Le média conservateur-libertaire PanamPost dénonçait dans un article publié mercredi « l’alliance perverse » entre Vladimir Poutine et Daniel Ortega, président du régime sandiniste du Nicaragua, à travers l’accueil de vols long-courrier assurant le transport de centaines de candidats à l’immigration clandestine aux Etats-Unis depuis des pays le plus souvent islamiques. Des compagnies libyennes, égyptiennes, vénézuéliennes…, dont certaines visées par des sanctions américaines, sont désignées comme participant à ce trafic par la journaliste Gabriela Moreno.
De Libye aux Etats-Unis en passant par Poutine et Ortega
L’une des compagnies actuellement dans le collimateur aux USA est libyenne : Ghadames, qui vient d’être vendue à l’un des fils du maréchal Jalifa Haftar, chef de la partie orientale de la Libye : le patriarche de la famille a des liens avec Poutine, selon le site d’informations 14yMedio qui renvoie à la presse nord-africaine. Voilà qui fait de Poutine le « responsable ultime » de la vague de clandestins en provenance de l’Inde, affirme le journal, qui pointe une tentative de nuire à la campagne de Joe Biden – pourtant largement responsable de la porosité des frontières. Ce qui est sûr, c’est que la situation nuit avant tout à la sécurité et à la vie paisible aux Etats-Unis.
Est-ce un hasard si on retrouve un schéma analogue pour les départs d’Afrique du Nord vers l’Italie ou de la Russie vers la Finlande ?
Ci-dessous, notre traduction de l’article du PanamPost. – J.S.
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Ces vols pleins de migrants clandestins qui atterrissent à Managua
Les atterrissages inhabituels des vols de la compagnie libyenne Ghadames Airlines à l’aéroport international Augusto Sandino du Nicaragua recèlent un marché stratégique entre le régime sandiniste de Daniel Ortega et le président russe Vladimir Poutine : déplacer des migrants pour faire pression sur les Etats-Unis.
La compagnie, en activité depuis trois ans, figure sur la liste des alliés des deux présidents. Selon des informations publiées par 14yMedio, cinq vols de Ghadames Airlines sont arrivés dans le pays d’Amérique centrale depuis février avec à chaque fois 400 passagers à bord se faisant passer pour des touristes après avoir payé jusqu’à 10.000 dollars pour un billet, sur des vols que la compagnie aérienne facture entre 230.000 et 250.000 dollars. Les bénéfices ont dû être dodus…
Ces avions arrivent de loin. La compagnie aérienne basée à Benghazi, en Libye, a effectué des vols de 14 heures en utilisant un Boeing 777-200, immatriculé 5A-GRS. Les vols détectés sont partis de Tachkent, la capitale de l’Ouzbékistan, et de l’aéroport international de Benina en Libye.
L’entreprise Ghadames Airlines est dans le collimateur des Etats-Unis. Le Département d’Etat a déjà prononcé des sanctions à l’encontre de Mohamed Ben Ayad, l’homme d’affaires libyen qui en était le propriétaire avant qu’elle ne passe aux mains des fils du maréchal Khalifa Haftar, allié de Poutine et propriétaire de Berniq Air.
Du fait de cette mesure, la compagnie aérienne libyenne ne rejoint pas seulement la liste des entreprises qui soulèvent des doutes quant à leurs activités, mais elle éveille également des soupçons au sujet de l’existence d’un vaste réseau de compagnies qui totalisent à ce jour 1.150 vols charters « pseudo-commerciaux » entre mai 2023 et mai 2024 à destination du Nicaragua.
Déjà, en décembre, la compagnie roumaine Legend Airlines a dû subir l’immobilisation d’un avion à Paris lors d’une escale technique. Les autorités françaises avaient alors rapatrié les 300 passagers à bord, car il s’agissait de migrants indiens.
La compagnie égyptienne Alexandria Airlines a également un épisode similaire à son actif : elle a transporté quant à elle 370 passagers indiens et marocains vers l’aéroport Augusto César Sandino de Managua. D’autres compagnies sont impliquées dans des opérations de ce type, telles que Universal Sky Carrier, Aruba Airlines, Conviasa (une compagnie pro-Chávez sous sanctions), ou encore Sky High Aviation Services et Air Century.
Il existe à leur sujet des données similaires à propos des vols qu’ils effectuent sur le continent américain pour transporter des Cubains, des Haïtiens et des Vénézuéliens cherchant à emprunter la « route des volcans » qui mène aux Etats-Unis depuis Managua.
« L’aide subtile » du régime Ortega
Que cache donc cette « aide subtile » que le régime de Daniel Ortega apporte pour continuer à encourager les vagues migratoires vers les Etats-Unis ? La réponse à cette question a fait l’objet d’études de la part de plusieurs spécialistes.
« La motivation en est fondamentalement politique et idéologique et relève de la haine d’Ortega à l’égard des Etats-Unis. Les répercussions sont considérables. L’une d’entre elles est la menace pour la sécurité des Etats-Unis, pour la sécurité nationale, étant donné que le contrôle exercé par le Nicaragua sur les arrivants en provenance de ces pays est minimal et qu’il est possible d’arriver avec un faux passeport, voire être un terroriste », a déclaré à El País Manuel Orozco, expert en migrations et analyste au Dialogue interaméricain. C’est on ne peut plus clair, selon lui.
Il ne fait aucun doute qu’Ortega défie de plus en plus les Etats-Unis. En effet, il a annoncé qu’il établirait des relations diplomatiques avec l’Emirat islamique d’Afghanistan, dirigé par les talibans depuis 2021, faisant du Nicaragua le seul pays des Amériques et le cinquième au monde à y nommer un ambassadeur. Cette décision aura un coût : Ortega est désormais un candidat potentiel à des sanctions liées au terrorisme. Ce qui n’est pas déraisonnable quand on sait que les talibans sont des terroristes mondiaux spécialement désignés (SDGT) en vertu du décret 13224 de la Maison Blanche.
Poutine et les migrants clandestins
Le régime sandiniste de Daniel Ortega accroît le rejet international dont il fait l’objet en servant de tête de pont aux compagnies aériennes qui transportent les migrants espérant atteindre le sol américain.
La session de l’Organisation des Etats américains (OEA) qui se tient actuellement au Paraguay se penche justement sur la question de la sécurité dans la région. Lors de cette réunion, les Etats-Unis ont indiqué qu’ils feront pression en faveur d’une nouvelle résolution condamnant le Nicaragua pour ses violations systématiques des droits de l’homme. « La résolution sera rédigée en termes forts. Nous n’allons pas abandonner le peuple du Nicaragua », a ainsi déclaré l’ambassadeur de Washington auprès de l’organisation, Francisco Mora.
Le diplomate a reconnu que l’administration de Joe Biden « est préoccupée et sensibilisée à la question » de l’immigration. Les raisons ne manquent pas après la capture à New York, Philadelphie et Los Angeles de huit membres présumés de l’Etat islamique (ISIS) originaires du Tadjikistan et entrés par la frontière sud.
Gabriela Moreno