FICTION POLITIQUE/DRAME
Un homme d’Etat ♥


 
Un homme d’Etat est un drame français, ou plus exactement une fiction politique. Elle développe une uchronie : elle s’inscrit pleinement dans un monde parallèle, différent du nôtre, mais à bien des égards très semblable. Dans ce monde-miroir, un président usé, fatigué, donné très largement battu dans tous les sondages, et ne passant en aucun cas la première la barre du premier tour en 2017, est de droite. Il y a là une situation fort comparable à celle que nous connaissons actuellement avec le président socialiste François Hollande, donné complètement battu à un an de l’échéance ; on gagnerait toutefois à se méfier des prévisions en politique, car sinon lui, un autre candidat socialiste pourrait bien arriver par surprise au deuxième tour, comme Lionel Jospin le fit en 1995, voire l’emporter en cas de deuxième tour contre « l’extrême-droite ».
 
Ce président de droite sortant s’inquiète. Il est prêt à tout pour ne pas être battu. Le film est à clefs. La plus évidente est la correspondance entre ce président Jean-François Vanier et Nicolas Sarkozy, Jean-François renvoyant probablement à Jean-François Copé. Un autre personnage reconnaissable immédiatement est Rachida Dati, dans un rôle toutefois différent, non celui de ministre ou de personnalité du parti, mais de conseillère de l’ombre du président. A peu près tous les autres personnages peuvent être reconnus des familiers de la chose publique, dont Patrick Buisson. Nous ne proposerons pas la liste ici.
 

Un homme d’Etat : une peinture lucide de certaines coulisses de la politique

 
M. Vanier veut réaliser un grand coup politique, tentant le tout pour le tout, pour conjurer le spectre de cette défaite annoncée. Doit-il risquer un grand pacte politique avec la gauche ou l’extrême-droite ? Il hésite beaucoup, semblant cyniquement disposé tant à un choix qu’à l’autre, privilégiant le plus efficace. Une entente avec l’Alliance Nationale – transposition du FN qui reprend le nom d’un équivalent italien créé dans les années 1990 et aujourd’hui disparu – apporterait plus d’électeurs, mais pourrait effrayer les marchés, contrairement à l’ouverture à gauche. Le grand capital pèse sur les choix politiques, et ne craint donc nullement la gauche institutionnelle …Des conseillers écoutés ont donc fait le choix d’une grande personnalité de gauche à gagner, demi-ours retiré volontairement dans une vaste villa du Sud-Ouest. Le spectateur est heureux de découvrir Auch, belle ville trop peu connue. La vie politique locale, avec le poids du rugby et la franc-maçonnerie, n’est pas a priori mal décrite.
 
Les manipulateurs risquent fort de se faire manipuler par plus habile qu’eux. L’exercice de style fonctionne. On regrettera seulement la morale entendue, de gauche, d’Un homme d’Etat. Et non, le FN, surtout celui d’aujourd’hui, quoi qu’on en pense, ne constitue pas un péril fasciste, extravagance commune formulée encore une fois au premier degré.
 

Hector JOVIEN

 
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