la hiérarchie ou aux catholiques, pour agir dans le “dialogue” ». Ici se trouve expliqué ce que François appelle « todos », tous, et qui ne s’applique pas aux catholiques traditionnels : tous ceux qui sont d’accord avec son projet politique, dont l’écologie est un vecteur important.
Les voies de l’arc-en-ciel ne sont pas impénétrables
Laura Morosini relève ensuite d’autres vecteurs importants de la révolution arc-en-ciel menée par le pape dans l’église : « Il a également été très clair sur le devoir d’accueil des migrants. Une sculpture en hommage aux exilés est d’ailleurs apparue sur la place Saint-Pierre en 2019, unique innovation en ces lieux depuis des siècles. » Et revenant à Laudato Si’, elle indique pourquoi selon elle l’écologisme est le meilleur fédérateur de l’arc-en-ciel : l’encyclique « s’appuyait sur nombre de déclarations et réflexions issues essentiellement des pays du Sud global : d’Afrique vient l’idée de s’attaquer aux systèmes politiques et économiques et pas seulement aux “choix” individuels ; d’Amérique du Sud, l’importance de soutenir les peuples autochtones, meilleurs gardiens de la biodiversité ». De là l’amour du pape pour la Pachamama et la grande croix pectorale arc-en-ciel qu’il a portée en honneur de sa chère Amazonie et à ses peuples gardiens du nouveau paradis sur terre.
La conversion à l’écologisme a sa bureaucratie
Suivent quelques paragraphes sur le détail de plusieurs combats contre l’énergie fossile, puis vient une sorte de bilan d’apparatchik un peu long et barbant mais utile à montrer comment fonctionnent les bureaucrates de la révolution arc-en-ciel : « En Europe, sept des principales structures catholiques (CIDSE, Caritas, Secours catholique) ont construit la coalition European Laudato si’ Alliance, qui intègre aussi la Comece (représentation des conférences des évêques européens à Bruxelles) pour converger sur l’écologie. Ensemble, ils ont décidé de faire appel à cinq universités pour réaliser un état des lieux de l’avancée de l’écologie chez les catholiques européens, état des lieux présenté lundi 20 mai. Elle a révélé un foisonnement insoupçonné d’initiatives : 280 organisations, réparties sur vingt pays européens, y ont participé. On peut ainsi constater que Laudato si’ a eu un impact sur 95 % des organisations répondantes et que 36 % ont profondément modifié leurs manières de faire. » Tout cela est pensé et suivi dans le détail.
Nouveaux catholiques, péché énergétique et pèlerinage climat
La suite montre comment cette agitation politique en réseau produit la révolution dans l’Eglise, à la fois dans la foi et dans le culte : « En Europe, inspirées par le Mouvement Laudato si’, plus de soixante-dix structures ont décidé de sortir leur épargne des combustibles fossiles. Elles envoient ainsi un message fort : le soutien aux énergies fossiles est un problème éthique grave, au même titre, par exemple, que le commerce des armes, déjà exclu de l’épargne des congrégations religieuses. » De même que les « droits à », les nouveaux « péchés sociaux » sont des marqueurs sûrs de la révolution en marche. Et voilà, sur les traces de Greta Thunberg, la nouvelle piété populaire que recommande Laura Morosini : « Sur le terrain, on voit des processions avec une Madone du climat aux Pays-Bas, du maraîchage bio dans les monastères, la bénédiction par des évêques des chrétiens partant en manifestation écolo à Bruxelles, des pèlerinages à vélo. » Voilà qui change de Chartres !
Quand l’arc-en-ciel profane l’Ecriture
Bien sûr, l’œcuménisme trouve sa place dans cette praxis : l’étude montre aussi que les actions écologiques sont une occasion de coopérer avec d’autres religions ou avec des structures de la société civile dans 81 % des cas. Ceci est assez évident lorsqu’on observe les initiatives Eglise verte en France, où fleurissent les jardins partagés ouverts sur les quartiers, les ateliers de réparation de vélos, les initiatives « zéro déchet ». Un peu de publicité pour sa paroisse ne nuit pas !
Et la fin montre à la fois l’obsession politique qui anime la démarche et la tranquillité avec laquelle une idéologue arc-en-ciel bien introduite dans la presse encore dite catholique et soutenue à Rome détourne l’Ecriture : « Certains groupes, comme Chrétiens unis pour la Terre ou Lutte et Contemplation sont également présents dans les marches climat, sur des luttes de terrains (de Notre-Dame-des-Landes à Sainte-Soline ou à Green Dock) mais aussi osent défier les puissants comme TotalEnergies, appliquant le verset biblique “Il a renversé les puissants de leurs trônes, il a élevé les humbles” (Luc 1:52), en multipliant les veillées, jeûnes et cercles de silence face à l’entreprise qui promeut encore des bombes climatiques, comme Eacop. » Ce type de tribune a le mérite de montrer comment avance la révolution, tranquillement, à visage découvert, avec la bénédiction des institutions qu’elle a pour objet de détruire.