Le fossé grandit en Italie entre la hiérarchie de l’Eglise et le peuple sur la question de l’immigration

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Benoît XVI avait rappelé qu’à côté du « droit à immigrer », il y avait le droit des Etats « de réglementer les flux migratoires et défendre leurs frontières ». Saint Jean-Paul II avait, en 1980, appelé devant l’UNESCO à tout faire pour protéger « cette souveraineté fondamentale que possède chaque Nation en vertu de sa propre culture ». François, quant à lui, est le pape de l’immigration, de « l’accueil » indiscriminé de tous, réfugiés et immigrants économiques, et de la promotion du multiculturalisme. Et cela se reflète dans les positions adoptées par l’Église italienne. Après la formation d’un gouvernement « populiste » par la Ligue et le M5S, l’Eglise en Italie poursuit son engagement en faveur des migrants et prend le ministre de l’Intérieur Matteo Salvini pour cible, avec des arguments souvent proches de ceux de la gauche et de l’extrême gauche. Le peuple italien, lui, en a plus qu’assez de devoir subir une immigration massive et non choisie, et malgré l’hostilité de l’Eglise officielle, la popularité de la Ligue bat des records (à plus de 30 % des intentions de vote, elle dépasse désormais le M5S) et Matteo Salvini est l’homme politique qui suscite la plus grande confiance chez ses concitoyens, avec 56 % d’Italiens qui lui font désormais confiance.
 

Le président de la conférence des évêques d’Italie en pointe du combat contre Salvini

 
Le pape argentin dira une messe pour les immigrants vendredi pour le cinquième anniversaire de sa visite à Lampedusa où il avait demandé « pardon pour notre indifférence envers nos frères et nos sœurs » qui cherchent à immigrer (illégalement) en Europe. À Rimini, cet été, se tiendra comme chaque année la grande réunion pour l’amitié entre les peuples organisé par les milieux liés au mouvement catholique Communion et Libération, très influent en Italie. Une réunion où viennent régulièrement s’exprimer des personnalités politiques dont l’action est souvent très éloignée de l’enseignement de l’Église, car la réunion de Rimini se veut un lieu d’échanges et de rencontres ouvert à tous. Mais pas au M5S ni à Matteo Salvini, catholique déclaré qui avait, en février, pendant la campagne électorale, sorti un chapelet et une bible sur laquelle il avait juré d’être fidèle au peuple italien et de respecter les enseignements contenus dans la constitution italienne et dans l’Évangile. Cette promesse lui avait d’ailleurs valu de dures attaques de la part de plusieurs évêques italiens, parmi lesquels Mgr Nunzio Galantino, le président de la conférence épiscopale, justement à cause des positions anti-immigrationnistes de la Ligue.
 

L’Église n’a pas toujours été aussi favorable à l’immigration de masse et elle ne l’est pas partout autant qu’en Italie.

 
Tandis que les Italiens plébiscitent aujourd’hui la fermeture des ports aux bateaux des ONG et retrouvent leur dignité face aux capitales étrangères – une dignité perdue avec le renversement du gouvernement de Berlusconi en 2011 par ce que beaucoup de nos voisins transalpins considèrent comme un coup d’Etat mené depuis Berlin, Paris et Bruxelles –, des évêques, tel le cardinal Francesco Montenegro qui disait la messe en Sicile dimanche dernier, prétendent dans leurs homélies que ne pas accueillir tous les immigrants qui voudraient débarquer dans les ports italiens « signifie ne pas croire en Dieu ». A ce compte-là, il semblerait que saint Thomas d’Aquin lui-même ne croyait pas en Dieu puisqu’il n’était pas partisan d’une politique des frontières grandes ouvertes à l’immigration, mais en réalité le raisonnement de Mgr Montenegro est un peu simpliste et fait l’impasse sur l’éthique de la responsabilité à laquelle sont tenus les dirigeants chrétiens. Qui sont d’ailleurs les hommes d’Etat chrétiens véritablement croyants et pratiquants dans l’Europe d’aujourd’hui ? Il n’yen a pas beaucoup, malheureusement : le Polonais Mateusz Morawiecki, le Hongrois Viktor Orbán…
 

Un prêtre provoque la sortie d’une partie des fidèles en attaquant la politique de Salvini contre l’immigration

 
L’idéologie immigrationniste n’affecte pas que des évêques comme Mgr Galantino, que Salvini avait qualifié en 2015 d’évêque communiste. Il arrive aussi que des prêtres s’en prennent nommément au ministre de l’Intérieur à propos de sa décision de fermer les ports italiens aux ONG immigrationnistes. Après qu’un de ces prêtres eut ainsi, par ses propos anti-Salvini, provoqué la sortie, pendant la messe, d’une partie des fidèles en colère, Matteo Salvini lui a rappelé publiquement qu’il cherchait « uniquement à appliquer un peu de bon sens » comme le lui demandent des millions d’Italiens.
 
Un bon sens qui semble malheureusement faire défaut à certains évêques des deux côtés des Alpes, à croire qu’ils n’ont pas avec eux la sagesse que donne l’Esprit Saint. Peut-être est-ce parce que, pour reprendre les mots du cardinal Müller à propos de certaines tendances actuelles dans l’Église catholique, « Nous sommes en train de faire l’expérience d’une conversion au monde au lieu d’une conversion à Dieu ».
 

Olivier Bault