Les médecins plus doués que Google pour le diagnostic

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Une étude comparative menée par Harvard révèle – à vrai dire sans surprise – que les médecins en chair et en os sont bien plus doués pour poser un diagnostic correct sur la pathologie d’un patient que les vérificateurs de symptômes proposés par Google, et notamment par Web MD et la Mayo Clinic aux Etats-Unis et Isabel Symptom Checker au Royaume-Uni.
 
L’étude publiée par JAMA Internal Medicine a permis de comparer les diagnostics posés par des médecins et des algorithmes sur des cas vérifiés, en ayant accès à la même information : histoire médicale et symptômes. En présence de toutes les données traitées par les logiciels, les médecins aboutissaient à un résultat juste de premier rang dans 72 % des cas, contre 34 % seulement pour les applications.
 

Rechercher un diagnostic médical sur Google : une assurance d’erreur

 
La portée de l’étude est importante puisqu’elle ne s’est pas bornée à l’un ou l’autre programme de diagnostic : elle a comparé les résultats de 23 vérificateurs de symptômes en ligne, dont certaines sont accessibles par le biais de sites Internet et d’autres fonctionnent sous forme d’applications. Parmi eux, les plus connus cités plus haut n’ont pas fait preuve d’une plus grande exactitude que les autres.
 
L’idée de recourir aux technologies de l’information pour poser un des diagnostics médical dans le domaine de l’exercice de la médecine a été mise en avant par l’Institute of Medicine américain, à partir du constat que les erreurs de diagnostic sont fréquents chez les médecins. On pensait même que les ordinateurs pourraient faire des diagnostics cliniques corrects sans intervention humaine.
 
Cette proposition n’est pas encore entrée dans la pratique. Les vérificateurs de symptômes pris en compte par l’étude sont ceux proposés aux internautes sans formation médicale afin de faire un auto-diagnostic.
 

Le médecin en chair et en os se trompe beaucoup moins souvent, même sans voir le patient

 
Le responsable de l’étude, le Dr Ateev Mehrotra, souligne qu’il ne s’attendait pas à autre chose que la confirmation de la plus grande pertinence du diagnostic réalisé par un être humain. Mais il estime que les médecins, qui n’atteignent pas non plus à la perfection, pourraient profiter des services apportés par les vérificateurs informatiques.
 
L’étude reste modeste puisqu’elle n’a porté que sur 45 cas cliniques proposés à 234 médecins à travers une plate-forme Internet, Human Dx. Les praticiens n’avaient évidemment aucun moyen de procéder à un examen clinique de leur patient virtuel, et ils ne pouvaient pas non plus demander des analyses.
 
Sur les 45 cas proposés, 15 correspondaient à des états aigus, 15 étaient moyennement graves et 15 n’exigeaient que des soins légers. Pour la plupart, il s’agissait de pathologies communes, 19 seulement correspondant à des pathologies plus rares. Les médecins avaient la possibilité de proposer leur diagnostic librement, et même de proposer plusieurs réponses par ordre de probabilité. Chaque cas a été évalué par 20 médecins au moins.
 

Les médecins sont plus doués pour le diagnostic, y compris pour les cas graves et rares

 
En comparaison avec les vérificateurs de symptômes, ce sont les médecins qui ont le plus souvent posé le diagnostic correct pour chacun des cas soumis. Ils se sont également montrés plus exacts pour les cas les plus graves et pour les diagnostics moins communs, tandis que les algorithmes informatiques réussissaient mieux à identifier les pathologies moins graves et plus communes.
 
Comme l’explique le Dr Andrew Fine de l’hôpital pour enfants de Boston (qui n’a pas participé à l’étude), « en faculté de médecine, on nous apprend à prendre en compte des diagnostics très largement différenciés, couvrant aussi des cas rares, et à prendre en compte des états potentiellement critiques ». La capacité des médecins à reconnaître les diagnostics rares qu’on n’a « pas le droit de rater » est également évalué lors des examens universitaires : « Peut-être les praticiens ont été conditionnés à les rechercher », commente-t-il.
 
Détachés de la réalité, les algorithmes ne peuvent avoir la même précision que les médecins, souligne ce médecin : selon lui, l’intérêt des vérificateurs de diagnostic pourrait être plutôt d’amender ou de revoir des diagnostics sur la base de nouvelles informations dans certains contextes, en salle d’urgences par exemple.
 

Anne Dolhein