La loi turque levant l’immunité parlementaire vise les parlementaires pro-Kurdes

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La nouvelle loi turque levant l’immunité parlementaire est clairement dirigée contre les législateurs du HDP (Parti démocratique du peuple), parti d’opposition anti-nationaliste accusé par Erdoggan d’être favorable aux Kurdes. La loi a été votée vendredi dernier par 376 députés sur 550, et vise principalement 138 d’entre eux, qui pourraient être accusés de « soutien au terrorisme » du fait qu’ils ne s’alignent pas nécessairement sur les positions du président turc à l’égard des Kurdes.
 

Réactions internationales à la levée de l’immunité parlementaire en Turquie

 
Cette décision inquiète la communauté internationale et les partenaires de la Turquie au sein de l’Union européenne. Frederica Mogherini, la Haute-représentante des Affaires étrangères et Vice-présidente de la Commission européenne, a critiqué la manœuvre, et Steffen Siebert, porte-parole du gouvernement allemand a dit que la question sera certainement soulevée par Angela Merkel lors du sommet humanitaire avec le président turc, précisant : « Pour la stabilité intérieure de toute démocratie, il est important que tout groupe représentatif dans la société soit présent au Parlement (…) Ils devraient pouvoir exercer leur mandat librement et de manière indépendante. »
 

L’Allemagne inquiète de l’évolution dictatoriale turque

 
De plus, la chancelière rencontrera des militants de la société civile turque à Istanbul dimanche. Quant au ministre allemand de la justice Heiko Maas, membre du SPD, il a déclaré que cette décision d’Ankara est « incompatible avec l’aspiration de la Turquie à devenir membre de l’UE ». Le Département d’Etat américain a lui aussi réagi en déclarant que cette loi aura un « effet glaçant » sur les libertés démocratiques en Turquie.
 
Auparavant, bien que les parlementaires bénéficiaient d’une immunité, les autorités pouvaient néanmoins instruire des dossiers à charge, utilisables après leur mandature. Une grande majorité des membres du HDP (50 sur 59), du fait de leur soutien aux Kurdes, font ainsi l’objet de tels « dossiers ». Pour protester, plus de 1.000 personnes ont participé à un rassemblement à Istanbul dimanche.

 

Erdoggan veut supprimer toute opposition parlementaire pro-Kurde

 
« Il y a déjà trop de violence dans le pays. Bloquer le Parlement et brusquer le HDP peut mettre le feu aux poudres… » a déclaré le co-leader du parti pro-kurde Selahattin Demirtas. Le mois dernier, les membres du HDP et de l’AK, le parti d’Erdoggan, en sont venus aux mains lors d’un débat au Parlement sur la question de l’immunité parlementaire.
 
Les forces de sécurité turques sont impliquées dans une opération militaire de grande envergure au sud-est du pays, peuplé originellement de Kurdes. Environ 7.600 militants du PKK ont été tués depuis juillet l’an dernier, a annoncé le chef de l’Etat Erdoggan mardi, ajoutant : « Nous allons continuer les opérations avec détermination »…
 

Patrick Neuville