L’euthanasie et le suicide assisté, les vrais problèmes de la loi sur l’« aide à mourir »

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Reprenant assez largement la teneur de la proposition de loi sur la fin de vie déposée à l’Assemblée nationale en janvier 2021 par des députés qu’on entend beaucoup aujourd’hui, comme Olivier Falorni (PS), Frédérique Meunier (LR), Agnès Firmin Le Bodo (Horizons) et d’autres, le projet de loi du gouvernement voulu par Emmanuel Macron pour encadrer la pratique médicale à l’approche de la mort est entré cette semaine dans la phase des discussions de ses articles portant directement sur ce qu’on appelait déjà en 2021 « l’aide à mourir ». C’est un euphémisme en forme d’entourloupe, qui évite soigneusement de nommer ce sur quoi porte en réalité le projet de loi actuellement débattu : l’euthanasie et le suicide assisté. Il est remarquable que ce refus d’appeler les choses par leur nom ne date pas d’aujourd’hui.

La raison ? On ne veut pas rappeler que « l’aide à mourir » cache une réalité contraire à son intitulé : il ne s’agit pas de tendre une main secourable à une personne souffrante qui a besoin d’être soulagée, consolée, rassurée, assistée pour son grand passage vers la vie éternelle, mais de supprimer la vie, de tuer, de manière cliniquement propre et utilitaristement rapide.

 

Euthanasie et suicide assisté en embuscade derrière les soins palliatifs

« L’habillage » du projet si urgent présenté par Gabriel Attal, Catherine Vautrin, ministre de la santé et de son ministre délégué Frédéric Valletoux, en texte soucieux de promouvoir les soins palliatifs, participe de la même logique. Les illusionnistes savent y faire : on détourne le regard, on attire l’attention sur ce qui est secondaire, histoire de faire passer la pilule. Létale…

Mais plutôt que de se focaliser sur la lettre de la loi, il faut évoquer ce qu’elle passe sous silence : la vie éternelle, justement ! De tout temps, l’humanité a considéré la mort comme un cap vers une autre vie, heureuse pour les bons, terrible pour les méchants. A la crainte physique de la souffrance (qui a pris le dessus aujourd’hui dans la loi sur la fin de vie) s’ajoutait de manière généralisée la crainte psychique et spirituelle du jugement, à l’aune d’un code moral certes variable à travers les cultures, mais qui sous sa forme naturelle s’exprime le plus exactement dans le Décalogue, véritable feuille de route pour chaque être humain.

Cette crainte a disparu en même temps que la montée de l’athéisme et de l’irreligion : l’oubli de Dieu est nécessaire pour en arriver à réclamer une « autonomie » totale de la personne au point qu’elle puisse « choisir » sa mort…

 

L’« aide à mourir » n’aide personne au seuil de l’éternité

Mais voilà encore une entourloupe, un langage truqué : l’autonomie revendiquée à travers le droit de se faire euthanasier ou de se faire fournir les moyens est en fait une créance opposée à la société, que l’on rend redevable de l’accès à la mort qu’on veut obtenir.

L’oubli de Dieu permet l’émergence de projets comme celui dont Emmanuel Macron s’est fait le promoteur et le garant, mais il fait pire : il organise le court-circuitage du spirituel à travers la marche forcée vers l’élimination d’êtres humains sur commande.

Et ce court-circuitage est double : d’une part, il concerne le médecin, l’infirmier ou le proche qui sera chargé (ainsi le prévoit le projet de loi) de tendre le poison ou d’injecter la substance de mort, en l’incitant à commettre le crime d’assassinat dont la nature ne change pas parce que la victime serait consentante. Mais la conscience des gens, et surtout du personnel médical, ne pèse plus guère : s’il est prévu une clause de conscience, celle-ci oblige de toute façon chacun à la complicité :

« Le professionnel de santé qui ne souhaite pas participer à la mise en œuvre de ces dispositions doit informer, sans délai, la personne de son refus et lui communiquer le nom de professionnels de santé susceptibles d’y participer. »

Bref, fournir le nom et les coordonnées de celui qui sera prêt à passer à l’acte. Cela va loin : comme une obligation de mettre un client en rapport avec un sicaire complaisant et un peu fou de la gâchette. La responsabilité morale des uns et des autres est dès lors tout sauf nulle. Que devient une société où les médecins sont payés pour tuer ?

 

Euthanasie et suicide assisté pour mieux voler la mort

D’autre part, le court-circuitage concerne le candidat à la mort lui-même : d’abord, la mort choisie contredit directement l’obligation grave qui est la sienne de respecter toute vie humaine – y compris la sienne, et le voilà donc qui entre dans l’éternité avec cette lourde faute dans l’âme… Mais par la rapidité de l’exécution (à cet égard le projet de loi français est particulièrement expéditif, l’affaire pouvant être bouclée en quelques semaines entre la demande auprès du médecin et « l’aide à mourir » effective), la procédure prive de cette lente montée vers la mort qui est en réalité une bénédiction. De la mort subite, préservez-nous, Seigneur ! La mort au terme d’une maladie qui offre un temps pour faire la paix avec Dieu et avec ses proches, voilà ce dont cette loi de mort prive ses prétendus bénéficiaires.

On dira que la mort « choisie » est prévisible, et permet la même sorte de démarche. Mais non : elle part d’une révolte contre la vie qui nous est donnée ; elle est une manière de dire aux proches que leur peine de voir un être aimé choisir de s’en aller n’a aucune valeur ni importance.

 

La fin de vie la plus violente qui soit

En fait, tout cela est d’une violence sans nom, d’une violence qui se fait passer pour humanité, douceur et compréhension, et personne n’en sortira indemne.

Dire, cependant, que nous sommes au seuil d’une révolution sociétale en France, d’un changement anthropologique inscrit dans la loi, n’est exact qu’à moitié. Le « point de bascule », comme ils disent, s’est produit avec la légalisation de l’avortement, il y a 50 ans. 10 millions de victimes plus tard, on ne peut pas dire que la France découvre la mise à mort légale des innocents.

A force de l’avoir tu, les politiques ont déjà ouvert la porte à l’euthanasie avec la loi de 1975. Il suffisait d’attendre…

 

Jeanne Smits