DRAME HISTORIQUE Sunset song ♠


 
Sunset song – le chant du coucher du soleil – est l’adaptation du roman éponyme de Lewis Grassic Gibbon (1901-1935), auteur régionaliste écossais engagé. Le film décrit les aventures tragiques d’une jeune fille d’Ecosse. Heureuse au lycée, bonne élève, y compris en français – scène amusante, elle est la seule à pouvoir prononcer le « u » français, redoutable pour les anglophones paraît-il –, elle est confrontée par la suite à une série ininterrompue de malheurs. Sa mère meurt, suicidée, ce qui constitue un scandale dans l’Ecosse protestante rigide –presbytérienne calviniste – du début du siècle ; le médecin de famille réussit à la faire passer pour folle. La jeune fille renonce alors à ses études à l’école normale pour tenir le ménage de son père paysan. Elle sacrifie un avenir d’institutrice pour servir un homme détestable, violent, faux dévot, d’une hypocrisie répugnante. Elle le laisse plus ou moins mourir lors d’une de ses attaques. Elle se marie, en 1914. Son bonheur est éprouvé par la guerre. Son mari est poussé par la pression sociale écrasante à se porter volontaire en 1915. Initialement gentil à la limite de la niaiserie, et pour tout dire insignifiant, il est moralement détruit par la guerre. Lorsqu’il revient de permission, il montre qu’il a sombré dans l’alcool et la débauche et exige, violemment, de son épouse des prestations de créature de maison close…
 

Sunset song, un tissu de charges contre la famille et la religion

 
Tous ces malheurs, du reste possibles dans leur enchaînement, font plus que beaucoup, et même franchement trop pour le spectateur. Sunset song est déprimant. En outre, il n’est pas sans impudeurs en certaines scènes. Quant au fond, l’Ecosse est-elle une Nation opprimée, aliénée jusque dans sa langue par l’Angleterre ? Un Français n’a pas à se prononcer sur la question, mais l’approche du film manque de nuances. Les Ecossais ont du reste récemment voté « non » à la question de leur indépendance. Bien pire, et là le spectateur catholique ne peut y souscrire, il faut relever des attaques contre la famille et la religion. Au-delà du cas particulier de la communion presbytérienne d’Ecosse, tout le christianisme, ou la vertu de religion en tant que telle, sont attaqués. Un père tyran domestique, une mère suicidaire, un mari lamentable, voilà qui vise peu finement la famille. Une propagande anticonceptionnelle explicite est aussi présente. Ces idées révolutionnaires en 1914 ou 1930 sont aujourd’hui des banalités, ce qui ne les rend pas plus sympathiques, estimables ou justes.
 
Nous reconnaîtrons à Sunset song une qualité fondamentale : il montre de beaux paysages d’Ecosse, et tout un monde rural disparu, qui peut charmer un trop court instant entre deux charges peu fines contre la famille ou la religion.
 

Hector Jovien

 
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