Liberté de la presse : le président turc Erdogan refuse qu’on lui donne des leçons de démocratie

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L’ombre de Barack Obama ne plaît guère à Recep Tayyip Erdogan.

 
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a rejeté lundi toute leçon de démocratie de la part des Occidentaux, qui multiplient, ces derniers jours, les critiques à son encontre quant à la dérive autoritaire de son régime. Les reproches ont notamment afflués ces derniers temps en ce qui concerne la liberté de la presse en Turquie.
 
L’actuel homme fort de la Turquie n’y a pas été par quatre chemins. « Ceux qui tentent de nous donner une leçon de démocratie et de droits de l’Homme doivent d’abord contempler leur propre honte », a lancé lundi le président Erdogan au cours d’un discours télévisé prononcé à Ankara.
 

Le président turc Erdogan refuse les leçons de démocratie

 
Le propos visait manifestement en premier lieu son homologue américain Barack Obama qui, vendredi dernier, au lendemain d’un entretien avec le président Erdogan à Washington où il était venu participer au sommet sur la sécurité nucléaire, avait dénoncé le chemin très inquiétant pris par la Turquie en matière de liberté de la presse.
 
Ankara est en effet accusée de museler la presse (du moins la presse d’opposition), accusation justifiée par la récente mise sous tutelle du quotidien Zaman, désormais très louangeur pour le régime, et le procès intenté à deux journalistes du Cumhuriyet, Can Dündar et Erdem Gül, menacés d’être condamnés à la prison à vie sous le motif d’avoir révélé des secrets d’Etat. Et, de fait, depuis son élection à la présidence de la République au mois d’août 2014, Recep Tayyip Erdogan a multiplié les poursuites pour insultes le visant.
 
En apprenant donc les propos tenus par son homologue américain, Recep Tayyip Erdogan s’était déjà dit attristé par cette réaction.
 
Lundi, il a donc été plus loin, ne se contentant pas de se défendre, mais retournant les critiques à ses détracteurs. « Aux Etats-Unis, une personne qui a insulté le président a écopé d’une peine de trois ans d’emprisonnement, et en Allemagne, c’est deux ans de prison pour quelqu’un qui a insulté Merkel », a-t-il affirmé. « Ça n’a rien à voir avec la liberté d’opinion ou de presse… »
 

Liberté de la presse : une question universelle

 
Il ne semble pas que le président turc se soit donné le luxe d’apporter plus de précisions sur ses accusations. Mais le fait importe peu. Ce qui compte, c’est que le président Erdogan entend prouver à tous, et à la communauté internationale en particulier, que la Turquie n’est plus, sous sa férule, un « homme malade », mais bien un pays respectable. Et pour cela, dans son esprit, il doit faire montre de sa force…
 
D’ailleurs, lors d’une conversation téléphonique que le premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, a eu ce même lundi avec son homologue allemand Angela Merkel, il a, lui aussi, dénoncé les attaques inacceptables dont la presse allemande se fait l’écho à l’encontre du président turc. Le jour-même, l’hebdomadaire allemand Der Spiegel publiait effectivement à la « Une » une caricature du président Erdogan, appelé l’homme furieux du Bosphore, et multipliant à son encontre des affirmations dont on peut comprendre que, vraies ou fausses, elles ne lui aient guère fait plaisir.
 
Cela dit, Erdogan est lui aussi plus ou moins dans le vrai. Si sa manière peut paraître plus musclée que celle d’autres dirigeants politiques, ceux-ci savent aussi, de façon plus discrète parfois, protéger leur réputation et leur image…
 

François le Luc