Angela Merkel et Viktor Orbán : deux conceptions de l’immigration et de la juste méthode pour agir humainement se sont affrontées jeudi à Berlin

immigration Merkel Orban
 
Après une rencontre jeudi à Berlin entre Angela Merkel et Viktor Orbán, les deux dirigeants se sont opposés en conférence de presse sur la politique à avoir face à l’immigration illégale et sur la bonne manière de répondre humainement à ce problème. Sur le fond, la conclusion de ce sommet entre le Premier ministre hongrois et le chancelier allemand est un constat de désaccord : la Hongrie continuera de refuser de reprendre les immigrants passés par son territoire. Budapest ne se considère en effet pas comme le premier pays d’entrée de ces immigrants arrivés par la route des Balkans en passant par la Grèce, même si les autorités grecques ont manqué à leurs obligations en omettant de les enregistrer. Cependant, a argumenté Viktor Orbán, « Si vous me permettez de dire une phrase sur la solidarité, cela nous blesse quand l’Allemagne nous accuse de manquer de solidarité ». En effet, a-t-il poursuivi, la Hongrie « soulage l’Allemagne d’un immense fardeau » en surveillant sa frontière méridionale avec la Serbie et la Croatie. Cette frontière équipée d’une double clôture avec caméras et senseurs est gardée en permanence par 8.000 hommes armés. « Nous ne protégeons pas seulement la Hongrie, mais aussi l’Allemagne », a insisté Orbán, faute de quoi l’Allemagne verrait arriver par la Hongrie des milliers d’immigrants illégaux chaque jour, et cela, « c’est de la solidarité », a conclu le chef d’État hongrois.
 

Mütti Merkel, ancienne responsable des jeunesses communistes en RDA, contre Viktor Orbán, homme d’État chrétien et ancien opposant au communisme

 
L’indécrottable Merkel, de plus en plus impopulaire chez elle – contrairement à Orbán chez lui – et affaiblie par sa récente dispute avec son ministre de l’Intérieur Horst Seehofer, a répondu à cela que l’Europe devait certes protéger ses frontières, mais sans devenir « une sorte de forteresse ». Celle qui s’est vu affubler le sobriquet de Mütti Merkel (maman Merkel) quand elle a ouvert les frontières de l’Allemagne aux immigrants illégaux coincés sur la route des Balkans, créant le gigantesque appel d’air qui allait faire venir s’installer plus d’un million d’illégaux chez nos voisins teutons au cours de la seule année 2015, a dans la foulée donné à son homologue hongrois une énième leçon d’humanisme maçonnique : « Je crois – et c’est la différence – que l’âme de l’Europe, c’est la compassion. Et si nous voulons garder notre âme, si l’Europe et ses valeurs veulent réussir dans le monde, alors elle ne doit pas se fermer vis-à-vis de l’extérieur. » Mütti Merkel a encore expliqué : « Le problème pour moi, et c’est la différence entre nous, c’est que nous devons toujours avoir en tête que ce sont des personnes qui viennent chez nous. »
 
L’homme d’Etat hongrois, qui a une tout autre conception de la charge que lui ont confiée ses électeurs, a répondu très justement : « Si nous voulons agir humainement, alors il ne faut pas créer d’appel d’air. Et pour cela, il n’y a qu’une solution : fermer les frontières et apporter de l’aide dans les pays d’origine. » C’est pourquoi la Hongrie reste favorable, ainsi que l’a redit son ministre des Affaires étrangères il y a quelques jours, à ce que les centres d’accueil et de tri des demandeurs d’asile soient tous situés en dehors du territoire de l’Union européenne, sur le modèle de ce que pratique l’Australie depuis 2013.
 

Dans les faits, en matière de lutte contre l’immigration, le ministre de l’Intérieur de Merkel donne raison à Orbán

 
Pendant ce temps en Allemagne, après les protestations des sociaux-démocrates (SPD) membres de la coalition gouvernementale suite à l’accord entre Merkel et Seehofer, il semblerait que le projet de créer des centres de détention à la frontière, pour y trier et renvoyer illico presto les immigrants illégaux déjà enregistrés dans un autre pays de l’UE ou bien déjà déboutés du droit d’asile, ait été remplacé par de vagues « processus de transit » dans les locaux de la police. Tout le monde au sein du gouvernement allemand se dit satisfait, y compris Seehofer, mais ce n’est pas la première fois depuis la grande crise de 2015 que le chef de la CSU bavaroise menace de quitter la coalition avant de reculer sans n’avoir rien obtenu de concret.
 
Le ministre de l’Intérieur allemand se tourne donc vers Vienne et Rome pour arriver à la seule solution viable : la fermeture de la route de la Méditerranée centrale sur le modèle de ce qui a été fait dans les Balkans début 2016. Il donne de ce fait raison à Viktor Orbán contre Angela Merkel !
 

Olivier Bault