C’est le monde à l’envers… Alors que l’Union européenne demande depuis des mois à la Turquie de ne pas laisser passer les migrants vers l’ouest, qu’Angela Merkel est justement à Ankara pour repréciser les termes de cet accord, notamment dans son aspect sonnant et trébuchant, voilà que son homologue turc lance un appel à l’aide, en expliquant que son pays ne pourra pas supporter seul la charge de l’actuel flux de migrants.
La Turquie redoute que les combats en cours autour de la ville syrienne d’Alep provoquent un nouvel afflux de réfugiés, a déclaré lundi soir le vice-premier ministre Numan Kurtulmus à l’issue d’un conseil des ministres. Il faut dire que le péril n’est pas mince, puisque les migrants à venir pourraient atteindre le nombre de 600.000, et qu’Ankara ne voit pas comment elle pourrait laisser se presser à ses frontières, de nouvelles masses incontrôlables.
Face au flux de migrants, la Turquie débordée
Evidemment, il y a un coupable, que tout le monde s’empresse de montrer du doigt : le président syrien Bachar el-Assad, et son allié russe.
C’est bien facile. Mais les réels fauteurs de troubles, ce sont les politiques insanes qui ont prétendu imposer l’idéologie démocratique dans toute cette région, et y ont déclenché, en lieu et place, des guerres à n’en plus finir. On pourrait d’ailleurs chercher, sous le prétexte démocratique, un certain nombre de raisons économiques. Nos politiques seraient donc bien inspirés de balayer devant leur porte avant que leur politique d’apprentis sorciers ne provoque une déflagration générale…
En attendant, la Turquie lâche pieds… Evidemment, la bataille d’Alep ne ferait pas bouger autant de monde, le nombre donné étant une perspective plus générale de la situation actuelle en Syrie.
Néanmoins, les Turcs estiment l’actuelle bataille dramatique pour leur équilibre. « En conséquence de cette situation, nous observons que 200.000 personnes sont forcées à l’exode, dont 65.000 en direction de la Turquie et 135.000 à l’intérieur de la Syrie », déclare Numan Kurtulmus.
On estime qu’environ 30.000 d’entre eux, pour l’essentiel des femmes et des enfants, se pressent déjà, dans des conditions que l’on imagine, devant le poste-frontière turc d’Oncupinar, actuellement fermé par les Turcs.
Ankara appelle à l’aide
« Notre objectif pour l’instant est de maintenir autant que possible cette vague de migrants au-delà des frontières de la Turquie, et de leur fournir à cet endroit les services nécessaires », explique encore le vice-premier ministre.
Certes, les autorités turques vont répétant qu’il n’est pas question de changer de politique. « Evidemment, comme toujours, nous allons subvenir aux besoins de nos frères syriens et les accepter quand ce sera nécessaire », a réaffirmé lundi le premier ministre Ahmet Davutoglu à l’issue d’un entretien avec Angela Merkel.
Et pour cause, puisque celle-ci vient réaffirmer le contrat qui, pour la Turquie, représente un pactole en milliards, et des facilités sur les visas.
Néanmoins, la situation devenant très délicate, le premier ministre turc a clairement prévenu que son pays, qui abrite déjà 2,7 millions de migrants, ne supporterait pas seul tout le fardeau de l’accueil des réfugiés.
Toujours les mêmes perdants
C’est un peu l’idée d’avoir le beurre et l’argent du beurre. Mais cela n’a rien de très étonnant. Lors des discussions sur cette question, le président Erdogan avait laissé entendre à plusieurs reprises que, si les européens n’acceptaient pas ses conditions, les migrants risquaient de continuer leur marche à l’ouest.
A ce petit jeu donc, nous serons toujours perdants. Car, au-delà de la menace, qui pourra accuser la Turquie d’avoir été submergée par le flux de millions de migrants ?
François le Luc
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