Que nous réserve l’Eglise synodale ? Une révolution, répond le cardinal Cupich

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Pendant que les documents romains se suivent et se chassent l’un l’autre, l’affaire du synode sur la synodalité, un peu oubliée, devrait continuer de nous inquiéter. Les partisans de la démocratisation de l’Eglise ne se reposent pas, en effet : ces derniers jours ont été marqués par des interventions des cardinaux Grech et Cupich, en particulier, appelant de leurs vœux le changement à tous les étages. Le second, cardinal de Chicago, vient ainsi de qualifier le « recadrage » de la synodalité par le pape François de « véritablement révolutionnaire ». C’est bien une révolution moderniste qui est en cours, puisque ce sont ses propres agents qui l’affirment et s’en réjouissent !

Ce « recadrage », pour Blase Cupich – grand ami de la cause LGBT et propagateur de l’idée selon laquelle la liturgie traditionnelle « appauvrit la vie de l’Eglise tout entière » – réside dans la méthodologie de la « conversation dans l’Esprit » qu’il voudrait voir mise en œuvre dans l’ensemble de l’institution. Et d’abord, parce qu’elle est égalitaire.

On ne saura pas si messieurs les cardinaux synodalistes estiment que l’Esprit a parlé dans le vide pendant des siècles en attendant le nôtre.

 

L’Eglise synodale vue par Cupich, un favori du pape François

S’exprimant le 24 avril à la Sacred Heart University à Fairfield, Connecticut lors d’une « conférence Bergoglio », le cardinal a déclaré que le modèle de discussion en petits groupes, qui se caractérise par le fait que chaque participant prend la parole à tour de rôle tandis que les autres écoutent, par des intervalles de silence et par la possibilité d’un désaccord, est au cœur de l’appel du pape François à « envisager un renouveau de l’Eglise tout entière ».

« Il s’agit d’un nouveau “modèle d’Eglise” qui, je crois, promet d’apporter un renouveau dans la manière dont nous prenons des décisions dans l’Eglise et dont nous sommes en relation les uns avec les autres aux niveaux universel, continental, national et local », a déclaré le cardinal Cupich, pour qui « nous devons tous, quelle que soit notre position dans l’Eglise, partir du principe que l’autorité est multiple et se renforce mutuellement ».

Citant abondamment les propos tenus par le père dominicain Timothy Radcliffe qui avait prêché la retraite pré-synodale au mois d’octobre dernier, le cardinal Cupich a proposé une réforme de la « gouvernance » de l’Eglise fondée sur un processus d’aplanissement de la distinction entre évêques et laïcs – ou pour le dire plus clairement, entre l’Eglise enseignante et l’Eglise enseignée. Il est revenu plusieurs fois au cours de sa conférence sur la réduction des différences entre les évêques et les autres catholiques, clercs ou non d’ailleurs, vantant notamment la méthode retenue lors de la première session romaine du synode sur la synodalité et qui sera reprise en octobre prochain lors du deuxième « round ».

 

La révolution dans Eglise par la « conversation dans l’Esprit »

« Chacun, quelle que soit sa position dans l’Eglise, a donné son prénom et a omis toute référence à un titre. Nous avons commencé sur un pied d’égalité et nous avons reconnu que chacun parle avec autorité », a-t-il ainsi déclaré, insistant pour dire que cette forme de « conversation dans l’Esprit » (mais lequel ?) était l’élément le plus significatif du « recadrage de la synodalité », « rien de moins que révolutionnaire ».

C’était physique : faire asseoir tout le monde autour de tables rondes a bien été un choix délibéré, et cela s’est traduit dans la structure même du vote. Sans surprise, le cardinal Cupich s’est félicité de la grande première de ce synode (qui n’était donc pas un synode des évêques), le droit de vote « égal » accordé aux laïcs qui représentaient un quart de l’assemblée.

Alors que plusieurs évêques et théologiens américains ont publiquement exprimé leur inquiétude à cet égard, Cupich les a disqualifiés d’emblée en les accusant d’avoir « peur de perdre le contrôle », une peur « profondément ancrée dans la psyché des dirigeants de l’Eglise », selon lui.

Mais pour ce qui est de contrôler, il est lui-même champion dans sa gestion de fer de la question liturgique : les catholiques de Chicago qui demandent de bénéficier de la liturgie traditionnelle n’ont pas voix au chapitre.

Il faut préciser que le cardinal Cupich n’avait pas été désigné par la Conférence des évêques des Etats-Unis pour la représenter au synode ; il s’y est rendu sur nomination du pape François après avoir échoué à se faire élire. Synodalité !

 

La révolution de l’Eglise synodale est celle des histoires individuelles, selon le cardinal Grech

Moins d’une semaine après la conférence du cardinal Cupich, c’est le cardinal maltais Mario Grech qui s’est exprimé sur la synodalité en tant que son secrétaire général lors de la Rencontre mondiale des prêtres en vue du synode sur le thème : « Comment être une Eglise locale en mission synodale ». La rencontre réunit quelque 300 prêtres du monde entier du 29 avril au 2 mai à Sacrofano, au nord de Rome, et a pour but de réfléchir à la mise en œuvre du rapport synodal, que nous avons analysé en profondeur ici.

« Le prêtre de paroisse est un homme du peuple, pour le peuple. Comme Jésus, il est ouvert à la foule, constamment ouvert à la foule, pour faire comprendre à tous et à chacun qu’ils sont une lettre envoyée par le Christ », a affirmé le cardinal au cours de ses propos introductifs, lundi matin, ajoutant qu’au centre du processus synodal se trouve la compréhension et le partage de narrations personnelles.

« Nos histoires sont des histoires humaines, mais des histoires humaines où Dieu, Jésus, est présent. Parfois nous avons besoin d’autrui pour nous aider à voir la présence de Dieu dans nos histoires. Voilà notre mission, c’est la mission qui nous est confiée, qui vous est confiée, mes chers frères », a-t-il assuré, et la synodalité ne signifie pas simplement « marcher ensemble, mais plutôt marcher avec Dieu, ou pour le dire mieux, Dieu qui marche avec nous ». Ce qui est dans l’état actuel une manière de ne rien dire, quand on part d’un terreau qui a aussi largement perdu son identité chrétienne, et qui a précisément besoin de croître en connaissance de la foi : une croissance qui demande et qui exige l’autorité.

Cela même qui est aujourd’hui contesté au profit des expériences de chacun…

 

Jeanne Smits