Encore un coup de vieux pour Sapiens

encore coup vieux Sapiens
 

L’Homo sapiens n’arrête pas de vieillir, selon les médias, qui utilisent périodiquement la même expression pour le dire : en 2017, en 2022, et maintenant, ils nous informent que « Sapiens prend un coup de vieux ». Cela veut dire que, selon l’interprétation qu’ils font d’un morceau d’os retrouvé ici ou là, les paléontologues estiment que la première apparition attestée du bipède qu’ils nomment Homo sapiens et qu’ils assimilent à nous doit être repoussée plus loin dans le temps. Mais cette fois c’est différent. Jusqu’à présent, le fragment retrouvé provenait du Maroc, ou d’Ethiopie, bref, de quelque part en Afrique. Cette fois, il s’agit d’un « crâne préhistorique venu de Chine », baptisé « Yunxian 2 » par les spécialistes. Il a été découvert en très mauvais état voilà trente-cinq ans, en 1990, dans une couche géologique datée d’un million d’années, et une équipe en a publié le 25 septembre dans la revue Science une reconstitution remarquable. C’est doublement révolutionnaire. Jusqu’à récemment, on enseignait qu’Homo sapiens et l’homme de Neandertal s’étaient séparés de leur dernier ancêtre commun il y a environ 600.000 ans. Les auteurs de l’étude pensent maintenant que Sapiens serait apparu 400.000 ans plus tôt. Deuxièmement, comme l’explique le Guardian, cela « soulève la possibilité que notre ancêtre commun – et potentiellement le premier Homo sapiens – soit originaire d’Asie plutôt que d’Afrique ». Et là, cela brise le grand récit, le grand mythe selon lequel « nous » serions tous venus d’Afrique. Aussitôt le Washington Post a interviewé Svante Pääbo, paléo-généticien expert des ADN anciens et prix Nobel. Il souligne que, sans analyse du matériel génétique, on ne peut rien conclure. La préhistoire a une fonction politique, et c’est tout le récit actuel de l’humanité qui menace de changer. Cette anecdote montre surtout que cette discipline « scientifique » est éminemment conjecturale : non seulement toute la conception en dépend de découvertes plus ou moins fortuites qui sont ou ne sont pas faites, mais encore les conclusions qu’on en tire varient avec des « reconstitutions » postérieures. Cela ne remet en cause ni la rigueur ni la réflexion des spécialistes, mais cela incite au doute méthodique.