La Commission européenne a formulé mercredi ses propositions pour créer une sorte d’espace Schengen militaire afin de favoriser les mouvements de troupes au sein de l’UE, pour permettre notamment d’accélérer la projection de forces sur le flanc oriental de l’OTAN en cas de crise. L’idée était en gestation depuis quelques années déjà. La nécessité d’adapter les procédures administratives et certaines infrastructures pour les déplacements militaires transfrontaliers a été mise en évidence de manière criante lors du déploiement en 2017 d’environ 8.500 soldats de l’OTAN en Pologne et dans les Pays baltes. C’est ainsi qu’en Pologne certains ponts trop bas par rapport aux normes en vigueur plus à l’ouest ont beaucoup retardé le passage des convois militaires à destination des Pays baltes. En octobre dernier, un rapport de l’OTAN avait évoqué l’incapacité de l’Alliance atlantique à faire face à une éventuelle agression russe justement en raison de ses faiblesses logistiques.
Avec un Schengen militaire, les troupes pourront se déplacer à travers l’UE aussi rapidement que les immigrants clandestins !
« J’aimerais que nous puissions nous déplacer à travers l’Europe aussi rapidement que le font les migrants », s’était plaint l’année dernière le lieutenant-général Ben Hodges, alors commandant en chef des forces américaines en Europe. « Nous avons besoin d’un espace Schengen militaire. Les Russes ont une totale liberté de mouvement au sein de leur territoire. Nous devons pouvoir nous déplacer aussi rapidement, sinon plus vite, pour masser des forces contre un potentiel ennemi afin d’être dissuasifs », avait-il aussi soutenu. Et il est vrai que la Russie fait régulièrement la démonstration de ses capacités de projections de force vers l’Ouest avec les manœuvres Zapad héritées de l’époque soviétique. Elle en a aussi fait la démonstration avec l’invasion de la Crimée en 2014.
Le projet « Schengen militaire » facilitera les mouvements de troupes
Le plan divulgué mercredi par la Commission européenne prévoit donc d’alléger les contrôles frontaliers pour les convois militaires et de mettre les infrastructures routières et militaires aux normes sur certains itinéraires définis. Ce plan devra être approuvé par les gouvernements de l’UE et le Parlement européen aura lui aussi son mot à dire. La Commission prévoit une mise en œuvre rapide, c’est-à-dire dans les prochains mois. L’objectif est aussi de tenir compte des besoins militaires pour la construction de nouvelles infrastructures. Un premier rapport d’avancement sera attendu pour l’été 2019. L’adoption de ce plan est hautement probable dans la mesure où, contrairement à la question de la mobilité des immigrants en situation irrégulière qui divise gravement l’UE, l’impératif de mobilité des forces de l’OTAN est approuvé aussi bien par les pays de la partie orientale que par ceux de la partie occidentale du bloc européen.
D’aucuns y verront toutefois sans doute un pas de plus vers une Union européenne de la défense après le lancement d’une coopération structurée permanente par 25 pays de l’UE en décembre dernier.