Selon Paul Mozdziak, professeur des sciences de la volaille (ça existe ! en attendant les sciences de la dinde) à la North Carolina State University, la première dinde de Noël élevée en laboratoire ornera nos tables de fête dans moins de 15 ans, en 2030. A pareille époque, la viande poussera » dans des barriques de près de 19.000 litres alors que l’agriculture d’usine aura été remplacée par « l’agriculture cellulaire ».
Cette nouvelle viande, qui n’a rien à voir avec les téléphones portables et tout avec les nouvelles biotechnologies, ne sera pas plus chère et peut-être même meilleure marché que celle poussant sur de vulgaires squelettes, prédit le professeur. Le calcul est simple : pour la nourrir », le système sera nettement plus efficace, puisqu’il ne sera plus nécessaire de faire pousser des os. Il faut simplement qu’il soit affiné et bien mis au point.
La dinde de Noël qui pousse “in vitro”
Écologistes, environnementalistes et défenseurs des droits des animaux sont ravis de cette perspective futuriste puisqu’on pourra se contenter de fabriquer des blancs de poulet ou de la viande de patte in vitro en émettant moins de dioxyde de carbone : cela représenterait une baisse de 90 % des émissions actuelles. Et même les végétariens seraient prêts à manger une côtelette fabriquée sans intervention de l’animal.
Le système consiste à récupérer des cellules souches musculaires sur une parcelle de viande que l’on place dans une « soupe » faite de sucre et d’acides aminés de manière à les tromper », pour qu’elles continuent de pousser comme si elles étaient encore à l’intérieur de l’animal concerné. Une seule cellule peut subir 75 « générations » de divisions sur trois mois, produisant en théorie suffisamment de muscle pour fabriquer 20.000 milliards de nuggets de dinde…
La viande de laboratoire au nom du réchauffement climatique
Pour l’heure, le système reste extrêmement cher et compliqué. Le premier hamburger in vitro a mis trois mois à pousser, pour la modique somme de 220.000 livres sterling. Le laboratoire de Mozdziak devrait dépenser actuellement plus de 20.000 livres en sérum de croissance pour obtenir un morceau de viande de la taille d’une dinde. Aussi travaille-t-il actuellement avec un ingénieur biomédical pour améliorer le processus de croissance en 3D, avec l’espoir de faire baisser les coûts.
On imagine que le budget de communication pour faire vendre de la viande de volaille carrée et sans os sera lui aussi considérable.
Avec le temps, on peut même prédire – si ce mauvais rêve devient réalité – que les dindes, chapons et autres poulets de Bresse qui marquent les repas de famille les plus festifs seront réservés à une élite choisie, les autres étant priés de se sacrifier « pour la planète ».
Anne Dolhein