Retour au KGB ? Contre la corruption et le terrorisme, Poutine réforme les polices russes

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Force d’intervention russe.

 
Selon le quotidien Kommersant, Vladimir Poutine a commencé une grande réforme des principales polices russes. Comme en Occident, la lutte contre la corruption et le terrorisme justifie une surveillance plus étroite et une structure plus centralisée. Certains parlent de retour au KGB.
 
Le quotidien économique Kommersant aime les informations à sensation, politiquement orientées, et a déjà fait l’objet de poursuites retentissantes, aussi ne donne-t-il pas ses sources, « nombreuses et anonymes », mais le projet qu’il attribue à Poutine est très clair : la création en avril dernier d’une garde nationale pour combattre le terrorisme n’est que le premier pas d’une vaste réforme des forces de sécurité russes. Il s’agirait de fusionner la sécurité fédérale (FSB), la garde nationale (FSO) et les services de renseignement extérieurs (SVR) dans une seule structure, le ministère de la sécurité de l’État (MGB).
 

Polices russes ou retour aux méthodes du KGB ?

 
L’objectif allégué serait une meilleure coordination pour une plus grande efficacité, non seulement contre le terrorisme, mais contre la corruption. Les médias russes ont en effet relaté de nombreux scandales qui tendent à établir la corruption de hauts fonctionnaires des polices russes. Le dernier date fort opportunément de quelques jours : l’adjoint au chef de la division économique du ministère de l’intérieur a été mis en cause par le FSB sous l’accusation d’avoir reçu un gros pot de vin, et l’on a en effet découvert dans l’appartement de sa belle-sœur une somme de 120 millions de dollars en liquide. Montage selon les bonnes vieilles méthodes du KGB ou véritable enquête ? Il est impossible de le savoir vu de Paris. Prétendre lutter contre la corruption et le terrorisme est un but louable qui a permis aux États-Unis le Patriot Act, en France la loi renseignement, les Panama Papers, la divulgation de listes de fraudeurs du fisc, etc. C’est toujours au nom du bien que l’État renforce les polices, les Russes n’échappent pas à cette loi internationale. Le mieux est l’ennemi du Bien.
 

Poutine refuse de commenter la réforme

 
Il semble seulement que Vladimir Poutine n’y aille pas avec le dos de la cuiller. En même temps qu’il créait en avril la garde nationale, il a dissous le service fédéral des migrations et la surveillance fédérale des drogues, dont il a placé les attributions sous la direction directe du ministère de l’intérieur. Et le nouveau ministère de la sécurité d’État (MGB) recevra des pouvoirs judiciaires étendus à toutes les formes d’investigation et dans tous les domaines où s’exerce aujourd’hui les pouvoirs des diverses agences de sécurité. Selon Kommersant, « des postes honoraires sans pouvoir réel » seront proposés pour les dédommager aux patrons actuels des divers services qui seront remplacés. Le quotidien cite le nom d’Aleksandr Bastrykine, le chef du « comité d’investigation ». Les intéressés ont refusé de s’exprimer, mais, selon le quotidien, plusieurs auraient confirmé, sous couvert de confidentialité. Quant au responsable de presse de Vladimir Poutine, Dimitri Peskov, il s’est déclaré dans l’incapacité de commenter immédiatement les informations de Kommersant.
 

Contre la corruption et le terrorisme : le prétexte universel

 
La presse anglo-saxonne, toujours férue de guerre froide et traversée de sentiments anti-russes, a tôt fait d’analyser la chose comme un « retour au KGB ». Il faut dire que la qualité d’ancien lieutenant-colonel du KGB de Vladimir Poutine, et son ascension météorique vers le pouvoir après un an à la tête du FSB donne quelque consistance à ces craintes. Pour beaucoup d’observateurs qui n’ont rien de fantaisistes, Poutine est l’homme des Guébistes, des Siloviki, les hommes des forces militaires et du renseignement, partisan de l’État fort en opposition aux oligarques et autres libéraux pro-occidentaux. Mais c’est peut-être aussi un réaliste qui se sert du terrain pour suivre avec efficacité un mouvement mondial de renforcement des polices qui exploite la lutte contre les grands fléaux médiatiques que sont la corruption et le terrorisme.
 

Pauline Mille