Bien que la semaine de Noël ne soit pas la plus propice aux sarcasmes, la formation du gouvernement Bayrou a excité les réseaux sociaux tant il rassemble de personnalités représentatives d’un système politique qui a échoué et agace les Français. La plus grande part de la classe politique les rejoint dans leur critique. Bayrou ne semble pas avoir réussi à séduire les socialistes et paraît laisser de plus en plus de Républicains sceptiques. Et-en-même-temps, il a froissé Emmanuel Macron en s’imposant à lui lors de l’entretien qui a précédé sa propre nomination. Sa position est donc extrêmement fragile et laisse prévoir une pratique du pouvoir inédite sous la cinquième république. Certains n’hésitant pas à dire que cela durera moins longtemps que Barnier. Même si l’on ne partage pas ce pronostic, on doit reconnaître que la réalité inextricable où se débattent le nouveau Premier ministre et le président découle de la mission impossible qu’ils se sont eux-mêmes donnés contre la volonté des Français. C’est l’obstination mondialiste des élites, dont ils sont les mandataires pleins de zèle, qui rend la crise insoluble.
Bayrou, inventeur du gouvernement recyclé
Un gouvernement recyclé : 19 ministres sur 35 déjà présents sous Barnier, dont l’inusable Lecornu et l’insubmersible Rachida Dati. Et dans le neuf, rien que de l’ancien. Des éléphants – ou des dinosaures – comme s’il en pleuvait, les Hollandistes antédiluviens Rebsamen et Juliette Méadel. Quant aux poids lourds annoncés, ils font plutôt penser à des boulets. Manuel Valls et-en-même-temps Elisabeth Borne : deux parangons de suffisance technocratique, 29 49-3 à eux deux, avec en prime le ridicule du Catalan, Adios, Vamos a Barcelona, I’ll never come back. En tandem également, Retailleau et-en-même-temps Darmanin (on espère que cela fonctionnera mieux qu’avec Migaud), le nouveau garde des sceaux entend « nettoyer les prisons », même s’il n’a pas parlé de Kärcher, et jure de travailler « main dans la main » avec son collègue de la place Beauvau, cela rappelle un peu les deux Dupondt.
La réalité est que ses adversaires craignent sa chute
Tout cela sent les rafistolages de la IVème République et traduit une réalité politique inquiétante : le fameux « socle » commun sur lequel repose le gouvernement Bayrou s’est réduit depuis l’époque Barnier. Le Premier ministre n’a pas réussi à convaincre les socialistes. Olivier Faure, le premier secrétaire du PS, estime « qu’aucune des conditions » fixées pour un pacte de non censure « n’a été respectée » par Bayrou, et menace : « S’il n’y a pas de changement de cap, il y aura censure. » Laurent Wauquiez, patron des Républicains, dont le concurrent Retailleau est ministre, est presque aussi sévère : « Nous ne nous interdisons pas de retirer notre soutien. » Cette posture leur est imposée : ils ne peuvent soutenir Bayrou alors que son gouvernement est si fragile et si antipathique à leurs militants, et ils ne peuvent le condamner plus nettement avant de connaître ses projets ni son discours de politique générale. Faure redoute sa chute, qui ouvrirait un boulevard à Marine Le Pen et Mélenchon, donc le marginaliserait un peu plus, et Wauquiez craint sa réussite, qui propulserait Retailleau vers la présidentielle. Sa force est sa fragilité.
Ils le critiquent et-en-même-temps ils sont du même camp
Surtout, ni la gauche socialiste ni les Républicains n’ont d’alternative économique et politique à proposer : ils se satisfont de focaliser sur le gouvernement Bayrou la colère et l’ironie populaire. Car la première question est aujourd’hui celle du budget introuvable, sur quoi a déjà buté Barnier, tombé pour n’avoir su qu’augmenter les impôts faute d’avoir su réduire les dépenses. Cette incapacité n’est pas technique, elle est politique, profondément. Si Barnier n’a pas taillé dans la transition écologique, ni dans l’immigration, ni dans la pléthorique fonction publique, c’est par fidélité à l’idéologie de la révolution arc-en-ciel. Or, ni Olivier Faure, ni Laurent Wauquiez ne diffèrent de lui sous ce rapport. Et il en ira très probablement de même pour le gouvernement Bayrou, on va être vite fixé là-dessus, mais la nomination d’Eric Lombard, ancien patron de la Caisse des dépôts et consignation, qui n’est pas de droite, semble l’indiquer. Le fameux Et-en-même-temps d’Emmanuel Macron est la négation du principe de non-contradiction au profit d’un caprice d’un Bébé-Roi qui incarne la volonté de la révolution arc-en-ciel : en réalité, il s’agit d’imposer au peuple le programme mondialiste tout en prétendant demeurer dans un système démocratique alors que la majorité n’en veut pas.
En réalité, le gouvernement Bayrou incarne tout l’arc-en-ciel
On peut ajouter que ni Fabien Roussel, ni Jean-Luc Mélenchon, ni Sandrine Rousseau, ni Marine Tondelier n’ont d’autre but que Bayrou – ils feraient la même chose en pire. Seule Marine Le Pen, qui, loin d’être parfaite, ne couperait pas suffisamment dans les dépenses de l’Etat, notamment la fonction publique, ferait mieux pour la transition écologique et l’immigration. C’est d’ailleurs pourquoi le gouvernement Bayrou pousse la communication du tandem Retailleau-Darmanin : pour couper l’herbe sous le pied du RN. Et-en-même-temps il va lâcher ici et là sur la question sociale, même si cela entraîne un casse-tête financier. C’est le prix à payer pour empêcher le retour d’un gouvernement national. Aussi aucune des forces dites de droite ou de gauche qui peuvent déstabiliser le gouvernement Bayrou n’osera agir, de peur de favoriser le RN. De même Emmanuel Macron attendra-t-il l’heure de se venger de l’impudent Bayrou, qui l’a forcé à le nommer. Voilà pourquoi ce gouvernement, qui fait rire et pleurer tous les Français, risque de durer : c’est l’intérêt de la coalition de tous les mondialistes. A moins que l’un ou l’autre, perdant ses nerfs, n’essaie de jouer personnel. Mais ce serait prendre le risque d’une percée nationale.