C’est François Mitterrand qui lui avait remis sa Légion d’honneur en 1987, mais il le faisait sur proposition du ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Jacques Chirac. Déjà à l’époque, le général Manuel Noriega était le dictateur de fait du Panama même s’il ne s’était pas encore auto-désigné président, ce qu’il fera en 1989 après avoir annulé les élections gagnées par le candidat de l’opposition. Mais c’est dès l’année de sa Légion d’honneur qu’il est lâché par les Etats-Unis qui accusent le dictateur d’être un narcotrafiquant au service du cartel de Medellin du célèbre Pablo Escobar. Il semble en fait que la CIA avait avalisé ce transit de la drogue par le Panama pour assurer le financement illégal dans les années 1980 des guérillas anticommunistes d’Amérique centrale.
Après avoir longtemps travaillé pour la CIA, Noriega le narcotrafiquant était devenu encombrant pour les États-Unis
Manuel Noriega avait pris la tête des services de renseignement du Panama après avoir soutenu en 1968 le coup d’Etat militaire qui avait porté au pouvoir le général Omar Torrijos. Quand Torriros a trouvé la mort en 1981 dans une catastrophe aérienne dont les circonstances n’ont jamais été élucidées, c’est Manuel Noriega qui a pris la tête des forces armées panaméennes, devenant ainsi l’homme fort du pays. Généreusement rémunéré par la CIA, Noriega a aidé les Etats-Unis à armer les guérillas anticommunistes d’Amérique centrale, ce qui ne l’a pas empêché de travailler également avec les services cubains. C’est sans doute plus Noriega le narcotrafiquant associé au cartel de Medellin que Noriega le dictateur faisant assassiner ses opposants qui a fini par provoquer l’invasion américaine décidée par le président George Bush en 1989.
Une enquête ouverte en France contre Noriega deux ans seulement après que Mitterrand lui a décerné la Légion d’honneur
Le Commandeur de la Légion d’honneur Manuel Noriega a ensuite écopé en 1992 d’une condamnation à 40 ans de prison prononcée par un tribunal de Floride. Sa peine a ensuite été ramenée à 17 ans pour bonne conduite, ce qui a permis son extradition en 2010 en France dans le cadre d’une enquête pour trafic de drogue ouverte en 1989. Condamné à 7 ans de prison par un tribunal français en 2010, il est incarcéré à la Prison de la Santé à Paris avant d’être extradé vers le Panama en 2011, où il est à nouveau condamné et emprisonné pour les violations des droits de l’homme commises sous son régime.
L’ex-dictateur du Panama, mort après avoie demandé pardon mais sans jamais reconnaître sa responsabilité des assassinats politiques de son régime
Jusqu’à la fin, Manuel Noriega a refusé de reconnaître son implication dans les assassinats politiques et de collaborer pour établir les responsabilités, tout en demandant pardon à ses victimes en ces termes en 2015 : « Je demande pardon à toutes les personnes que j’ai offensées, affectées, blessées ou humiliées par mes actes ou ceux de mes supérieurs en obéissant aux ordres, ou ceux de mes subordonnés ». Atteint d’une tumeur au cerveau, le général Noriega a obtenu en janvier de pouvoir sortir de prison pour être hospitalisé. Opéré le 17 mars dernier, Manuel Noriega est décédé lundi soir à 83 ans des suites de son opération.