A Issoire, en plein massif central, on n’a plus le droit d’affirmer sa fierté d’être français. Pour la rentrée, l’opposition de gauche a décidé de s’en prendre au maire Bertrand Barraud, élu l’année dernière sur la liste de ce qui s’appelait encore l’UMP. Elle lui reproche, tout à trac, de s’accaparer le bilan des autres. Et ses « dérives très droitières ».
Quand on parle bilan, on parle surtout argent. Et on fait en sorte de recadrer le discours du premier magistrat de la commune. « Quand M. Barraud parle “d’un nouveau dynamisme”, on rêve. Issoire a toujours été dynamique. Il n’est pas à l’origine de tout. On a l’impression qu’avant lui, il n’y avait rien. Il est très bon en com’. Il hurle, par exemple, au niveau départemental contre la baisse des aides aux associations, alors qu’à Issoire il les cisaille de 15 % en trois ans. C’est de l’hypocrisie politique, comme pour les boulevards extérieurs. Leur réfection ne commence pas avec lui, on avait fait le plus gros du travail. »
On n’a plus le droit d’affirmer sa fierté d’être français
C’est tout le jeu des campagnes électorales de s’attribuer le mérite de ce qui se fait de bien contre ses adversaires politiques. Le principe est universel, et Issoire ne fait pas exception. On n’y peut voir que la conséquence de cette alternance, dont on nous rebat pourtant les oreilles pour nous signifier qu’elle serait, en quelque sorte, la base même de la démocratie. Sans se rendre compte que, en haut de l’échelle si l’on peut dire, à Bruxelles, on rigole…
Mais cette attaque permet tout de même de passer, ensuite, la vitesse supérieure. Bertrand Barraud est en pleine dérive droitière. Le reproche, pour quelqu’un qui a été élu sur une liste UMP, peut paraître original. Mais il faut bien comprendre que ses « dérives » – le pluriel, c’est tellement plus convaincant – sont « très » droitières.
Pour ceux qui n’auraient pas compris, l’opposition se donne la peine de préciser : « Sa majorité avait applaudi le discours de Dominique Morel (ex-FN) lors de l’installation du Conseil. Ensuite, sa gestion des gens du voyage est intolérable. À l’ouverture du Fifi [le Festival International de Folklore d’Issoire], il a réussi, dans son discours, à passer un slogan proche de l’extrême droite : “Nous sommes fiers d’être Français”. Et maintenant, on se dirige vers des caméras de surveillance. Personne n’est dupe. Ce dossier a été préparé dans l’urgence et s’il est présenté au conseil de jeudi, c’est qu’il y a les régionales en décembre. Il reprend les thèses de l’extrême droite, uniquement à des fins électoralistes. »
L’opposition issoirienne vent debout contre l’extrémisme (si ! si !)
Voilà où se niche l’extrémisme : dans la fierté d’être français.
Apparemment, à Issoire, la gauche n’a jamais entendu François Hollande vanter certaines entreprises, certains produits français.
Elle n’a jamais prêté attention non plus à ce qui peut se passer à proximité. Lorsque, à la mi-juin dernier, 59 étrangers – « des quatre continents », précisait l’édition locale de La Montagne – ont été naturalisés, et sont donc devenus français, un journaliste a interrogé Nadia et Bensaber Benabed, frère et sœur de 14 et 16 ans sur cet événement. Et la jeune fille a répondu : « Nous sommes nés en France et avons la double nationalité algérienne et française. Nous avons fait la demande il y a à peu près un an, cela s’est fait rapidement. Nous sommes fiers d’être Français et d’avoir plus de droits à présent. »
Oh là, prenez garde, Mademoiselle, il est dangereux, aujourd’hui, de clamer sa fierté d’être français.
A moins que… la gauche ne soit pas toujours logique avec elle-même. Personne, en l’occurrence, ne semble avoir protesté.
Et pourtant, pourtant, ces élus de l’opposition issoirienne n’ont pas tout à fait tort. Aujourd’hui où la France s’est donnée un gouvernement de gauche, on lui chante tous les jours la nécessité de la repentance quand on est un vilain Français de souche qui a, de façon congénitale sans doute, forcément quelque chose à se reprocher.
La fierté d’être français ? Pouah ! C’est déjà l’apologie du racisme…