Eugénisme et haine des pauvres : le responsable des jeunes Tories britanniques a proposé de stériliser les bénéficiaires des allocations sociales

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Le nouveau vice-président des jeunes conservateurs, promu par Theresa May le 8 janvier dernier à ce poste qui lui promet un bel avenir au sein des Tories, vient d’être rattrapé par son passé – et à juste titre. La presse tabloïde de « droite » s’est fait un plaisir de rappeler les propos que tenait l’étoile montante Ben Bradley il y a six ans : dans un message publié sur son blog, il annonçait que le Royaume-Uni se noierait « dans une vaste mer de gaspilleurs au chômage » si les familles pauvres continuaient d’avoir trop d’enfants. Il proposait même de stériliser les hommes bénéficiaires des allocations sociales : la vasectomie pour tous pour empêcher qu’on s’en remette à l’Etat-providence pour supporter les frais des enfants.
 
Le message avait été assez rapidement effacé du blog de Ben Bradley, sans doute à cause de son eugénisme trop évident : si le mouvement pour le contrôle de la population vise en effet prioritairement les populations les plus pauvres – les Africains subsahariens, les Noirs en Amérique, les Chinois, les Indiens… – il n’aime pas que cela se sache.
 

Stériliser les bénéficiaires d’allocations sociales : un mauvais choix de mots ?

 
A l’époque donc, Bradley avait affirmé qu’il est « horrifiant » que des familles puissent obtenir davantage d’allocations que le revenu moyen d’un foyer au travail « simplement parce qu’elles ont dix gamins ». «  Désolé, mais le nombre d’enfants que vous avez est un choix ; si vous n’en avez pas les moyens, arrêtez d’en avoir ! La vasectomie est gratuite », lançait-il.
 
Revêtu de plus hautes responsabilités au sein de son mouvement politique, Ben Bradley vient d’être confronté à la remontée à la surface de ces propos malthusiens. Il s’est empressé d’expliquer qu’il avait « mûri » au cours de ces six dernières années grâce à ses responsabilités politiques : « Je présente mes excuses pour ces messages… je me rends compte maintenant que ce langage n’est pas approprié. »
 
Il ne s’agit pas, notez-le bien, de reconnaître qu’il a eu tort sur le fond. C’est son « langage », ce sont ses mots qu’il regrette : sa manière d’exprimer une idée dont il ne s’éloigne pas pour autant.
 
Fin de l’incident ? Peut-on se contenter de dire que l’homme qui avait 22 ans à l’époque avait la dureté de la jeunesse, de celui qui voit des familles avec quatre ou cinq enfants bénéficier d’un logement social, ne jamais travailler et « s’offrir des consoles de jeux » pendant que les honnêtes gens travaillent dur pour pas grand-chose ?
 

Le responsable des jeunes Tories n’est pas si loin de la réalité

 
Non, parce que sa remarque en dit long sur l’état de nos sociétés où l’Etat-providence finit par jouer le rôle de père nourricier, non sans avoir au préalable organisé le chômage, créé les conditions pour qu’un revenu de chef de famille ne suffise plus à vivre convenablement (d’ailleurs il est interdit de parler du « chef de famille » en ces temps d’égalitarisme), et rendu la dépendance à l’égard des fonds publics aussi large que possible. Celui qui paie, décide : en voilà l’illustration la plus criante.
 
Il faut ajouter que ces propos ont été tenus au moment où le conservateur Iain Duncan Smith, ministre du travail et des retraites de 2010 à 2016 imposait des limites aux allocations sociales.
 
Bien plus grave encore est la politique anti-familiale menée par les conservateurs britanniques qui ont modifié en 2017 les règles de l’attribution des allocations familiales et des avantages fiscaux pour compenser la charge des enfants, en limitant sévèrement les dispositifs pour les personnes ayant un troisième enfant ou davantage depuis l’entrée en vigueur de la loi en avril dernier.
 
Dans la plupart des cas l’arrivée du troisième enfant et des suivants ne donnent plus droit à aucun avantage, sauf si la femme arrive à démontrer qu’elle a été violée (sic) ou si sa seconde grossesse est une grossesse multiple.
 
Ces dispositions font actuellement l’objet d’une contestation légale de la part de groupes d’aide aux enfants pauvres qui mettent notamment en avant la discrimination qu’elles constituent à l’égard des personnes qui refusent la contraception pour des motifs religieux.
 
Il s’agit tout simplement d’une autre manière de mettre en œuvre ce que Ben Bradley avait exprimé de manière trop ouverte.
 

Jeanne Smits